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La première année commune nuit à la filière pharma

Publié le 23 novembre 2013
Par Loan Tranthimy
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La première année commune de santé est un entonnoir où s’engouffrent des étudiants qui choisissent par défaut la pharmacie. » Victorien Brion sait de quoi il parle. Nouvellement élu à la tête du bureau de l’Association nationale des étudiants en pharmacie de France (ANEPF), cet étudiant de cinquièmeannée ne cache pas son inquiétude. Une enquête nationale menée par l’ANEPF en juin-juillet 2013 sur un panel de 2 600 étudiants de 2e et 3e années de pharmacie révèle que la généralisation de la PACES (première année commune aux études de santé) en 2010 ne profite pas à cette discipline. Au contraire !

Choix par défaut et manque d’informations

Pour 37 % des étudiants interrogés, le choix de la filière est fait par défaut en première année. Parmi eux, près des trois quarts ont échoué au concours de médecine. Autre constat : 11 % des étudiants en 2e année souhaitent quitter la filière en choisissant une passerelle. Or cette passerelle, souvent prise d’assaut à sens unique (pharmacie vers médecine), est sélective, laissant passer seulement un nombre restreint d’étudiants. « La régulation démographique des pharmaciens est dépendante du numerus clausus à l’issue de la première année. Si 11 % des étudiants souhaitent quitter les études, il y a une perte sèche de futurs pharmaciens non négligeable », note l’étude.

Quant à l’enseignement délivré lors de la PACES, deux tiers des étudiants estiment qu’il ne fournit pas les bases nécessaires pour poursuivre leurs études de pharmacie.

Ce choix par défaut s’explique également par un manque d’information des étudiants sur la filière. L’enquête montre en effet que près de quatre étudiants sur dix méconnaissent les différents débouchés possibles après les études de pharmacie, hormis les métiers de l’officine. Et près de neuf étudiants sur dix estiment n’avoir pas reçu suffisamment d’informations sur la filière, des renseignements qui devraient être délivrés au lycée, entre la première et la terminale pour la majorité des jeunes interrogés.

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L’Ordre prêt à participer à des discussions

En dévoilant cette enquête, l’ANEPF veut tirer le signal d’alarme. « Même si le fond de la réforme de la PACES est bon, c’est-à-dire le décloisonnement des disciplines, elle n’est pas adaptée à la filière pharma. On ne peut pas aller plus loin dans la mise en commun précoce des enseignements car nous sommes une filière qui a une spécificité importante », explique Victorien Brion. Pour celui-ci, « cette réforme encourage les stratégies de choix des étudiants aux dépens de la motivation et de l’intérêt pour la discipline ».

Depuis la loi pour l’enseignement supérieur et la recherche de juillet 2013, de nouvelles expérimentations sont envisagées dès 2014 et 2015 pour réformer cette première année. « Nous serons très vigilants quant aux retombées de ces expérimentations pour la filière pharma », prévient Victoire Brion.

Quant à l’Ordre des pharmaciens, très réservé depuis la mise en place de la PACES, il se dit prêt à accompagner les discussions pour revoir cette première année. Jérôme Paresys, président de la section D, plaide notamment pour la création de stages communs pour les étudiants des différentes filières en fin de leur cursus. En attendant, l’ANEPF œuvre avec l’instance ordinale et d’autres acteurs de la formation initiale pour mieux sensibiliser les jeunes sur les différents débouchés de la filière pharma.

Retrouvez l’intégralité de la contribution de l’ANEPF en suivant ce lien : http://bit.ly/18OYsL5