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« Le choix du Made in France ne s’appuie pas sur le coût, mais sur la réactivité, la performance et l’impact environnemental du produit »
Le collectif Façon de faire, qui réunit des acteurs de l’industrie textile, demande que la mesure prévoyant le remboursement par l’Assurance maladie des culottes menstruelles et des protections hygiéniques réutilisables soit appliquée aux seuls produits fabriqués en France.
PM Comment est né le collectif Façon de faire ?
MB Lors de la crise du Covid, la France a eu besoin de masques. L’industrie textile s’est unie pour en élaborer aux normes. Résultat : 400 millions de masques et 20 millions de blouses ont été fabriqués en quelques mois. Aujourd’hui, ce collectif veut rendre possible tout projet textile Made in France ; nous recherchons du volume et de la production. Il est composé de 180 industriels qui représentent 10 000 emplois. Quand un projet se présente, nous le partageons pour trouver les entreprises capables de produire dans les temps.
PM Pourquoi avoir publié une tribune en mai dernier et que demandez-vous au gouvernement ?
MB Tout est parti de l’annonce par la Première ministre Élisabeth Borne, le 6 mars 2023, du remboursement des culottes menstruelles et autres protections périodiques réutilisables par l’Assurance maladie. Cette mesure, qui n’est pas encore entrée en vigueur, vise les femmes de 14 à 25 ans, souvent les plus précaires, et sera conditionnée à un achat en pharmacie. Notre tribune de 85 signataires a pour objectif de demander qu’elle soit appliquée aux produits fabriqués en France.
PM Aujourd’hui, où sont fabriquées les culottes menstruelles ?
MB La France est le premier pays à avoir développé les culottes menstruelles en Europe. L’entreprise Lemahieu a été précurseur avec les Digital Native Vertical Brands pour lesquelles elle produisait et innovait. Puis la grande distribution a investi le marché… En 2018, 90 % des produits étaient Made in France. En 2023, c’est l’inverse : 90 % des produits sont fabriqués à l’étranger !
PM Que changerait une régulation ?
MB La culotte menstruelle est utilisée en moyenne entre trois et cinq ans. Son prix de vente est de 25 à 35 euros, selon les finitions et le lieu de fabrication.
Aujourd’hui, c’est la prime aux sociétés qui dégagent le plus de marges et qui investissent dans la publicité sur Google ou Amazon. Les marques françaises doivent s’aligner sur leurs prix de vente. Peu à peu, les prix chutant, elles s’étouffent. Si l’État pose un cadre, la régulation profitera à celles fabriquant localement et elles pourront réinvestir en recherche et développement. Nous estimons qu’avec la prise en charge de l’Assurance maladie, l’augmentation du marché avoisinerait les 10 millions de culottes menstruelles en 2024. C’est le contribuable qui les rembourse, si son argent profite aux marques locales, cela participe à la lutte contre le chômage.
PM Mais quels pourraient être les critères appliqués ?
MB Certains ont déjà arrêté leur activité face à la concurrence étrangère. Pourtant, la culotte menstruelle se vend de plus en plus et il existe plus d’une centaine de marques en France. C’est un produit technique et de santé dont la TVA est à 5,5 % et que la cliente trouve partout. Le gouvernement est sensibilisé aux enjeux de souveraineté, d’indépendance et de baisse de l’empreinte carbone. Nous disons juste « aidez-nous à mettre une régulation sur les culottes menstruelles comme il y a eu un bonus/malus sur l’automobile électrique » ! Analyse du cycle de vie à l’appui, un culotte Lemahieu émet 72 % de CO2 en moins qu’un produit similaire venu d’Asie. À partir d’un cahier des charges précis, l’État pourrait fixer un seuil limite, telle une empreinte carbone inférieure à 3,5 kg de CO2 par culotte.
PM Quand est prévue la mise en application du remboursement de ces produits en pharmacie ?
MB C’est annoncé pour janvier 2024. Le Comité de normalisation, chargé de définir un cahier des charges, est en train d’être constitué. En France, nous avons la chance de pouvoir produire avec de l’énergie renouvelable, et l’impact environnemental sur le tissage, la teinture, le process industriel est moindre. Le gouvernement veut faire grimper la part de l’industrie (de 10 % actuellement) à 15 % de la richesse nationale. Or, seulement 3 % du textile acheté en France y est fabriqué et de nombreux acteurs souhaitent relocaliser la production. Nous avons été reçus le 28 août par le cabinet du ministre délégué chargé de l’Industrie et celui du ministre de la Santé. Nous attendons que ce dernier revienne vers nous. Nous avons les capacités de produire. Pour les masques, beaucoup d’ateliers d’insertion ont été montés, l’hygiène féminine avec des produits réutilisables fabriqués localement pourrait être un relais de production. Cela doit être vertueux pour permettre à l’État de moins s’endetter.
PM Les marques françaises sont-elles très présentes en pharmacie ?
MB Elles y sont peu distribuées. C’est difficile pour elles car il faut être initié pour travailler avec les répartiteurs et les grossistes. En parallèle, on doit aussi pousser les pharmaciens à valoriser davantage les produits français.
PM Quelles sont vos solutions pour améliorer l’offre Made in France ?
MB Pour les officines, acheter local permet de s’engager sur des quantités moindres et de profiter d’un réassort plus régulier. Le choix du Made in France ne s’appuie pas sur le coût mais sur la réactivité, la performance et l’impact environnemental du produit. Une communication commune est la clé du succès. La consommatrice qui achète plus cher a besoin d’être rassurée. Pour ce faire, nous pouvons ouvrir davantage nos usines au public et faire savoir, par exemple, qu’il faut 10 personnes pour fabriquer une culotte menstruelle.
BIO EXPRESS
2002
Master HEC Entrepreneurs.
2004
Directeur d’un bureau d’achats en Chine pour une société de textile.
2018
Il reprend l’entreprise Lemahieu avec Loïc Baert.
2020
Création de l’association Savoir faire ensemble (future Façon de faire), avec Guillaume Gibault, président du Slip français.
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