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Le « care », un management qui vous veut du bien
Le care management ou encore management par le care est une pratique qui revient à « prendre soin » d’un public. Si cette approche n’est pas complètement nouvelle et a été introduite aux États-Unis dans les années 80, par Carol Gilligan, psychologue et philosophe, fondatrice de l’éthique du care, elle est montée en puissance avec la pandémie de Covid-19, parenthèse durant laquelle le care a été poussé au premier plan. Ce type de management est devenu « incontournable, dans une société où tout s’accélère et se transforme, pour donner au salarié la responsabilité de transformer son travail en vue de lui apporter une valeur ajoutée et de diminuer son stress », estime Cécile Dejoux, professeure des universités au Cnam, conférencière et conceptrice de moocs (cours en ligne)*. L’objectif : lui permettre de gagner en bien-être et lui redonner autonomie et pouvoir d’agir.
Garant d’une performance durable
Car l’entreprise est devenue un lieu sous haute tension : « Les salariés sont soumis à des process et des mises sous contrôle de plus en plus écrasants ; leur marge d’autonomie a tendance à se réduire », relève Benoît Meyronin, DG de Korus Consulting, professeur à Grenoble École Management et coauteur de l’ouvrage Replacer l’humain au cœur de l’entreprise (Éd. Vuibert). Pour motiver ceux qui se désengagent et exécutent leur travail de manière strictement minimale, (un phénomène nommé « Quiet quitting ») ou retenir ceux qui n’hésitent plus à quitter leur emploi (dont la génération Z, prompte à sauter d’un job à un autre), le management par le care pourrait bien constituer une solution. Car « dans la majorité des cas, les salariés ne quittent pas leur job mais leur manager », fait remarquer Cécile Dejoux. Et, faut-il le rappeler, réussir à garder ses salariés est « une économie d’énergie, de temps et d’argent », souligne Benoît Meyronin. Loin d’une vision naïve, voire « bisounours », le care management serait même synonyme de performance durable, ce que suggère une étude de 2011 (Effects of Positive Practices on Organizational Effectiveness, de Kim Cameron et Carlos Mora) : des salariés heureux sont deux fois moins malades, 31 % sont plus productifs et 55 %, plus créatifs. Incidemment, cette approche vertueuse alimente la marque employeur qui gagnera en aura et en buzz…
Une approche « one to one »
Ce management, qui dépasse la simple bienveillance – à ne pas confondre avec l’empathie, la compassion, le coaching ou le feed-back – est une nouvelle façon de travailler qui redonne sa place au bien-être et à l’épanouissement de chaque salarié, approché de façon individuelle. Il n’est donc plus question d’avoir recours à un management collaboratif, reposant sur l’intelligence collective car « tout va trop vite, les collaborateurs sont stressés, en souffrance », intime Cécile Dejoux. L’enjeu : « Mettre en place une relation individualisée avec chaque collaborateur, en prenant en compte ses différences, ses fragilités, sa singularité, son talent », poursuit-elle. « Le rapport au travail a profondément changé ; il repose désormais sur une réciprocité, un engagement mutuel du salarié et de son employeur », renchérit Benoît Meyronin. Cela passe, bien évidemment, par une plus grande écoute, épine dorsale du care management. Pas toujours simple à mettre en œuvre quand tout le monde court après le temps… « Les managers ne prennent plus le temps d’écouter ce que leurs collaborateurs ont à remonter de leur expérience terrain. Or, ces données sont très précieuses et contribuent à améliorer l’expérience client », observe-t-il.
Les jeunes titulaires, fers de lance du ?
Une question de générations ? En officine, « les jeunes titulaires sont plus sensibles à cette dimension d’écoute qu’ils vont sacraliser en planifiant des rendez-vous réguliers (mensuels, trimestriels…) avec les membres de leur équipe », observe Thibault Winka, directeur général de la plateforme de recrutement Team Officine. « Ces temps dédiés permettent, notamment, de parler de soi, de ses ressentis, de ses besoins, de détecter de potentielles difficultés et de débloquer des situations mais aussi de faire émerger de nouvelles idées », développe-t-il.
Un point de vue partagé par Sophie Gillardeau, consultante : « Les jeunes pharmaciens émettent la volonté de se former à de nouveaux types de management et de faire attention à leur équipe parce qu’ils se rendent compte qu’une équipe épanouie est bien plus performante au comptoir. » Dans cette optique d’écoute et de partage des expériences, Team Officine a, d’ailleurs, récemment lancé son application « Dispatch », au service des pharmaciens : « C’est un outil d’audit organisationnel qui vise à optimiser la répartition des tâches dans l’officine en incluant les membres de l’équipe dans la réflexion », résume Thibault Winka.
Le pari de la confiance
Consubstantiel à ces temps d’échange : un solide climat de confiance. Mais, « la confiance ne se décrète pas, souligne Benoît Meyronin. Le collaborateur doit ressentir une confiance qui l’autorise à donner son point de vue, à poser toutes sortes de questions, et, plus largement, à oser prendre des initiatives, en se sentant protégé. » La reconnaissance est une autre dimension à ne pas négliger, attendue des employés : « Elle passe non seulement par une juste rémunération mais aussi par des félicitations, des messages du type “bravo, tu as bien géré tel problème au comptoir”… » Il s’agira également de « reconnaître le rôle de chaque collaborateur au sein de l’équipe – et de l’entreprise – et ses contributions à un projet collectif », ajoute Cécile Dejoux ; un projet collectif qui devra, d’ailleurs, dépasser la seule mission de l’entreprise, pour répondre à la recherche de sens des collaborateurs. Et de mettre en place des routines de travail, coconstruites par le groupe, spécifiques de la culture de l’entreprise, qui aideront à maintenir et resserrer le lien. « Le care management, c’est une culture de management positif qui permet de reprendre le pouvoir sur le temps, de redonner du sens au travail et d’obtenir un meilleur engagement des collaborateurs », conclut Cécile Dejoux.
* Mooc « Care Management pour soi et ses équipes » sur le site fun-mooc.fr
La vente est une conséquence du care
« La pharmacie est un huis clos et le climat qui y règne peut être préjudiciable au comptoir. C’est un cercle vertueux : des collaborateurs heureux dans leur job, épanouis et disponibles, ça se ressent. Et quand l’accueil est plus froid, ça ne donne pas envie de revenir », pointe Thibault Winka. Le management par le care est un management « gagnant-gagnant » qui pourrait s’articuler ainsi, selon Benoît Meyronin : « S’attacher à prendre soin de ses collaborateurs pour qu’ils prennent soin des clients. » Une équation qu’il rattache à ce qu’il nomme la « symétrie des attentions », selon laquelle la qualité d’une relation entre un employeur et ses salariés influence de manière importante celle qu’il entretient avec ses clients ainsi que leur satisfaction. Ne nous y trompons pas : « La relation avec la clientèle n’est pas la cerise sur le gâteau, qui viendrait s’ajouter à l’acte de vente. C’est l’inverse : la vente est une conséquence de cette relation et, ipso facto, du care », estime Benoît Meyronin.
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