Recrutement Réservé aux abonnés

« La pénurie ne se décrète pas »

Publié le 13 juillet 2002
Mettre en favori

Un an après la première élection d’un adjoint d’officine à la tête de la section D de l’Ordre, Jérôme Paresys-Barbier, son président, nous livre sa réflexion sur ses principaux dossiers et lance un appel afin de recruter des correspondants régionaux.

« Le Moniteur » : Il y a un an, une de vos priorités était « de rehausser la crédibilité de l’Ordre vis-à-vis des adjoints d’officine et de rétablir le dialogue »…

Jérôme Paresys-Barbier : Cela a été le but de réunions organisées depuis neuf mois avec les assistants à Lyon, Nancy, Paris, Lille, Montpellier, où nous avons été directement confrontés à leurs questions et préoccupations. Nous continuerons ce tour de France d’ici fin 2002 à Toulouse, Nantes et Strasbourg. C’est nécessaire car ils ont bien souvent la sensation de ne pas comprendre pourquoi ils cotisent à l’Ordre, de ne pas être écoutés. Aujourd’hui, je lance un appel à tous les adjoints : dans l’optique d’une future régionalisation et afin de mieux répondre aux attentes de tous les adjoints, des établissements de soins et mutualistes, la section D recherche des correspondants régionaux*.

La prochaine étape sera d’arriver à construire le profil de la nouvelle carrière de l’adjoint. Les assistants doivent faire un choix : soit être payés comme ils le sont – c’est-à-dire anormalement -, soit aller vers d’autres rémunérations mais devenir de véritables adjoints. Encore que, à travers ces journées, j’ai acquis le sentiment que le salaire n’est pas leur préoccupation numéro un. C’était plutôt retrouver une dignité, un statut. C’est pourquoi je dis aussi aux adjoints : bougez-vous, faites des propositions à vos titulaires. Il y aura un déclic à un moment.

Quelle sera votre première action concrète après ce tour de France ?

Nous avons besoin d’un maximum de retours pour la grande enquête concernant la pénurie que nous espérons lancer d’ici la fin de l’année auprès des titulaires, adjoints et étudiants, en collaboration avec la section A si elle accepte. Ceci pour connaître finement les réels besoins selon les endroits et les motivations de chacun vis-à-vis de l’officine. La pénurie ne se décrète pas, elle dépend des localisations géographiques. Il y a effectivement des départements où il est difficile d’attirer des adjoints. Mais je ne suis pas d’accord avec l’analyse conduisant à demander un numerus clausus à 3 000. Ma crainte, c’est qu’avec une multiplication du nombre d’adjoints, on aboutisse à une dévalorisation de leur situation. Nous ne sommes pas dupes, nombre de titulaires doivent se dire que plus il y en aura, moins on les paiera. En tout cas, j’espère qu’à Pharmagora 2003, nous aurons du concret à vous donner et que nous n’aurons pas été barrés sur les dossiers que nous souhaitons lancer.

Publicité

Vous vous déclarez favorable à une réforme de l’Ordre ?

Les textes de 1945 régissant l’Ordre ne correspondent plus à la réalité de la profession. De plus, le Conseil national devrait être une courroie de transmission entre les sections et les pouvoirs publics, or on a le sentiment qu’il existe souvent un hiatus entre le discours des sections et celui relayé par le Conseil national. Il faut une réforme du Code de la santé publique en ce qui nous concerne. Quant à la régionalisation de notre section, elle doit partir du bas. D’où mon appel à des candidatures de correspondants régionaux.

Quelle est votre position quant aux principaux dossiers sur lesquels l’Ordre devra statuer prochainement ?

Concernant la loi MURCEF, j’exige de participer aux discussions sur le décret d’application. Les adjoints souhaitent pouvoir entrer dans le capital des officines tout en restant salariés, car il est difficile de croire qu’un adjoint ayant 1 ou 2 % des parts aura son mot à dire… bien qu’on puisse imaginer un adjoint prendre la gérance d’une officine, quitte à acquérir peu à peu le capital de l’entreprise. Cela suppose aussi de statuer sur la définition de l’exercice libéral. Pour moi, il ne fait aucun doute que l’adjoint est un libéral, exactement comme l’est officiellement un avocat salarié.

A propos du dossier « qualité », qui me tient d’autant plus à coeur que j’ai participé à son élaboration, j’avais demandé que le questionnaire soit aussi envoyé aux adjoints. Pour des raisons budgétaires, cela n’a pas été le cas. Au final, très peu sont au courant. Normal… la moitié des documents sont passés à la poubelle, un quart a été rangé et il semble que le reste ne soit jamais arrivé… Cela étant, l’assurance qualité est l’un des dossiers qui permettra à l’adjoint d’acquérir une nouvelle dimension.

Et la clause de conscience ?

On parle beaucoup en ce moment de la pilule abortive. Il faut savoir qu’en droit, une clause de conscience ne s’exerce que vis-à-vis du patient, or le RU-486 sera fourni au médecin. Il s’agit précisément « du » cas où elle ne s’applique pas ! Cela étant, il faudra que les textes donnent aux adjoints la possibilité de faire jouer leur clause de conscience au même titre qu’un titulaire.

La formation continue obligatoire est aussi l’un des dossiers chauds à venir…

Il faut arrêter de s’accrocher au Haut Comité de formation continue, qui a rendu de grands services mais n’a plus lieu d’être. Quant à la constitution actuelle du Conseil national de la formation continue obligatoire créé par la loi sur les droits des malades et qui sera formalisé à la rentrée, nous sommes en symbiose totale avec les syndicats. Je rappelle que cette loi du 4 mars prévoit la présence de huit représentants de la section D au Conseil national de l’Ordre. Je tiens à ce que cela soit fait d’ici la fin de l’année. Cette loi, on ne peut pas la prendre quand ça vous arrange et la jeter quand elle ne vous convient pas… Nous avons cinq ans de visibilité au plan politique. Profitons-en pour faire bouger les choses. Que le pharmacien ne reste pas comme toujours celui qui a peur et qui est recroquevillé…

* Téléphone de la section D : 01 56 21 35 70.