Reprise d’officine : les chemins à suivre pour investir à la campagne

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Reprise d’officine : les chemins à suivre pour investir à la campagne

Publié le 23 novembre 2024 | modifié le 24 novembre 2024
Par Julien Descalles
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Entre le désir de créer son activité ou l’envie de changer de vie, l’idée de reprendre une pharmacie rurale peut vite traverser l’esprit. Pour concrétiser ce projet, qui demande une réflexion approfondie, voici quelques principes à respecter.

Un mot d’ordre : ne pas se précipiter. Avant de céder à la tentation, les repreneurs doivent se plonger dans le logiciel de gestion officinal (LGO) et battre la campagne. « Il faut d’abord faire le point sur la situation médicale et paramédicale des environs, préviennent de concert Maxime Camilleri et Julien Lebrin, experts-comptables et associés du cabinet Audéfi, membre du réseau CGP, à Limoges (Haute-Vienne). Quelle est la proximité des prescripteurs ? Quels sont leur nombre et leurs âges ? Travaillent-ils à temps plein ? Prescrivent-ils beaucoup ? Si près de la moitié du chiffre d’affaires (CA) de l’officine provient du même médecin, mieux vaut s’assurer de la pérennité de son activité et ne pas hésiter à aller le rencontrer avant toute offre. » Autre information à glaner : l’existence ou non d’une coopération entre acteurs de santé. « Existe-t-il une maison de santé, une communauté professionnelle territoriale de santé, en projet ou non, un hôpital dynamique, etc. ? Si la coopération entre les différents professionnels de santé est bonne sur un territoire, c’est la promesse que de nouveaux viendront s’y installer. » Là encore, il ne faut pas hésiter à frapper aux portes et à se montrer intéressé par les programmes de stratégie collective. Voire à en être le moteur.

Cultiver sa proximité

Sur des territoires à la patientèle diffuse, parfois en voie de désertification médicale et pharmaceutique, le repreneur doit se préparer à mener une mission d’utilité publique. « Il a une responsabilité sociétale à endosser, celle de perpétuer la pérennité de l’offre de soins. D’où la nécessité de cultiver le lien avec les populations locales », soutiennent les deux associés du cabinet Audéfi. Pour toucher leurs cibles, les futurs propriétaires ont d’abord la possibilité de garder tout ou partie du personnel de l’officine. « Un visage connu est souvent très important dans une zone rurale, à condition évidemment d’avoir les moyens d’assumer la masse salariale », prolongent-ils. Autre atout : embrasser les nouvelles missions, vaccination, entretiens pharmaceutiques, téléconsultation et conseils en tête. « C’est une bonne manière d’attirer la clientèle, qui, dans les déserts médicaux, attend du pharmacien qu’il tienne ce rôle. »

« L’important est de ne pas se retrouver isolé », résument les deux experts-comptables. Et Julien Lebrin de témoigner des vertus de l’association via la reprise à deux d’une officine de taille modeste jusqu’alors tenue par un seul titulaire : « Y aller en binôme leur a permis de mieux gérer leur emploi du temps pour préserver leur vie personnelle. » La prise des congés, l’ajout de nouvelles missions et le déploiement des compétences ont aussi été facilités. Et ce sans mettre en danger l’équilibre économique de la pharmacie, le coût d’un titulaire étant le même qu’un adjoint à temps plein. Autres pistes possibles pour marcher à plusieurs : rallier un réseau de pharmacies ou envisager le regroupement.

« Pharmacie à 1 € »

Sur les réseaux sociaux ou sur Leboncoin, ce type d’annonce prolifère. Faut-il se laisser tenter ou fuir ce qui ressemble à un cadeau empoisonné ? « Ce n’est jamais bon signe, mais les offres bradées, surtout sur un marché des petites affaires (moins de 1,2 million d’euros de CA) en souffrance, ne sont pas non plus à balayer d’un revers de la main, note Maxime Camilleri, qui appelle une nouvelle fois à se renseigner avant de franchir le cap. Le tarif discount est-il lié à la situation de l’officine elle-même ou à un revendeur usé, à bout, ayant déjà connu plusieurs échecs de reprise, pressé de partir ? » Autant de questions qui doivent trouver des réponses avant d’investir, même 1 € !

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Dans les zones France ruralités revitalisation, il existe des exonérations alléchantes d’imposition sur les sociétés (100 % les cinq premières années, 75 % la 6e, 50 % la 7e et 25 % la 8e). Pour autant, « elles ne doivent pas provoquer la reprise. Avant tout autre chose, il faut avoir une appétence pour le rural, une vision “de proximité” du métier », soutiennent les deux experts-comptables.