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ETUDES : Remettez-en une couche !
Dans le cadre de la formation continue obligatoire, dont le décret d’application n’est toujours pas paru, les diplômes universitaires pourraient prendre une importance nouvelle. Mais pour quoi faire exactement ? Quels bénéfices y a-t-il à retourner sur les bancs de la fac ? Aux sceptiques, des universitaires et des pharmaciens font part de leurs expériences.
Qu’ils soient orientés sur le médicament, le maintien à domicile, l’homéopathie ou encore les pathologies, toutes les facultés proposent des diplômes universitaires (DU). En tout plus d’une centaine de formations sont ainsi mises chaque année à la disposition des officinaux.
Mais beaucoup hésitent encore à s’y inscrire, par désintérêt, à cause de la distance, par manque de temps ou tout simplement parce qu’ils en perçoivent mal l’intérêt. Autant d’« arguments » qui font que peu nombreux sont les officinaux, titulaires et adjoints réunis, à franchir de nouveau le seuil des universités.
Et pourtant, comme le souligne le Pr Restout, médecin et pharmacien, responsable du DU de pathologie médicale à Paris-V, « il est toujours bénéfique de remettre à jour les connaissances acquises des années auparavant. Prenons l’image d’un mur de façade : avec le temps la peinture s’écaille, s’effrite, tous les dix ans un ravalement s’avère nécessaire. De plus les matériaux ont évolué, de nouveaux solvants sont apparus… Eh bien, c’est exactement la même chose pour ce que les pharmaciens ont appris lors de leur passage à la faculté : il faut actualiser, compléter, affiner. Les officinaux n’ont peut-être pas conscience de l’apport d’une connaissance supplémentaire. Cependant, ce que nous enseignons n’est pas théorique et peut être tout de suite mis en application au comptoir. Pour les plus de quarante ans, il est indispensable de se mettre à niveau car beaucoup n’ont pas eu ces cours lors de leurs études, mais c’est aussi valable pour les plus jeunes qui ont besoin de rafraîchir, pour ne pas dire plus, ce qu’ils ont vu en quatrième année ».
En effet, alors que les revues consuméristes épinglent très régulièrement les pharmaciens, renforcer ses acquis, optimiser le conseil apparaissent essentiels. C’est l’image de la profession qui en sortira grandie. Or un bon conseil passe obligatoirement par une maîtrise totale du sujet. Evidemment, les études pharmaceutiques, longues de six années, sont supposées apporter un bagage scientifique suffisant pour l’exercice officinal. Mais au cours du temps les connaissances se diluent, de nouveaux médicaments voient le jour, des maladies apparaissent, les techniques chirurgicales, de radiologie, de recherche, évoluent… Le pharmacien, de part sa proximité avec la population, peut être amené à répondre à de multiples questions en rapport avec ces avancées. Homme de sciences, il devient de plus en plus homme de communication mais cela suppose de remettre à jour ses connaissances.
« J’écoute mieux ».
Déjà détenteur des DU de pharmacologie et de pharmacie appliquée, de celui de gérontologie et d’autres diplômes notamment en homéopathie, Bertrand Hechenroth, titulaire à La Châtre (Indre), n’a pas hésité à venir douze lundis par an pendant deux ans jusqu’à Paris pour parfaire son savoir. « Je me suis rendu compte que, bien que diplômé depuis 1981, j’avais des lacunes en pathologie. C’est bien beau de savoir à quoi sert un médicament, mais c’est aussi intéressant de comprendre comment et pourquoi on le délivre. Cette nouvelle approche m’a motivé à m’inscrire cette année à la faculté. Au quotidien, je sens déjà que ma façon d’aborder les patients change. J’écoute mieux, je suis plus attentif, à l’affût d’un mot clé qui me permettra, à mon niveau, de mieux délivrer les médicaments. Tous les diplômes que j’ai passés partaient de la même envie : répondre à l’attente des clients, ne serait-ce que par honnêteté intellectuelle. »
D’autres titulaires retournent dans les amphithéâtres afin de légitimer une pratique. C’est par exemple le cas de Gérard Hunault, titulaire depuis 1982 dans le Calvados : « Je désirais une formation complémentaire en médication vétérinaire et ainsi obtenir la reconnaissance officielle d’une spécialisation. A l’époque je faisais partie du syndicat de la pharmacie vétérinaire d’officine. L’activité vétérinaire en officine étant assez contestée, notamment par les vétérinaires, le fait qu’un pharmacien ait un diplôme reconnu par les universités, donc officiel, confère une légitimité. J’ai pour cela suivi le diplôme universitaire de Rennes en 1995. Aujourd’hui j’ai acquis une reconnaissance, y compris vis-à-vis des éleveurs. »
Synergie salarié-employeur.
Diversifier son activité au sein de l’officine et se spécialiser dans un domaine, telles peuvent aussi être les raisons de se réinscrire à la fac. Encore faut-il bien cibler son choix et être motivé. Christelle Fraisse, 26 ans, actuellement adjointe dans une grande pharmacie (cinq adjoints) de Seine-et-Marne, le reconnaît. Si elle possède aujourd’hui un DU d’homéopathie et d’orthopédie, c’est non seulement parce que les deux spécialités l’intéressent mais aussi parce que cela participe de la politique de développement voulue à la fois par son titulaire et elle-même. Une constante envie de se perfectionner. « Depuis ma deuxième année en officine, je connais l’homéopathie sans pour autant maîtriser la discipline. J’estimais qu’au cours de la formation initiale nous n’avions pas assez approfondi le sujet. J’ai donc, en sixième année, décidé de suivre une formation complémentaire qui aujourd’hui me permet de faire un conseil plus approprié. » Par la suite, en accord avec le titulaire, elle a suivi un diplôme universitaire financé par l’OPCA-PL, qui l’autorise aujourd’hui à seconder le pharmacien en charge du secteur orthopédique de l’officine. « Bien sûr l’application au quotidien dépend de la pharmacie dans laquelle on exerce. J’ai pour ma part l’avantage de travailler dans une grande structure où l’on fait beaucoup d’orthopédie, et donc forcément je mets énormément en pratique ce que j’ai appris. »
« Un DU, c’est pas toujours suffisant ».
Le risque en effet est celui de se retrouver avec un diplôme que l’on n’utilise pas, soit parce qu’il n’y a pas un potentiel de clientèle suffisant, soit parce que l’officine est trop petite ou encore par manque de volonté de développement. « Les cours sont assez complets en orthopédie, mais il faut quand même beaucoup pratiquer avant de se sentir totalement à l’aise, précise Christelle Fraisse. C’est pourquoi je conseille de suivre des formations supplémentaires. Le diplôme universitaire ne dure que trois semaines, c’est une bonne base mais pas forcément suffisante pour se lancer tout de suite dans la réalisation de structures thermoformées. Personnellement, j’ai complété ce que nous avions vu sur les prothèses mammaires par une session de deux jours organisée par un laboratoire. »
Le diplôme obtenu, la compétence acquise, reste à le faire savoir à sa clientèle : « Nous avons une vitrine dans laquelle sont exposés soutiens-gorge et maillots de bain. Les femmes opérées savent ainsi qu’une ou plusieurs personnes à l’officine pourront répondre à leurs demandes. »
Autre exemple de mise à profit d’un diplôme universitaire : Jean-François Rennucci, titulaire à Pernes-les-Fontaines (Vaucluse) : « Sur le village, à l’initiative d’une maison de retraite, nous avions créé avec deux autres officines une petite société de maintien à domicile. Cela évitait le démarchage de chaque pharmacie. Afin de me perfectionner j’ai passé le DU correspondant. Pour tout ce qui est matériel médical, pansements, solutés, il nous faut parfois relire des prescriptions insuffisamment précises, d’où l’importance pour nous, pharmaciens, de bien maîtriser les produits que nous délivrons. »
Autoévaluation.
Les offres de formations sont multiples et variées, chaque faculté proposant plusieurs DU. Il est donc difficile de s’y retrouver. Afin d’aider les officinaux dans leur recherche, le Haut comité de la formation pharmaceutique continue (HCFPC) a mis en place, via le site Internet du Conseil national de l’ordre des pharmaciens, un outil qui donne accès à l’ensemble des enseignements dont il a connaissance. Pour recevoir un agrément du HCFPC (valable deux ans), un DU doit actuellement répondre à plus de vingt objectifs pédagogiques et professionnels. Comme le souligne le Pr Claude Vigneron, vice-président du HCFPC et enseignant à Nancy, « le rôle du Haut comité c’est aussi de donner un avis sur la façon dont les enseignements se déroulent. Nous avons un oeil sur la nature et la diversité des intervenants, l’organisation, le contenu des cours et le mode d’évaluation ». Rôle qui sera dévolu demain au futur Conseil national de la formation continue.
Mais l’un des chevaux de bataille des organismes professionnels liés à la formation continue est la mise en application de la formation obligatoire votée en mars 2002. « Ce que l’on peut espérer c’est toucher l’ensemble des officinaux et non plus seulement les 15-20 % actuels. A titre personnel, il me semble que la sémiologie, la pathologie et le maintien à domicile sont d’un intérêt particulier pour les pharmaciens, à condition toutefois que les conférenciers se mettent à la portée de leurs interlocuteurs. C’est-à-dire qu’ils enseignent en ayant bien à l’esprit l’application pratique au comptoir pour l’officinal. »
Mais comment faire pour que le pharmacien, dans son officine, arrive à évaluer ses compétences et prenne ainsi conscience de ses manques et de ses besoins de formation ? « Les médecins ont déjà entamé une procédure de ce type, peut-être faudrait-il s’en inspirer (1) ? En tous cas, une prise de conscience s’est effectuée depuis 10-15 ans, et une fois que l’on a pris goût à se former, on continue et on transmet cette envie à l’ensemble de l’équipe officinale », assure Claude Vigneron.
(1) Les médecins ont entamé le principe de l’autoévaluation mais avec l’aide d’un confrère qui sert pour cela de « tuteur ».
Quand un DU naît d’un sondage grand public
Etonnant mais réel. Le diplôme universitaire de « Prise en charge des urgences et intoxications à l’officine », enseigné à Clermont-Ferrand, est né suite à la parution en novembre 2001 d’une enquête Louis Harris. A la question : « Concernant les risques bactériologiques, chimiques ou industriels, à qui faites vous le plus confiance pour vous informer ? », seules 8 % des personnes interrogées citaient les officinaux, loin derrière les médecins, les chercheurs, le ministère de la Santé, les sapeurs-pompiers, les médias, la mairie et la préfecture.
« Nous étions un peu étonnés par la mauvaise place des pharmaciens, se souvient monsieur Authier, maître de conférences. Il nous semblait pourtant que le pharmacien avait vocation à donner des conseils, à faire de la prévention des risques domestiques, des accidents et des intoxications. » Raisons pour lesquelles la faculté de Clermont-Ferrand a décidé de créer cette formation. « Nous voulons donner une carte supplémentaire au pharmacien qui, souvenons-nous, est un acteur de la santé publique. Nous avons pour cela intégré des cours de secourisme dispensés par les réanimateurs du SAMU de Clermont-Ferrand. Il est nécessaire que le pharmacien sache réaliser un massage cardiaque, mettre un blessé en PLS… »
Bien entendu cet enseignement n’aura aucune répercussion positive sur le chiffre d’affaires des officines. Mais là n’est pas l’essentiel. Pour ce maître de conférences, « il s’agit de redorer le blason de la pharmacie. C’est un DU « anti-tiroir-caisse » mais qui revalorise l’image du pharmacien d’officine ».
Conseil : Bien choisir son DU
– Sélectionnez un thème qui vous motive.
– Demandez-vous si vous pourrez appliquer les connaissances acquises dans votre officine et si le DU sera adapté à son l’environnement. En milieu agricole, un DU vétérinaire sera plus judicieux qu’un diplôme de dermocosmétologie…
– Apportez une valeur ajoutée à votre activité, différenciez-vous des compétences des pharmacies avoisinantes !
– Complétez la formation de l’équipe officinale en place. Par exemple, si un pharmacien possède un DU d’homéopathie, pourquoi ne pas se tourner vers la phytothérapie ?
– Renseignez-vous sur le contenu, la durée, les horaires, le coût, la nature des intervenants des cours proposés.
– Assurez-vous que votre emploi du temps vous permettra de suivre tous les cours.
– Demandez l’avis d’anciens diplômés sur la formation.
– Renseignez-vous si le DU est agréé par l’Ordre et, demain, par le Conseil national de la formation continue. Si non, pourquoi ?
– Pour un coût moindre, optez pour des formations prises en charge par l’OPCA-PL ou le FIF-PL.
A noter : Liste des DU
Vous trouverez l’ensemble des DU dispensés dans les différentes facultés de France sur le site Internet de l’Ordre : Ordre.pharmacien.fr.
Contacts
Deux organismes financent la plupart des DU des facultés pharmaceutiques. – L’OPCA-PL s’adresse aux collaborateurs. – Le FIF-PL est réservé aux titulaires.
Toutes les informations relatives aux formations financées sont disponibles sur leurs sites Internet : Opcapl.com et Fifpl.fr.
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