Jouer la carte proximité
C‘est en juin 2004, après huit mois de remplacements, qu’Anne Gondard et Hélène Casabianca s’installent dans le XVIIIe arrondissement parisien. Elles n’en sont pas à leur première expérience commune. « Nous étions assistantes il y a une quinzaine d’années dans la même grosse pharmacie du XVIe, puis nous avions racheté dans le XVIIe une petite pharmacie », raconte Hélène Casabianca. Elles y resteront sept ans. Jusqu’au jour où elles se sentiront un peu à l’étroit.
Après le rachat de l’actuelle officine, Anne Gondard et Hélène Casabianca attendront quelques mois avant d’entreprendre des travaux d’envergure, histoire de ne pas déstabiliser la clientèle. « Le précédent titulaire était très apprécié par la clientèle, et nous voulions faire une reprise «en douceur», commente Anne Gondard. D’autant que la préparatrice de l’ancienne équipe sentait certaines réticences, notamment par rapport au fait que ce soit des femmes qui reprennent… C’est fou ! » Une preuve de plus s’il en est que les mentalités n’évoluent pas très vite sur la parité…
Quoi qu’il en soit, les cotitulaires ont su rapidement se faire aimer. Dès novembre, de grands changements s’amorcent avec un projet d’automatisation, l’agrandissement de l’espace de vente et un réaménagement complet afin de composer une officine qui leur ressembleraient davantage.
Ambiance sereine et accueil en période troublée
« Nous voulions quelque chose de doux à l’oeil, de lumineux, qui ne soit pas agressif, dedans comme dehors, avec des teintes claires en demi-tons. Nous avons opté pour le nettoyage de l’enduit sur la façade afin de remettre à nu la pierre », souligne Hélène Casabianca. L’automate, un Apotheka, installé au premier étage va permettre de gagner deux mètres de profondeur sur toute la largeur de la pharmacie, soit un bon tiers en plus pour la surface de vente. La ligne de comptoirs arrivait en fait auparavant au niveau du grand pilier central pour laisser la place à des colonnes à tiroir en back-office. « Nous avons investi 76 000 euros dans cet automate. Il est costaud et facile à dépanner, sans trop de technicité. Cela permettait aussi d’anticiper sur un avenir qui pouvait nous confronter à un manque crucial de personnel. Avec l’automate, nous pouvons embaucher quelqu’un qui n’est pas spécialisé dans le médicament, alors que les personnes qualifiées peuvent rester au comptoir », explique la cotitulaire.
Mais période de crise oblige, les tendances semblent inversées : en effet, Anne Gondard et Hélène Casabianca cherchent à remplacer leur assistant qui va s’installer à son compte. Et, contre toute attente, elles ont reçu une trentaine de candidatures en deux jours : « Du jamais vu ! Nous avions passé une annonce sur le site de l’OCP et ça a été la ruée… Certains pharmaciens venaient d’être licenciés d’officines parisiennes dont les chiffres avaient trop chuté en 2008 », indiqueAnne Gondard. Selon elle, ce sont les pharmacies qui font beaucoup de para qui auraient le plus souffert. « Nous sentons que les comportements d’achats changent. Même en écrasant les prix au maximum, les gens achètent moins en lots. »
Pourtant les chiffres de la Pharmacie Gondard Casabianca n’accusent qu’une faible baisse de la para en 2008, à – 0,6 %. En revanche, la médication familiale a progressé, notamment avec les déremboursements. « Pour les petites pathologies, les clients viennent davantage nous consulter avant d’aller voir leur médecin », remarque Anne Gondard. Au final, l’année a été étale avec un léger déplacement dans la répartition du médicament vers la médication familiale. Pour 2009, les titulaires espèrent continuer à faire le gros dos pour rester à l’équilibre. Comment ? En peaufinant un conseil pointu avec une équipe à l’écoute et bien formée. Ce challenge, d’autant plus relevé lorsque l’on travaille à flux tendu, est soutenu par de l’e-formation (lire encadré page 4).
Une équipe soudée et qui se répartit les tâches
Quand on est 6 – 3 pharmaciens et 3 préparateurs -, une forte amplitude horaire n’est pas facile à couvrir sans une bonne organisation. « Tous les salariés ont un week-end sur deux, et ils ont tous trois jours consécutifs. Ce qui fait que lorsqu’ils travaillent, ils travaillent beaucoup et longtemps ! » Soit un 35 heures sur quatre jours, « voire plus quand nous avons des coups de bourre », détaille Anne Gondard. Ces aménagements horaires semblent satisfaisants puisque le turnover est faible, ce qui est peu courant à Paris. Côté intéressement, des primes sont données après une période difficile et si le mois a été bon, et des chèques-cadeaux distribués sur des opérations ponctuelles avec des objectifs précis. Ce sur quoi l’équipe s’accorde, c’est le maintien d’une ambiance de travail agréable avec des responsabilisations claires.
En sus de son travail au comptoir, chacun connaît bien son domaine. Stéphane Merucci, préparateur, s’occupe des génériques dans leur totalité : négociations, commandes, réception, insertion dans l’automate. François Larregle s’occupe, lui, des commandes du jour, des grossistes et du registre des stupéfiants, Céline Daugrois d’une partie de la parapharmacie. Elisa Hiret, l’autre préparatrice dernièrement arrivée, gère les commandes, le rangement et la marque Darphin. « Elle est partie en formation car elle connaissait bien la marque pour laquelle elle aime s’investir. Nous lui passons progressivement le relais pour cette marque ainsi que pour Biotherm. » Hélène Casabianca s’occupe, quant à elle, du médicament conseil et d’une partie de la para. Tandis qu’Anne Gondard est davantage au fait de l’organisation côté chiffres. Les deux titulaires gèrent d’une poigne de fer leurs dossiers de tiers payant. « Si nous déléguons un maximum de tâches, nous préférons suivre de près les dossiers non réglés. Nous faisons la télétransmission le matin et rappelons systématiquement dans la journée pour que ça avance. Nous essayons de ne rien laisser de côté et toute l’équipe est très vigilante sur les cartes de mutuelle. » Une borne de mise à jour est à disposition pour les cartes Vitale et l’équipe scanne systématiquement les mutuelles. « Nous avons anticipé car c’est plus rapide qu’une photocopie, nous avons ainsi une banque de données des mutuelles et davantage de traçabilité. »
La petite orthopédie et le DP à l’honneur
Malgré un évident manque de place pour référencer davantage, les titulaires ont développé la petite orthopédie. « Notre prédécesseur proposait Sigvaris et quelques références de Radiante. Nous avons élargi ces deux marques et ajouté Varisma, notamment parce que cette dernière propose Legger, une référence pour homme qui est très prescrite. Ces laboratoires taillent différemment et, pour le sur mesure, Radiante est mieux indiqué. » Un ascenseur externe pour monter à l’étage pour les essayages a permis d’obtenir l’agrément. « Avec chaque marque nous traitons des demandes spécifiques et tentons de couvrir tous les besoins. »
Depuis septembre dernier, l’équipe s’est lancée dans le dossier pharmaceutique, qui leur semble très important. Malgré quelques refus, ils savent prendre le temps des explications nécessaires pour rassurer et faire comprendre les enjeux de la démarche. « Nous nous sommes lancés au moment de la polémique sur le dossier Edvige ! Cela a occasionné des freins supplémentaires qu’il a fallu débloquer pas à pas. Certaines personnes souhaitent réfléchir quand d’autres acceptent immédiatement. Un de nos clients croyait que nous allions revendre le fichier ! » Il faut donc prendre le temps qu’il faut pour dissiper les craintes. Car ce que les titulaires plébiscitent le plus au comptoir, c’est l’écoute, la psychologie et l’ouverture d’esprit.
C’est dans cette optique qu’elles essaient de trouver leur nouvel assistant. « Nous recrutons essentiellement sur le rapport au conseil et le contact, et pas seulement sur les ventes. Selon le pouvoir d’achat de la personne, il faut s’adapter et jauger finement. C’est ce service à valeur ajoutée qui fait vraiment la différence pour une pharmacie de quartier parisienne », souligne Anne Gondard.
Pharmacie Gondard Casabianca
CA actuel : 2,4 M €TTC
Répartition :
– 68,56% de médicaments
– 17,44% d’OTC
– 14% de parapharmacie
Equipe : 6 personnes
– 2 titulaires
– 1 pharmacien assistant
– 3 préparateurs
– 1 femme de ménage
– 1 comptable en externe
Surface totale : 180 m2
Surface de vente : 80 m2
Réserves sous-sol : 40 m2
Fréquentation : 280 clients/jour
Panier moyen : 29,23 euros
Progression : – 0,3 % Groupement : Pharmodel
ZoomLes atouts de l’e-formation
Avec une large amplitude horaire d’ouverture – de 8 h à 20 h 30 et l’équipe est aux 35 heures -, concilier emploi du temps et exigences de formations régulières n’est pas chose facile. Heureusement les nouvelles technologies ont ouvert la voie à d’autres formes d’apprentissage à la carte via le Net. « Tout va très vite aujourd’hui et nous avons besoin régulièrement de formations métier scientifiques sur les nouveaux médicaments ou les sorties de la réserve hospitalière, explique Hélène Casabianca. Nous avons ainsi accès à des téléconférences d’une vingtaine de minutes en direct sur écran. Nous pouvons les suivre à plusieurs, tandis que les autres restent au comptoir. C’est simple et efficace. Il nous suffit de prendre rendez-vous et nous progressons à notre rythme. » Et cela permet de mieux s’organiser selon les singularités horaires de l’officine, tout en respectant les habitudes de la clientèle. « Ceux qui ont suivi l’e-formation peuvent la transmettre, ou nous pouvons prendre un second rendez-vous pour l’autre groupe. » Une façon intelligente de se former à distance sans monopoliser trop de temps, notamment en déplacements.
Ces formations viennent compléter les visites des laboratoires sur site que l’équipe suit également. « Ce sont plus que des visites commerciales car elles abordent les pathologies de manière scientifique, même si, au final, elles débouchent bien sûr sur les produits des laboratoires. »
- L’IA au service des pharmaciens : un levier contre la fraude aux ordonnances ?
- « Non, monsieur Leclerc, les pharmaciens ne sont pas des nuls ! »
- [VIDÉO] Médicaments : on vous livre cette idée…
- Sante.fr : l’outil de référence pour faire connaître ses services aux patients
- Campagnes publicitaires de médicaments OTC et des produits de parapharmacie
- [VIDÉO] Arielle Bonnefoy : « Le DPC est encore trop méconnu chez les préparateurs »
- [VIDÉO] Le service de livraison en ligne : « Ma pharmacie en France » disponible dès juin
- [VIDÉO] Négociations, augmentations, ancienneté… Tout savoir sur les salaires à l’officine
- [VIDÉO] 3 questions à Patrice Marteil, responsable des partenariats Interfimo
- [VIDÉO] Quand vas-tu mettre des paillettes dans ma trésorerie, toi le comptable ?
![[VIDÉO] Arielle Bonnefoy : « Le DPC est encore trop méconnu chez les préparateurs »](https://www.lemoniteurdespharmacies.fr/wp-content/uploads/2025/03/bonnefoy-dpc-680x320.png)
![[VIDÉO] Le service de livraison en ligne : « Ma pharmacie en France » disponible dès juin](https://www.lemoniteurdespharmacies.fr/wp-content/uploads/2025/03/grollaud-sans-680x320.png)