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Gros substitueurs : « Pas normal de payer pour tout le monde »
Solidarité professionnelle ? Les « gros substitueurs » que nous avons interrogés analysent prudemment le comportement du marché et celui de leurs confrères à la traîne.
Pour Christophe Cros, cotitulaire à Roujan, qui en est à 71 % de substitution hors TFR, tout est « affaire de motivation ». Pas question cependant de tirer à boulets rouges sur des confrères petits substitueurs « du fait de leur environnement concurrentiel ou par solution de facilité », même si, dans ce cas-là, « ils ne remplissent pas leur rôle de conseil ». « C’est une bataille permanente, livre Dominique Couderc, titulaire à Thiézac, bourg du Cantal. Et ce n’est pas anodin, il faut être très attentif ! » Isabelle Glomot, titulaire à Razès, situé à un quart d’heure de Limoges, et qui réalise 70 % de substitution, considère que « Bien que ce soit une source d’erreurs, c’est un plus au plan intellectuel et un travail d’équipe ; il faut accepter de se compliquer la vie ».
Un point de marge supplémentaire.
Pour Alain Le Coz, l’un des principaux substitueurs de la région nantaise (à 88 %), il s’agit également de motiver l’équipe. La sienne bénéficie d’une prime en fonction du CA réalisé. Nadine Alloing-Stas, à Maubeuge (en 4e position pour la substitution dans l’Avesnois), relance aussi régulièrement ses salariés par e-mail : « Pensez au générique. » Henri Mendelsohn, titulaire à Mallemort (Bouches-du-Rhône), a quant à lui formé son personnel aux techniques de vente afin de devenir le meilleur substitueur de la zone : « Nous nous positionnons comme professionnels du médicament et nos clients nous font confiance… même si, au départ, certains sont partis. » La motivation de l’équipe ? « ça fonctionne !, conclut Alain Le Coz. Pour moi, la substitution représente 1 % de marge supplémentaire. »
Mais la motivation financière suffit-elle ? Mme Dupuy (banlieue toulousaine), recordman des délivrances génériques en Haute-Garonne (88 %), est partagée : « Le générique m’est apparu comme un moyen de recentrer la profession sur le médicament. Là, c’est la confusion. Mes efforts ne sont pas reconnus et l’intérêt économique de la substitution est de moins en moins évident. Celui qui fait montre de déontologie aujourd’hui c’est le mauvais. A être trop en avance, j’ai perdu des clients… Mais je crois au système de santé français et je travaille pour le sauvegarder. Tous n’agissent pas dans ce sens ! »
« La notion de confiance joue beaucoup. »
Sophie Dillies, pharmacienne à Bavay (Nord), continuera aussi, persuadée que l’enjeu de la réduction des coûts et d’une meilleure dispensation est primordial : « Au début, ça a été difficile, nous étions précurseurs. Il a fallu trouver la bonne formulation. On pourrait penser qu’avec certaines affections, comme le cancer, la substitution serait plus difficile. Ce n’est pas le cas quand elle est bien présentée. La notion de confiance joue beaucoup… »
La motivation de Nadine Alloing-Stas n’est pas non plus entamée malgré un transfert récent en centre commercial. Elle jette d’ailleurs un regard iconoclaste sur le TFR : « Heureusement qu’il y en a un peu. Le TFR pousse à accepter le générique quand le labo ne s’aligne pas. Ce n’est pas la panacée, mais le résultat est là : les prix ont baissé. » La vision de Philippe Bon (Vic-le-Comte, dans la couronne clermontoise) est tout autre. Il estime que la substitution garde une marge de progression, mais que l’obstacle majeur est… le TFR, « réellement contre-productif, après tout le temps passé à expliquer que le générique était aussi efficace et moins cher… ». Philippe Bilgraer exerce à Neuilly-sur-Seine, mauvaise élève des Hauts-de-Seine. Lui s’en sort bien avec un taux de génériques à 60 %. Face aux clients, la clé est de « redonner confiance, rendre une autorité au pharmacien », affirme-t-il. Mais la réussite du générique tient à l’incitation financière : « L’indépendance du pharmacien passe par sa sécurité financière. S’il y a un coût de la santé c’est qu’il y a un marché de la santé, donc un jeu économique. Il y a deux possibilités : étatisation ou libéralisme. On ne peut avoir de libéralisme contrôlé. »
Pourquoi pas des pénalités individuelles ?
« Oui, approuve Christophe Cros. Car, avec les TFR, ce n’est pas normal de payer pour tout le monde. » Claude Canal, de Murat (Cantal) n’y est pas non plus opposé, « maintenant que le générique est en place à peu près partout… ». Mais tous deux préconisent que la Sécu s’entretienne d’abord avec les faibles substitueurs. Elisabeth Cussac, installée à Aurillac (Cantal), nuance : « Mais il faudrait pouvoir faire apparaître les cas où le patient refuse. » Henri Mendelsohn s’y dit favorable à condition que ces pénalités soient équitables et ne visent pas que le pharmacien : « Alors oui, il pourrait y avoir un score à réaliser par officine. Il faudrait aussi étudier le cas des pharmacies de centre commercial où la pédagogie est difficile. » Philippe Bon le concède : « ça m’arrangerait qu’on pénalise les mauvais substitueurs, mais c’est à double tranchant ; il ne faut pas accabler les confrères des grandes villes. Bien sûr, ceux qui font de l’obstruction systématique le mériteraient… mais ça ne supprimerait pas les TFR ! »
En revanche, d’autres ne veulent pas en entendre parler. « Il n’appartient pas aux pharmaciens de décider de normes vis-à-vis de leurs confrères, qui peuvent avoir de bonnes raisons de ne pas substituer, juge Alain Coz. En revanche, il est de la responsabilité des CPAM de faire pression auprès des prescripteurs ne jouant pas le jeu. » Nadine Alloing-Stas se veut fataliste. Certes, « au nom du libéralisme, certains font ce qu’ils veulent… Des écarts de 20 points ne sont pas logiques ! Mais je ne pense pas qu’il faille des pénalités. Pour ceux très en dessous de la moyenne, tout dépend de la clientèle. Et puis, soit on reconnaît la position libérale du pharmacien, soit on ne la reconnaît pas ».
Ces substitueurs actifs convaincront-ils leurs confrères ? Possible… Claude Canal reconnaît n’avoir pas fait beaucoup d’efforts au début : « J’étais réticent par rapport aux caisses. Je m’y suis mis quand les médecins ont été stimulés par les DC. Maintenant ça marche très bien. »
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