Carrière Réservé aux abonnés

Faut-il mieux préparer les préparateurs ?

Publié le 15 novembre 2008
Mettre en favori

Obsolète, inadapté, voie de garage… Le diplôme de préparateur fait l’unanimité contre lui et doit donc être rénové. Simple dépoussiérage ? Réforme de fond ? La formule de la future formation est loin d’être au point car une question essentielle demeure : un diplôme, oui, mais pour quoi faire ?

Des préparations en chute libre, une formation inadaptée aux besoins des officines, des apprentis qui se font plus rares (- 12 % entre 2007 et 2008*), un recrutement au niveau bac pour une grande majorité (86 %) des quelque 10 000 apprentis en formation en 2008… C’est dans ce contexte que la Commission paritaire nationale de l’emploi de la pharmacie d’officine (CPNE-PO) a réclamé une remise à plat du BP de préparateur. En février dernier, elle écrivait à la ministre de la Santé : « Les activités professionnelles définies dans le référentiel de 1997 du BP de préparateur en pharmacie ne sont plus adaptées au métier […]. En conséquence, elle souhaite qu’un nouveau référentiel soit mis en chantier. » Son président actuel, Patrick Le Métayer (Force ouvrière), se bat pour un niveau diplôme depuis le début des années 2000 : « Le BP est une voie de garage sans passerelle dans laquelle s’engouffre une majorité de bacheliers qui sortiront avec un diplôme de niveau IV équivalent à celui du bac. »

Si c’est bien l’Education nationale qui gère le BP via la 20e Commission consultative professionnelle (CPC), la CPNE-PO sollicite le ministère de la Santé car elle a besoin de son feu vert et de ses suggestions pour commencer les travaux (voir l’interview p. 42) et définir les référentiels de cette activité encadrée par le Code de la santé publique (CSP).

« Adapter le métier au plus près des réalités »

Sur le terrain, plus de 4 titulaires sur 10 et autant de préparateurs considèrent que la formation initiale est inadaptée, selon un sondage Direct Medica-Le Moniteur des pharmacies. « On doit adapter le métier au plus près des réalités de l’activité officinale comme la délivrance », soutient Francis Liaigre, préparateur et créateur du site Pharméchange. Car le préparateur occupe désormais une place très importante au comptoir, aux côtés du pharmacien (prise en charge complexe de patients chroniques, sorties de la réserve hospitalière, gestion plus fine du back-office ou spécialisations…). Et l’accueil du patient, la délivrance et le conseil font partie intégrante de son métier. Mais pas forcément de sa formation !

Tout savoir de la reproduction des ptéridophytes, apprendre par coeur les méthodes analytiques en biochimie ou connaître les secrets des comprimés ou des potions a-t-il encore sa place dans le programme des élèves du BP ? « La part dévolue à la préparation à l’officine a diminué, ce n’est pas pour autant qu’il faut la supprimer car elle est un élément important de méthodologie et d’apprentissage », juge Philippe Gaertner, président de la Fédération. Pour Claude Japhet, qui préside l’UNPF, on peut encore largement élaguer : « En dix heures de cours, on peut avoir fait le tour des préparations réalisées à l’officine aujourd’hui. »

Mais pour apprendre quoi à la place ? Toujours selon notre sondage, les officinaux interrogés veulent surtout plus de pharmacologie et de cours sur les pathologies pour leurs futurs collaborateurs, mais demandent aussi de « muscler » le conseil hors ordonnance et la prévention. Les préparateurs rejoignent les titulaires sur les deux premiers souhaits mais aimeraient également être mieux rodés aux techniques de communication. Problème : comment inclure un surplus de cours dans un programme déjà surchargé (800 heures) et qui ne dure que deux petites années.

Brigitte Trocmé, adjointe au chef du bureau des commissions professionnelles consultatives et du partenariat avec le monde professionnel au ministère de l’Education nationale, est chargée de coordonner le travail des CPC. Elle connaît donc bien les diplômes professionnels (CAP, BTS ou BP). « Quand on se penche sur les contenus et notamment les savoirs du référentiel, le BP de préparateur en pharmacie est classé au niveau IV de la nomenclature des niveaux de formation, indique-t-elle. Tout le monde s’accorde à reconnaître que c’est un niveau IV très ambitieux. » Les caractéristiques scolaires ont aussi évolué ces dernières années. « Un nombre croissant d’étudiants ayant échoué en première année d’université prépare le BP », poursuit Brigitte Trocmé. Ils représentent 5 % des 86 % de bacheliers inscrits en première année. Les autres y accèdent avec un BEP Carrières sanitaires et sociales.

Autre sujet de préoccupation : la formation de préparateur est trop « CFA-dépendante ». « Sans crier haro sur quiconque, nous avons constaté que la formation des préparateurs est très disparate d’une région à une autre, allant parfois jusqu’à une inadéquation de la fonction par rapport à la formation », déplore Jean-Charles Tellier, président de la section A de l’Ordre.

Publicité

Faut-il supprimer le « contrôle effectif » ?

Puisque tous les acteurs de la pharmacie réclament la révision du BP, il suffirait maintenant d’avoir l’aval du ministère de la Santé pour que l’Education nationale planche sur un nouveau référentiel. Pas si simple. « Nous ne sommes qu’un des maillons de la chaîne, précise Brigitte Trocmé. Nous arriverons à faire bouger le diplôme de préparateur seulement lorsque les partenaires sociaux, employeurs et salariés, se seront mis d’accord. » En effet, malgré une volonté commune, la branche affiche encore des divergences de taille sur les modifications à apporter, mais aussi sur la suppression – ou non – du contrôle effectif par un pharmacien !

Patrick Le Métayer et Jean-Paul Provost, vice-président de la CPNE-PO et membre de l’UNPF, ont en effet demandé à la conseillère technique de Roselyne Bachelot la suppression du mot « effectif » dans l’article L. 4241-1 du CSP. Ce dernier prévoit que les préparateurs « sont seuls autorisés à seconder le titulaire de l’officine et les pharmaciens qui l’assistent dans la préparation et la délivrance au public des médicaments […]. Ils assument leurs tâches sous la responsabilité et le contrôle effectif d’un pharmacien. Leur responsabilité pénale demeure engagée ». « Nous voulons officialiser ce qui se passe officieusement », soutient Christelle Degrelle, préparatrice et représentant de la CGC à la CPNE-PO. Pour les partisans de cette modification, la mention « sous le contrôle » serait plus adéquate, à condition, cela va de soi, qu’un pharmacien soit toujours présent dans l’officine. Certains syndicats de salariés refusent même de discuter d’un nouveau diplôme tant que cette suppression n’est pas entérinée dans le CSP. « On ne peut augmenter le niveau du diplôme qu’en augmentant le niveau de responsabilité », revendique notamment Jean-Marie Fonteneau, représentant CGT à la CPNE-PO.

Cette demande fait bondir l’USPO. « Le débat sur le contrôle effectif est une erreur stratégique. Attention de ne pas ouvrir des dossiers qui risquent de nous revenir comme un boomerang, prévient Gilles Bonnefond, son président délégué. Je n’ai pas envie de voir des préparateurs chez Leclerc ! » Même son de cloche à l’Ordre. « Il me paraît prématuré et dangereux de supprimer le contrôle effectif par le pharmacien car cette liberté pourrait très bien se retourner contre ceux qui la demandent. Et, pour le coup, ils entreraient en concurrence directe avec les adjoints », appuie Jean-Charles Tellier. Encore faudrait-il que les 55 000 préparateurs deviennent des concurrents pour les 26 000 adjoints…

On le voit, ce débat sur le contrôle effectif dépasse largement la stricte question des responsabilités. « Les préparateurs doivent défendre le coeur de leur métier qu’est la dispensation. Or, les textes sont directifs et ne permettent pas de leur confier ne serait-ce qu’un renouvellement de pilule. Si les préparateurs veulent s’intégrer dans le système de santé comme des professionnels de santé, ils doivent revendiquer leurs compétences », leur conseille Claude Japhet. Avec une idée sous-jacente : parvenir à une véritable délégation de tâches du pharmacien vers le préparateur. « On voudrait que le préparateur soit plus autonome dans son exercice professionnel. Certaines tâches pourraient lui être déléguées, ne serait-ce que le renouvellement d’une ordonnance pour un patient chronique dont la première dispensation a été faite et analysée par un pharmacien », suggère Patrick Le Métayer, dont la proposition a été également envisagée par Philippe Gaertner.

Définir des tâches et des missions avant un diplôme

Pour obtenir ce profil de « superpréparateur », la formation doit encore forcément s’étoffer. Le souhait officieux des salariés, syndiqués ou non, est de s’orienter vers une licence professionnelle. De son côté, la pétition lancée par l’association Aspharcom, créée en 2005 par Francis Liaigre, revendiquait « une formation en trois ans dans un cursus « licence science de la santé », un diplôme commun pour tous les préparateurs, la création de passerelles entre les professions paramédicales »

Mais la création d’un diplôme de niveau supérieur pourrait conduire à renégocier les salaires. Ce que personne ne veut évoquer pour l’instant. « Obtenons d’abord un nouveau diplôme, après on verra », tranche Patrick Le Métayer. « Le salaire n’est pas le seul nerf de la guerre », assure Loïc Melin, préparateur et enseignant au CFA de Rennes. Les préparateurs interrogés ne souhaitent en effet ni usurper la place du pharmacien ni revendiquer son salaire. Pour la plupart, ils veulent surtout que l’on définisse leur champ d’activité et qu’on leur fabrique des passerelles vers d’éventuelles reconversions.

« Le préparateur ne peut avancer si le pharmacien n’avance pas »

Le premier chantier à ouvrir est celui de la « définition de tâches propres au préparateur », estime Loïc Melin. C’est pour cela qu’on doit « d’abord écrire le référentiel métier, ensuite y adosser un référentiel de formation pour enfin arriver à la détermination d’un niveau de diplôme », argumente Philippe Gaertner. Comme pour tout diplôme. « La question à se poser est : quels sont les contours de l’activité du préparateur en pharmacie aujourd’hui ? », insiste Brigitte Trocmé. Une question primordiale pour Claude Japhet, lequel « se refuse à discuter de la rénovation du BP si derrière nous n’avons pas défini le rôle du préparateur à l’officine ».

Mais, pour ce faire, encore faut-il que le rôle du pharmacien soit lui-même mieux défini et que soit également élaboré un référentiel métier permettant « d’ajuster plus finement la formation au métier », comme on pouvait le lire dans le « Livre blanc de l’officine » paru en 2008. « Le préparateur ne peut avancer si le pharmacien n’avance pas », considère Francis Liaigre. « L’ordre des pharmaciens mène une réflexion sur l’activité du pharmacien et de son équipe », tient à faire remarquer Jean-Charles Tellier.

Puisque l’avenir du préparateur est étroitement lié à celui de la pharmacie et du pharmacien, puissent tous ces acteurs se réunir vite et se concerter, sans vision partisane ou passéiste. Depuis le « Contrat études prospectives » de 2006**, rien de tangible n’a été fait malgré les nombreuses propositions de fiches métiers pour le préparateur et le pharmacien. Et si rien ne bouge, comme en 1997, le BP devra se contenter d’un toilettage – « que nous ne voulons pas », assène Jean-Marie Fonteneau. A l’époque, « l’idée d’un BTS pour les préparateurs fut bloquée par l’Ordre en raison d’un éventuel empiétement sur le diplôme de pharmacien », rappelle Patrick Le Métayer.

Gilles Bakkaus, opiniâtre président de l’Association nationale des préparateurs en pharmacie hospitalière, estime « qu’il serait souhaitable et urgent que les préparateurs se prennent en main ». L’association a peaufiné son « Livret blanc » sur la formation du préparateur qui sera présenté dans quelques jours au ministère de la Santé. Il contient des propositions sur un tronc commun de formation, des passerelles, un diplôme en conformité avec le système LMD et les homologues européens et une autonomie graduée… Que les préparateurs de ville s’en inspirent. Ou apprennent la patience…

BP : Qui fait quoi ?

Le Brevet professionnel de préparateur en pharmacie est un diplôme professionnel de l’Education nationale. Il est cosigné par le ministère de la Santé en raison de l’aspect réglementé de cette profession. C’est un diplôme de niveau IV comme le baccalauréat, alors que celui de préparateur hospitalier a le niveau III du ministère de la Santé. Tous les diplômes professionnels de l’éducation nationale, du CAP au BTS, sont élaborés dans le cadre des Commissions professionnelles consultatives (CPC). Ces dernières formulent des avis et des propositions sur la définition des diplômes, les besoins en diplômes compte tenu de l’évolution des professions, et la cohérence de l’ensemble de la certification existant dans leur secteur d’activités. C’est la 20e CPC, en charge du secteur médico-social, s’occupe du BP de préparateur. Les demandeurs d’une création ou d’une rénovation peuvent être les professionnels, un ministère (Education ou autre). Il faut alors une demande d’accord officiel pour commencer les travaux : pour cela, il faut l’examen du rapport d’opportunité en CPC et l’avis du ou des ministres concernés.

Sondage directmedica

Sondage réalisé par téléphone du 6 au 8 octobre 2008 sur un échantillon de 100 pharmaciens titulaires et 100 préparateurs en pharmacie représentatif de la population des pharmacies françaises en fonction de leur répartition géographique et de leur chiffre d’affaires.

Le temps c’est de l’argent

A votre avis, pour quelle raison un apprenti au brevet de préparateur a du mal à trouver un maître d’apprentissage ?

Une formation surannée

Selon vous, la formation initiale des préparateurs est :

La pharmacologie avant tout

Quelles seraient les matières à développer durant leur formation initiale (classez par ordre d’importance de 1 à 6, 1 étant le plus important et 6 le moins important) ?

Un bac + 2 serait populaire

Etes-vous favorable à ce que, dans le futur, le diplôme de préparateur soit de niveau bac + 2 ?

Mieux payer ? oui et non…

Si le diplôme évoluait dans son contenu, seriez-vous prêt à payer davantage un préparateur mieux formé avec davantage de responsabilités ?

Oui à l’indépendance !

Pensez-vous qu’un préparateur en pharmacie puisse délivrer et conseiller de sa propre initiative sans en référer à un pharmacien ?

Quel contrôle ?

Le préparateur assume ses tâches sous la responsabilité et le contrôle effectif d’un pharmacien. Etes-vous favorable à la suppression de cette dernière notion pour conférer au préparateur une plus grande responsabilité et autonomie ?

Patrick Le Métayer, secrétaire général adjoint de la Fédération FO-pharmacie.

Le BP est une voie de garage sans passerelle dans laquelle s’engouffre une majorité de bacheliers.

Claude Japhet, président de l’UNPF.

Certaines tâches pourraient être déléguées aux préparateurs, ne serait-ce que le renouvellement d’ordonnance.

Réunir rapidement la Commission des préparateurs

Il existe une Commission des préparateurs qui a compétence en matière de formation et d’exercice, comme le précise l’article L. 4241-5 du CSP, modifié par ordonnance*. Il stipule en effet que « les conditions de délivrance du brevet professionnel de préparateur en pharmacie sont fixées par décret, pris après avis d’une commission comprenant des représentants de l’Etat, des pharmaciens et des préparateurs en pharmacie et dont la composition est fixée par décret ».

« Cette commission, dont les compétences ont été étendues aux préparateurs hospitaliers, est consultative mais elle pourrait travailler en amont avec la 20e CPC pour réingénier le BP », indique Rolande Desgris, en charge des questions juridiques concernant l’exercice et la formation des préparateurs en pharmacie à la Direction de l’hospitalisation et de l’organisation des soins (Ministère de la Santé). Seulement voilà, elle ne s’est pas réunie depuis juillet 2006 ! La CPNE a donc demandé au ministère de la Santé qu’elle se réunisse à nouveau. « Le mandat de cette commission vient d’être renouvelé pour une période d’un an et elle fera l’objet d’une nouvelle composition nominative lorsque le décret pris en application de l’ordonnance du 30 mai 2008 aura été publié », tient à préciser Rolande Desgris.

* Ordonnance n° 2008-507 du 30 mai 2008, article 29 portant transposition de la directive 2005/36/CE relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles.

« Il serait dommage de se contenter d’un simple dépoussiérage du BP »

Entretien avec Guy Boudet, chef du bureau « Formation et exercice des professions paramédicales et des personnels hospitaliers » à la Direction de l’hospitalisation et de l’organisation des soins (DHOS). Il siège également à la 20e CPC en tant que représentant du ministère de la Santé.« Le Moniteur » : Les représentants de la branche officine et l’Education nationale regrettent que le ministère de la Santé ne semble guère préoccupé par la rénovation du diplôme de préparateur en pharmacie. Est-ce le cas ?

Guy Boudet : La DHOS n’est compétente sur les questions de formation que depuis 2007 en raison des réorganisations du ministère de la Santé. En juillet 2007, j’ai participé à une réunion de la 20e CPC sur la question des préparateurs en pharmacie. Les syndicats employeurs n’étaient pas d’accord sur le sujet. Depuis, la Commission paritaire nationale pour l’emploi a été reçue par la conseillère technique de Roselyne Bachelot. Aujourd’hui, il ne semble pas y avoir d’opposition à un travail de rénovation du BP.

Le BP est un diplôme de l’Education nationale cosigné par le ministère de la Santé. Comment se passerait cette cogestion dans la rénovation ?

Le ministère de la Santé n’étant pas le certificateur de ce diplôme, c’est l’Education nationale qui pilotera la rénovation. Le ministère de la Santé est compétent pour déterminer le champ d’exercice du préparateur. On doit alors construire un diplôme autour des activités et des compétences. Il ne peut y avoir de décalage entre les exigences pour exercer un métier et la formation qui y prépare.

Certes, mais il n’y a aucune description de métier ou de tâches pour le préparateur au sein du Code de la santé publique…

Effectivement, il n’y a pas de décret d’actes pour le préparateur dans le CSP. Juste un niveau de qualification qui le rend apte à travailler avec le pharmacien. Quand on travaille sur un diplôme, notre démarche, pragmatique, consiste à lister les activités et à dégager les compétences dans un exercice réglementé comme celui de la pharmacie. Cette approche doit d’ailleurs être corrélée avec d’autres opérations actuellement en cours, car la ministre vient de lancer quatre groupes de travail ayant pour thème l’évolution des missions des pharmaciens.

Voulez-vous dire que remettre à plat le diplôme de préparateur nécessite une vision plus globale de l’officine ?

Chaque fois que des mesures d’envergure ont été prises, elles l’ont été parce que le problème était traité dans sa globalité. Il serait dommage de se contenter d’un simple dépoussiérage du BP. Objectivement, la démarche de la CPNE [NdlR : suppression du contrôle effectif et rénovation du diplôme] apparaît un peu isolée. Cela me paraît limité de faire une entrée par le préparateur en pharmacie alors que le problème est l’organisation de la pharmacie en général. On se forme pour exercer des activités et acquérir des compétences que l’on met en avant dans son métier. S’il s’avère qu’une volonté du champ professionnel, en l’occurrence celui de la pharmacie, s’exprime, la ministre peut demander une expertise pour avoir une vision précise des besoins et des évolutions. C’est le cas récent du projet de réforme de la biologie médicale, sur la base d’un travail collaboratif de plusieurs mois avec l’ensemble des acteurs concernés par la discipline, libéraux et hospitaliers, confié à un conseiller général des établissements de santé, Michel Ballereau*, en lien avec le cabinet de la ministre. Dans son rapport, Michel Ballereau fait des préconisations pour l’avenir de cette discipline avec notamment des propositions sur la formation des personnels techniques. Il n’est bien sûr pas question d’une réforme d’une telle ampleur pour l’officine, mais les évolutions de la pharmacie, notamment dans le cadre de l’Union européenne, et la volonté de l’ordre des pharmaciens de conserver l’aspect technique de la profession pourraient conduire à adopter ce type d’approche experte pour l’officine. C’est ce qui pourra s’engager dès lors que les groupes de travail sur les évolutions des missions des pharmaciens constitués par la ministre auront rendu leurs conclusions.

Est-ce à dire que les préparateurs doivent attendre que l’officine fasse sa grande remise à plat avant de voir un changement ? Ne pourrait-on pas au moins commencer à travailler en CPC avec vous pour toiletter le diplôme ?

On peut bien sûr effectivement avancer. Le BP a 10 ans et il s’est passé des choses en 10 ans ! Il n’est peut-être pas obsolète mais juste à reconsidérer. La prochaine réunion a lieu en décembre, nous ne fermerons pas la porte. Notre cabinet n’est pas défavorable pour envisager une rénovation. Nous devons au préalable discuter avec l’Education nationale de la méthode et du pilotage.

Plutôt qu’un dépoussiérage, les syndicats de salariés évoquent une remise à plat du diplôme avec, pourquoi pas, une évolution vers un niveau supérieur (licence professionnelle, intégration dans la réforme LMD)…

Le rapport LMD sur les professions paramédicales sera un modèle pour tous les autres diplômes. Nous avons commencé à travailler sur la réingénierie des diplômes, en traitant en priorité ceux pour lesquels nous sommes les seuls certificateurs (infirmières…). On peut bien sûr imaginer pour les préparateurs une formation plus longue, complètement réingéniée, avec la possibilité d’exercer dans plusieurs endroits ou de se spécialiser. Il importe tout de même de ne pas rendre le diplôme inaccessible, mais plutôt de permettre des évolutions et des formations complémentaires en cours de carrière pour ceux qui le souhaitent. Il faudra y réfléchir avec les pharmaciens…

Que pensez-vous de la demande de suppression du contrôle effectif ?

Il existe une tendance naturelle des professions auxiliaires au sens large à vouloir s’émanciper du poids du référent médical ou technique. Nous sommes prudents : autant le professionnel y voit un espace de liberté, ce que je peux comprendre, autant le ministère peut y voir un danger qu’un exercice mal contrôlé pourrait générer pour l’usager.

* « Rapport sur un projet de réforme sur la biologie médicale » remis à Roselyne Bachelot le 23 septembre 2008.

* D’après une enquête en cours de l’Association nationale pour la formation professionnelle de la pharmacie qui regroupe la majorité des CFA.

** Accord entre l’Etat et les organisations professionnelles et syndicales représentatives d’un secteur d’activités portant sur la réalisation d’une étude et permettant d’informer sur les évolutions courantes ou prévisibles de l’emploi, des métiers, des qualifications et des compétences. La branche pharmacie en a bénéficié en 2006.