Quand le bâtiment va… la santé aussi

C’est un parcours à l’image de l’homme : curieux et rationnel. « Obtenir le diplôme de pharmacien a été une première étape, explique Jean-Yves Clément, mais pour mieux entrer dans la répartition. Après deux ans d’assistanat, j’ai compris que ce métier comportait une composante administrative trop importante, la répartition me semblait un secteur plus dynamique et vivant. »

A peine son diplôme en poche, lorsque le directeur de l’IFP lui propose de le rejoindre en tant que pharmacien responsable, Jean-Yves Clément ne se fait donc guère prier. Deux ans plus tard il est nommé assistant de direction à Poitiers. « Cette expérience a été déterminante et m’a aidé à sortir de ma coquille, avoue-t-il. Je me souviens encore de la première fois où j’ai poussé la porte d’une officine pour vendre nos services. L’épreuve du feu passée, mes missions essentiellement commerciales au départ me permettaient de m’organiser librement, j’avais beaucoup de déplacements, ce qui n’était pas pour me déplaire. » Mais Jean-Yves Clément entend aussi saisir sa chance. Comme celle qui lui est offerte d’intégrer la succursale de Depolabo, à Angers, en vue d’une direction dans les deux ans à venir. « C’était intéressant à tous les points de vue, financièrement mais aussi de diriger une équipe de cinquante personnes. » Mais, en 1997, l’histoire prend fin pour des divergences de vue avec la direction sur l’avenir de la succursale d’Angers.

« J’ai souhaité revenir à une structure plus petite en me disant qu’il était alors plus facile de mener sa barque librement », explique Jean-Yves Clément. C’est ainsi qu’il se voit proposer le poste d’assistant de direction au sein des laboratoires Poirier à Fondettes (Indre-et-Loire). Ses espoirs de développer le créneau occupé par le laboratoire seront finalement peu à peu déçus, faute de moyens financiers.

Jean-Yves Clément choisit alors de ménager la chèvre et le chou. Il aime les petites structures pour la liberté d’action et la réactivité qu’elles offrent à leurs équipes. Il envie aux grands de l’industrie pharmaceutique leurs moyens pour mener à bien leurs projets les plus ambitieux. Il sera donc consultant dans une petite structure, RID International. « C’était extrêmement excitant, nous étions en contact avec les P-DG des plus grands laboratoires et nous les conseillions sur la réorganisation logistique de leur entreprise. J’ai mené des missions chez Upsa, Bristol-Myers Squibb, etc. Nous avions à la fois une vision globale de la vie de l’entreprise et la possibilité d’influer sur le cours de son développement. Cela m’est arrivé par exemple d’expliquer aux dirigeants d’un laboratoire qu’il fallait changer la localisation de leur usine installée en Chine. »

Des missions d’une richesse culturelle sans précédent mais qui laisse aussi peu de place à la vie familiale. « Après deux ans de ce régime, je me suis rendu compte que je devais rééquilibrer vie professionnelle et vie familiale », conclut-il. Jean-Yves Clément décide donc de se rapprocher de Poitiers où vit sa petite fille. Et surtout, il se sent mûr pour monter sa propre entreprise. « En fait, je crois que c’était un projet ancré profondément en moi, mais je n’avais jamais osé me lancer. Enfin j’étais prêt. »

Plomb, amiante, termites…

Quitte à créer, autant se lancer dans un métier nouveau. Jean-Yves Clément ouvre la toute première agence d’expert immobilier à Poitiers. Ils sont aujourd’hui six à exercer dans cette ville. « A l’époque, les premiers textes obligeant à rechercher d’éventuelles substances toxiques dans les habitations étaient encore en cours de rédaction. J’ai rapidement investi le créneau. Les agents immobiliers et les notaires ont reconnu en moi, grâce à mon diplôme de pharmacien et à mes formations en bâtiment, un véritable expert. » Plomb, amiante, termites, radon d’ici peu et peut-être même légionnellose ou contrôle du gaz, Jean-Yves Clément traque sans relâche les défectuosités des habitations pour préserver la santé de leurs futurs occupants.

Des échanges riches en émotion.

« En ce qui concerne les documents écrits, je me borne bien sûr à suivre strictement les obligations légales. Mais je suis parfois amené à donner oralement aux propriétaires des conseils sur leur santé et les risques inhérents aux polluants internes à l’habitat. Je réponds à leurs questions et je les rassure. » Car les questions ne manquent pas, notamment sur l’identification d’une peinture au plomb ou sur les risques liés au radon ou encore au fibrociment, très largement utilisé aujourd’hui.

Un métier qui permet aussi de rencontrer un large public et de pouvoir, au cours de l’expertise, mener un véritable échange. « La vente d’une maison est un moment important dans la vie et mes clients sont alors souvent enclins à se confier. Mes visites donnent donc fréquemment lieu à des échanges riches en émotion. Je travaille plus qu’auparavant, mais j’ai le sentiment contraire car le métier me passionne. »

L’affaire tourne rondement puisque Jean-Yves Clément double chaque année son chiffre d’affaires et compte désormais cinq salariés. « Malgré des tarifs un peu plus élevés que mes concurrents, je reste leader en termes de parts de marché car je crois être réellement reconnu en tant qu’expert. »