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Réunions Achetez-vous une conduite!

Publié le 1 février 2009
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Entre la réunionite aiguë et le règne de la transmission informelle, il est nécessaire de trouver un juste milieu. L’efficacité d’une réunion n’est pas proportionnelle à la taille de l’équipe. Outil de management précieux, sa réussite tient essentiellement à sa préparation. Explications.

Effectifs réduits, temps partiels multiples, manque de temps, absence de local… Les prétextes sont nombreux pour justifier l’annulation d’une réunion voire pour décréter que son existence même est inutile, que c’est du temps perdu. L’intérêt des réunions n’est pourtant plus à prouver. Seule compte la méthode avec laquelle on les conduit, avec pour objectif leur efficacité.

La réunion, c’est pas automatique

Ce n’est pas parce que vous avez quelque chose à dire à votre équipe qu’il faut nécessairement fixer une réunion. « Tout sujet qui ne concerne que deux personnes n’en nécessite pas, explique Sylvie Lainé, consultante et coach (1). En deçà de trois personnes, c’est un entretien. » Avant de vous lancer, vérifiez la nécessité de votre réunion. Demandez-vous quel en est l’objectif. S’agit-il d’informer l’équipe, de prendre une décision, d’inciter à la réflexion ? « Si on ne sait pas répondre à cette question, précise Sylvie Lainé, et que l’on se lance tout de même, la réunion a toutes les chances d’échouer ».

Une fois que le motif est avéré, vous devez vérifier s’il n’existe pas de moyen plus efficace de traiter le sujet. Si le dialogue est nécessaire, si une décision doit être prise en commun à la suite d’une discussion collégiale, alors oui, la réunion est utile. « Attention, ajoute Sylvie Lainé, ne doivent participer à la réunion que ceux qui ont quelque chose à apporter au sujet abordé ! »

Soigner l’invitation

S’il s’agit d’une réunion régulière du type « point d’étape » dans la réalisation d’un projet, établissez un planning au semestre quitte à le modifier en dernière minute en cas de nécessité. Sinon, informez clairement chacun, de préférence par écrit, des date et heure de début et fin de la réunion. Précisez le motif en donnant les thèmes abordés. « Il est important d’inviter chacun à préparer des choses à dire, insiste René Moulinier, professeur et consultant (2). Sans quoi, tout le monde improvise et l’on perd du temps. Lorsque le sujet abordé est technique, on peut même demander à certains collaborateurs de préparer une intervention. Ainsi centrée, la réunion sera plus utile. »

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Choisir la bonne « gouvernance »

Présider une réunion n’est pas forcément la mener. « Lorsque le sujet s’y prête, on peut tout à fait envisager une animation tournante, explique Sylvie Lainé. Mais même si le titulaire demande à quelqu’un de l’équipe d’animer la réunion, il en reste le président ! C’est à lui de la diriger et de la réguler, de veiller au respect d’un principe clé : la rigueur des procédures et la liberté d’expression. » René Moulinier reconnaît que cette idée de présider sans mener peut surprendre : « Lors de la préparation de la réunion, le pharmacien doit impérativement s’interroger sur la personne la plus apte à la mener efficacement. » Pour être sûr de garder le cap, il est important de prévoir un guide d’animation. Même succinct, ce fil conducteur doit comporter les questions qui vont lancer la discussion, quelques lignes sur le ou les points de vue à défendre et le temps à consacrer à tel ou tel sujet.

Gérer les perturbations

Pour que le traitement d’un sujet en mode réunion soit efficace, il est capital, en début de séance, de rappeler le « contrat ». « Vous devez repréciser le thème qui vous rassemble, les temps consacrés aux différents sujets sans oublier de revenir sur les attitudes de chacun, explique René Moulinier. Proposez par exemple à ceux qui ne sont pas d’accord de faire des contre-propositions. Et insistez sur le fait que chacun doit écouter chaque intervenant. »

Sylvie Lainé met en garde contre la dynamique de groupe. « Un groupe n’est pas la somme des personnalités qui le composent, mais une nouvelle entité, une tribu prête à se rebeller, à chahuter. » Dans le cas où le ton monte, elle conseille de ne pas « monter sur le ring ». « Le groupe se régule de lui-même. Au bout de trois minutes, les choses commencent à se tasser et c’est à ce moment-là que le président doit intervenir en mettant fin à la polémique. Vous devez être capable de rester dans le silence le temps suffisant et d’intervenir en baissant la voix afin de favoriser le retour au calme. » Si vous constatez que la discussion sort du cadre défini, exprimez votre constat et invitez les participants à revenir au coeur du sujet. Suivant la comparaison de René Moulinier, vous devez endosser le rôle d’un « dictateur démocrate ». Par exemple, vis-à-vis des grands bavards, empruntez la manière forte. Coupez-leur la parole. « N’oubliez pas que parler, c’est expirer. Il faut donc nécessairement inspirer. Aussi, quand la personne reprend son souffle, profitez-en pour glisser un «C’est intéressant, j’aimerais bien entendre vos collègues sur le sujet» pour redistribuer la parole », conseille Sylvie Lainé. Enfin, si l’auditoire décroche, si vous vous êtes tenu à n’inviter que les intervenants utiles et donc intéressés, regardez votre montre. La capacité de mobilisation des esprits est de 90 minutes au maximum. Il est donc peut-être temps de faire une pause ou d’arrêter la réunion.

* Sylvie Lainé est l’auteur du « Guide pratique d’entraînement à la conduite de réunion » (éditions Démos).

**René Moulinier est l’auteur de « Mener une réunion efficace, le dessous des cartes d’une réunion réussie » (éditions Eyrolles).

en pratique

Les 11 erreurs à éviter

1° Arriver mal ou insuffisamment préparé : vous allez perdre votre temps et faire perdre le leur aux participants.

2° Conduire une réunion sur des thèmes préparés par vos collaborateurs : ne vous lancez pas dans l’animation, contentez-vous de présider.

3° Monopoliser la parole sans donner une chance à quiconque de donner son avis : vous allez susciter de la frustration et, à un moment ou un autre, vous allez le payer.

4° Laisser la réunion aller son petit bonhomme de chemin sans vous en occuper : soyez certain que ce chemin ne mène nulle part.

5° Vous reposer de temps en temps : conduire une réunion, c’est la conduire tout le temps. Ne lâchez pas le volant.

6° Attendre patiemment que chacun ait terminé tout ce qu’il avait à dire avant de passer la parole à un autre participant.

7° Réagir de façon acerbe et polémique à des remarques ou des critiques émises à votre encontre par des participants.

8° Vous croire obligé de faire de l’humour si cela ne fait pas partie de votre registre.

9° Polémiquer avec un participant : c’est de toute façon à vous que le groupe donnera tort.

10° Faire preuve de rancune envers ceux qui marquent un désaccord avec certains de vos propos.

11° Lever la séance avec une heure de retard, voire un quart d’heure.

Extrait du « Guide pratique d’entraînement à la conduite de réunion », Sylvie Lainé, éditions Démos.