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© Getty Images/iStockphoto
RSE : on passe aux actes !
Alors que certains titulaires d’officine ont, par conviction, emprunté le chemin de la pharmacie « responsable », les initiatives se multiplient pour accompagner le mouvement, et tenter de le catalyser. Renforcé par un article consacré à l’écologie dans la nouvelle convention pharmaceutique et la crise énergétique, un effet de ruissellement est enfin perceptible. Avec des actions environnementales, mais aussi sociales et sociétales, pour une économie durable.
Cet été, Carrefour se donnait l’objectif de réduire sa consommation d’énergie de 20 % d’ici à 2024. Casino annonçait avoir soumis l’ensemble de ses fournisseurs à une clause contractuelle leur interdisant le soja issu d’une zone déforestée. Decathlon ouvrait un centre de formation des apprentis, le centre Beaugrenelle Paris étendait son heure silencieuse (de 15 à 16 heures) d’un à cinq jours par semaine, etc. Les commerces en tout genre multiplient leurs actions en matière de responsabilité sociétale d’entreprise (RSE). Aussi appelée « responsabilité sociale des entreprises », cette dernière est définie par la Commission européenne comme « l’intégration volontaire, par les entreprises, de préoccupations sociales et environnementales à leurs activités commerciales et leurs relations avec leurs parties prenantes ». Alors, quid des officines ?
RSE : la pharmacie s’y met
Depuis le début de l’année, le groupement Giropharm a lancé un groupe de travail RSE. Il inclut Olivier Bascoulès, cotitulaire de la Pharmacie de la Lèze à Lézat-sur-Lèze (Ariège), l’une des trois premières officines labellisées THQSE (Très haute qualité sociale et environnementale) en 2021, qui est par ailleurs le « Monsieur écologie » de l’Union des syndicats de pharmacies d’officine (Uspo). Lors du congrès d’octobre, Stéphanie Corre Le Bail, directrice Santé Qualité Formation de Giropharm, est intervenue spécifiquement sur le sujet, ainsi qu’Olivier Toma, fondateur et dirigeant de Primum Non Nocere, à l’origine du label THQSE. Concrètement, Giropharm veut encourager la nomination d’un référent RSE au sein de chaque officine, comme on désigne une personne référente assurance qualité (PRAQ). Autrement dit, les adhérents savent déjà faire ! Des séances de microlearning seront proposées pour une montée en puissance graduelle. Toutefois, il va falloir convaincre !
Bien-être et bien-faire…
Comme pour la qualité, une démarche RSE démarre par un état des lieux. Et, bonne nouvelle, chaque officine mène déjà des actions « responsables ». En triant, par exemple, les médicaments non utilisés à Cyclamed ou en référençant des marques de sa région… Dans sa pharmacie, implantée aux Ponts-de-Cé (Maine-et-Loire), Thomas Avril a entrepris une politique RSE dès son installation, en 2017. Ce titulaire diplômé d’un Master en Politiques environnementales et développement durable, a commencé sa vie officinale par l’écriture d’un projet d’entreprise autour de trois axes : la qualité du service, le bien-être au travail et la responsabilité environnementale. Quelques années plus tard, l’officine s’est fait épauler par la société de conseil spécialiste en responsabilité sociétale, GreenScale. À l’issue de quelques visioconférences avec toute l’équipe, une to do list a émergé. Et depuis, chacun contribue à mettre en musique les 22 actions coécrites : équiper le chauffe-eau d’un régulateur, réutiliser les documents numérisés sans réimprimer, vider la corbeille d’e-mails, etc. Autre signe des temps, deux jeunes pharmaciens viennent de mettre sur le marché des formations RSE. « L’engagement RSE ne doit pas mettre quinze ou vingt ans à se déployer, comme la qualité », explique Constant Beroulle, diplômé de l’option « Pharmacie Entrepreneur » à la faculté avec l’EM Lyon, comme son associé Damien Roux. Dans le cadre de leur start-up, Transipharm, ils ont mis au point, avec l’aide du spécialiste canadien de l’accompagnement des pharmacies en RSE, Maillon Vert, une formation de cinq heures découpée en sessions de 30 minutes. Ces cours permettent une approche théorique, un autodiagnostic et la mise en application d’actions. « Parmi les bêtatesteurs au sein d’Objectif Pharma, une des pharmacies a revu l’ensemble de son assortiment désormais quasi 100 % made in France, d’autres ont instauré du covoiturage entre collaborateurs et adapté leurs plannings en fonction… », confie Constant Beroulle. De son côté, le groupement Giropharm va, pour aider ses adhérents à mettre le pied à l’étrier, proposer un système de scoring, réalisé avec l’agence Primum Non Nocere, sur une quinzaine de thèmes : la gestion des déchets, le bien-être au travail, l’interaction avec l’environnement, la relation avec les fournisseurs, etc.
Acheter mieux
La RSE inclut aussi la performance économique, mais pas à n’importe quel prix ! Chez Giropharm, un des enjeux est d’acheter à des entreprises attentives à créer un environnement de bien-être au travail pour ses salariés et ceux de leurs propres fournisseurs. Autres critères, les produits doivent si possible être fabriqués en France, pour soutenir l’économie du territoire et préserver l’emploi, et à partir d’ingrédients respectueux de l’environnement… « Nous sommes énormément challengés par les adhérents sur ce sujet », remarque Stéphanie Corre Le Bail. « Je pense que les négociations pour 2023 vont marquer un nouveau départ », complète Luc Priouzeau, P-DG de Giropharm et titulaire, qui espère des engagements des fournisseurs tout en se refusant, pour l’instant, à employer des méthodes punitives. Investie dans la démarche THQSE, Sophie Matan, titulaire de la Pharmacie Pierre Fabre à Castres, fait, elle, signer « une charte de partenariat sous-traitant ». Un texte de quatre pages, personnalisé à partir d’un socle établit par l’agence Primum Non Nocere, qui exige entre autres des fournisseurs de rédiger chaque année leurs actions pro environnementales. « Aujourd’hui, les pharmacies ne sont pas assez nombreuses à demander ce genre d’engagement pour renverser le rapport de force », regrette Sophie Matan. « Il va y avoir un label complémentaire à THQSE émanant de l’Ordre national des pharmaciens, nos actions vont se standardiser et il y aura un effet boule de neige. On ne nous parle pas encore d’un enjeu sur les Rosp (Rémunérations sur objectif de santé publique), comme pour la démarche qualité, mais demain cela pourrait être le cas », anticipe-t-elle.
Au bout de la logique
La RSE s’envisage dans un processus d’amélioration continue. Début 2023, Giropharm entamera une opération « zéro sac ». Le groupement espère ainsi encourager les mêmes réflexes qu’en grande distribution alimentaire dans ses quelque 700 officines membres. « L’idée est faire comprendre aux gens que ne plus donner de sacs, c’est aussi une question environnemetale, donc de santé ! », incite Stéphanie Corre Le Bail. Rappelons qu’en pharmacie, les sacs ne figurent pas sur la liste positive des produits que l’officine a le droit de vendre*, c’est pourquoi « Il faut tendre vers le zéro sac », renchérit à son tour Guillaume Paquin, docteur en pharmacie et président du conseil de surveillance d’Objectif Pharma. C’est possible ! Thomas Avril, lui, n’en achète déjà plus. Ses patients, par ailleurs consommateurs habitués à ce genre de pratiques, se débrouillent. Et il a toujours la possibilité d’utiliser les sacs que les laboratoires continuent de lui envoyer malgré lui. Il pourrait leur demander d’arrêter, mais chaque initiative pour le changement demande du temps. Celui de l’acculturation. Thomas Avril essaie, par exemple, de ne plus recevoir les factures de Sanofi par courrier, reçues par ailleurs par courriel et accessibles en ligne. En vain, jusque-là ! Quant à Sophie Matan, elle parle « d’un véritable parcours du combattant. Au moment des travaux que j’ai effectués après mon installation en 2015, je voulais faire le meilleur choix pour chaque élément. Cela m’a demandé beaucoup de temps pour trouver les réponses à mes questions auprès des artisans et autres. Les aberrations sont nombreuses. Un exemple : Pourquoi n’installe-t-on pas en série un réducteur de pression d’eau sur tous les robinets ? ». Au final, elle a fait réaliser un audit énergétique de sa pharmacie.
1 livraison/jour : mythe ou réalité ?
L’engagement nécessite de revoir quantité de processus. S’indigner simplement de la taille des colis démesurés par rapport à leur contenant, revient en réalité à remettre en cause la logistique. « Nous commençons à aborder le sujet de passer à une livraison par jour. Et cela dépasse le cadre de Giropharm », reconnaît Luc Priouzeau. Laurent Filoche, président de Pharmacorp et de l’Union des groupements de pharmaciens d’officine (UDGPO) abonde dans le même sens : « C’est toute la filière qui doit s’y mettre et non pas seulement l’officine ». Certains titulaires ont déjà pris le taureau par les cornes. À l’image de Thomas Avril qui préfère refuser de meilleures conditions commerciales proposées en direct par un laboratoire, mais qui exige une livraison en plus de celle du grossiste. C’est un parti pris.
Social, sociétal et responsable
Dans un contexte où le recrutement est difficile, le management bienveillant est devenu capital. A fortiori dans une entreprise responsable ! Pour donner confiance à ses collaborateurs dès leur arrivée, Sophie Matan a mis en place un coaching. Chaque « petit nouveau » (la titulaire emploie six apprentis) reçoit une liste de choses à savoir dans le cadre d’un programme d’intégration : des commandes à la prise en main du site web, en passant par les écogestes. De plus, l’officine, membre du groupement Pharmacorp très mobilisé sur la certification Iso 9001 QMS Pharma, s’appuie sur des protocoles de qualité et chaque membre de l’équipe peut retrouver toutes les procédures rédigées. Dans le même esprit de bien-être au travail, Thomas Avril a fondé son management sur la confiance et chaque membre de l’équipe a toute autonomie dans ses missions (responsabilité d’un rayon, choix des marques à référencer…). « L’objectif est que cela fasse grandir la personne et serve l’entreprise », résume celui qui encourage ses salariés à la mobilité douce (l’officine a acheté un vélo à assistance électrique pour une des collaboratrices). Pour aller encore plus loin, toute l’équipe a été invitée fin septembre à suivre pendant trois heures, sur le temps de travail, une formation en visioconférence « Fresque du climat », pour sensibiliser aux conséquences des changements climatiques et enclencher une discussion collective sur les leviers d’action. « L’idée étant d’essayer de trouver des solutions ensemble. Mais, attention, je ne mets pas la performance économique à part. Elle est indispensable, car si mon entreprise ne perdure pas, mes employés se retrouvent sur le carreau », conclut Thomas Avril. Tout est donc lié.
* Arrêté du 15 février 2002 fixant la liste des marchandises dont les pharmaciens peuvent faire le commerce dans leur officine.
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