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Prendre des pourparlers pour argent comptant
Dans un contexte d’emploi tendu, une promesse d’embauche peut être sécurisante tant pour le salarié que pour le titulaire. En pratique, la distinguer de pourparlers n’est pas si simple.
LES FAITS
Le 18 décembre 2014, la société G adresse à Mme E. un projet de contrat de travail indiquant le salaire proposé, la nature de l’emploi, la date d’entrée en poste et un avenant relatif à la part variable de la rémunération. Le 23 décembre, Mme E. renvoie le projet de contrat avec quelques modifications mineures, sans avoir signé l’avenant. La société G fait ensuite machine arrière. Mme E. estime que les documents envoyés étaient une promesse d’embauche engageante pour la société G. Elle saisit donc la justice.
LE DÉBAT
Lors de la négociation du contrat, deux étapes sont à distinguer : les pourparlers et la promesse unilatérale d’embauche. Les pourparlers sont une série d’échanges écrits ou oraux entre les parties à un contrat. Les conditions du futur contrat sont débattues librement, sans que les parties soient engagées. Une fois que les parties sont d’accord sur les conditions essentielles du futur contrat, l’une d’elles peut formuler une promesse unilatérale par laquelle elle s’engage dans le contrat pendant un certain délai. A charge pour l’autre de l’accepter ou de le refuser.
Mme E. demande aux magistrats d’appliquer la jurisprudence classique qui considère que « lorsque l’employeur accorde à un candidat le droit d’opter pour la conclusion d’un contrat de travail, dont l’emploi, la rémunération et la date d’entrée en fonction sont déterminés, il émet une promesse unilatérale de contrat de travail ». Dans ce cas, la formation du contrat ne dépend que de l’accord du salarié. La révocation de la promesse de l’employeur n’empêche pas la formation du contrat de travail promis. Selon elle, l’employeur s’était engagé à l’embaucher puisque le contrat envoyé précisait l’emploi, sa rémunération et sa date de prise de poste. Il ne pouvait pas revenir sur son engagement sans être condamné pour rupture abusive du contrat de travail.
La cour d’appel de Paris, le 9 septembre 2020, donne raison à Mme E. Les magistrats considèrent que ces éléments pouvaient être qualifiés de promesse d’embauche. Elle condamne la société G à verser une indemnité compensatrice de préavis, de congés payés et de dommages-intérêts pour rupture abusive. La société G forme un pourvoi en cassation.
LA DÉCISION
Le 13 avril 2022, la Cour de cassation casse et annule la décision de la cour d’appel. Les magistrats rappellent qu’il ne peut pas y avoir une promesse d’embauche alors que des pourparlers sont toujours en cours. Or, il s’avère que les parties n’étaient pas d’accord sur le calcul de la part variable de la rémunération fixée dans un avenant. La rémunération de la salariée n’était donc pas déterminée dans la promesse d’embauche qui doit dès lors être considérée comme des pourparlers. La société G pouvait donc rompre les négociations sans conséquence.
Source : Cass. Soc., 13 avril 2022, n° 20-22.454.
À RETENIR
Lorsque l’employeur accorde à un candidat le droit d’opter pour la conclusion d’un contrat de travail dont l’emploi, la rémunération et la date d’entrée en fonction sont déterminés, il y a promesse d’embauche.
Pendant le délai de réflexion laissé au candidat pour l’accepter ou non, l’employeur est engagé, il ne peut pas revenir sur le principe de l’embauche.
Si, pendant le délai de réflexion, les parties poursuivent leur négociation sur un aspect de la rémunération du salarié, alors il n’y a pas promesse d’embauche.
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