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COMMENT DÉVELOPPER SON RAYON

Publié le 19 janvier 2013
Par Annabelle Alix
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Vieillissement de la population et politique de maintien à domicile (MAD) peuvent être de nouveaux leviers de croissance pour l’officine. Quelques conseils pour développer son rayon de MAD.

Concurrencées par le secteur associatif et les sociétés privées, les pharmacies ne détiennent que 30 % des parts sur le marché du matériel de MAD, relève Laurent Egret, directeur du développement MAD chez Giphar. Elles disposent pourtant de plusieurs atouts à leur actif. » Certes, les sociétés privées bénéficient d’un droit à la publicité – refusé au pharmacien – et les hôpitaux sont parfois coupables d’ententes avec ces sociétés, court-circuitant ainsi l’officine lors du retour du patient à son domicile… Ces réalités n’affectent pourtant pas la bonne économie des rayons MAD en place dans certaines officines, mais rendent les pharmaciens hésitants à les développer. « Pour pouvoir entreprendre publicité et démarchage, certains choisissent de créer une société de MAD indépendamment de leur officine, rapporte Georges Dewaele, titulaire à Beauvais (Oise). Mais, pour être rentable, ce magasin doit réaliser 150 000 euros de chiffre d’affaires, soit l’équivalent de 150 lits en location. » Laurent Egret considère ainsi ce choix « opéré par seulement 5 % des pharmaciens » comme une prise de risque. Mieux vaut profiter de ses atouts et de son officine pour développer son rayon en interne en suivant trois règles simples.

1 Communiquer sur son savoir-faire

Ses horaires avantageux (ouverture le samedi, gardes…), sa position de commerce de proximité et l’afflux d’une clientèle quotidienne permettent largement à l’officine de compenser l’absence de publicité… à partir du moment où elle communique sur son matériel. Le MAD attire avant tout une clientèle nouvelle, qui n’entrera dans l’officine qu’en apercevant les produits exposés. La visibilité du matériel donnera également à la clientèle régulière le réflexe de s’adresser à la pharmacie en cas de besoin. « Il est donc nécessaire de réserver un espace au MAD », estime Katia Le Donné, directrice merchandising chez Evolupharm, qui considère également que « reproduire la chambre du malade en vitrine accroche l’œil. C’est un bon moyen d’attirer la clientèle. L’idéal est de privilégier un espace de vente unique ».

Le rayon MAD doit s’imposer aux clients en faisant apparaître tout le matériel proposé. « L’officine disposant d’une petite surface de vente peut se concentrer sur la présentation du petit matériel comme les cannes, les barres de salle de bains, les coussins antiescarres, les compléments alimentaires ou les tire-lait », précise Françoise Paulin, formatrice chez Forma Plus Consulting. Tout en communiquant par affichage et catalogues sur les produits qui peuvent être commandés. Cette même petite officine peut changer régulièrement le matériel exposé, « mais moins fréquemment que les têtes de gondole car l’achat de ces produits est beaucoup plus réfléchi », explique Katia Le Donné. Au comptoir, la conversation doit être engagée avec le patient sur le matériel qui peut lui être utile, notamment au cours des visites de personnes âgées – lesquelles « viennent à l’officine en moyenne une fois par semaine », relève Laurent Egret. Le pharmacien doit également dialoguer avec ses voisins prescripteurs (médecins, infirmiers et kinésithérapeutes) afin de cerner les besoins de sa clientèle et les informer des services proposés.

2 Se former régulièrement

Type de matériel, choix de la taille, modes d’utilisation… Conseiller le client sur le matériel ne s’improvise pas. D’autant que la prescription manque parfois de précision, quand elle n’est pas absente. Le pharmacien doit donc se former au MAD afin de pouvoir dispenser un conseil affiné, qui reste son point fort aux yeux du patient et face à la concurrence. « La formation apporte au pharmacien une connaissance approfondie des différents matériels », explique Sylvie Deveaux, coresponsable du diplôme universitaire de matériel à l’officine pour le maintien et les soins à domicile à la faculté de médecine-pharmacie de Besançon. « Nous découvrons un matériel dont on ne voit habituellement que les boîtes, relève Thibaut Pertuisot, adjoint à Pont-à-Mousson (Meurthe-et-Moselle), et les mises en situation nous font prendre conscience des problématiques auxquelles est exposé le patient. » Sylvie Deveaux précise que « la formation apprend également à effectuer les transferts du lit au fauteuil, et inversement, gestes que les pharmaciens pourront à leur tour apprendre aux aidants lors de l’installation du lit à domicile ». La formation recentre donc le pharmacien sur sa mission de santé publique. La réglementation (règles de prescription, renouvellement du matériel, modalités de prise en charge, matériovigilance…) est également passée en revue, tout comme l’entretien et la désinfection du matériel loué. « Un circuit propre/sale doit être identifié à l’officine. Les matériels propres et sales ne doivent pas se croiser ni être entreposés au même endroit », précise Bruno Villette, directeur de la centrale MAD chez Evolupharm.

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3 S’impliquer pour fidéliser

« Lorsque le pharmacien n’effectue pas lui-même la livraison du matériel, il est préférable qu’il accompagne son prestataire au domicile du patient, estime Françoise Paulin. En cas de vente, il doit aller vérifier que le matériel est bien adapté à la personne. » D’ailleurs, une fois par an le pharmacien doit, entre autres, aller contrôler l’état du lit médicalisé, vérifier l’état de fonctionnement de la télécommande…. « Il conviendra d’intervenir avec réactivité en cas de problème et de profiter des visites pour ouvrir les yeux sur un matériel de douche inadapté à la personne, ou tout autre danger potentiel, indique Laurent Egret. Le pharmacien doit préciser au patient qu’il a les moyens de l’aider à rester plus longtemps à son domicile en lui proposant des solutions pour améliorer son quotidien. » Du fait de cette relation privilégiée, le pharmacien a de grandes chances d’obtenir la fidélité de son patient ainsi que celles de sa famille, souvent relais du patient pour les déplacements à l’officine. S’investir dans le maintien à domicile demande du temps et la désignation d’un référent dans l’officine peut être une solution. Car le MAD doit constituer un vrai service de proximité. « Mais il faut envisager le gain dans sa globalité, nuance Laurent Egret. Certaines gammes comme la nutrition ou l’incontinence ne procurent que de très faibles marges (15 ou 25 %). D’autres sont en revanche génératrices de marges à 60, 70 % voire plus, pour une moyenne de 40 ou 45 %. » Tout dépend ensuite du degré d’implication de l’officine : « Le rayon MAD représentera 1 % du chiffre d’affaires d’une officine s’impliquant peu et 7, 8 voire 10 ?% de son chiffre d’affaires si elle est très impliquée. »

Ce que dit la législation

– La délivrance du matériel de maintien à domicile ne nécessite pas de diplôme spécifique. Toutefois, suite à un arrêté du 23 décembre 2011 (JO du 30.12.2011), les pharmaciens proposant des matériels destinés à favoriser le retour à domicile et l’autonomie des personnes malades ou présentant une incapacité ou un handicap doivent suivre une formation. Elle ne sera pas nécessaire en cas de justification, à la date du 1er janvier 2012, d’une expérience supérieure ou égale à deux ans dans la délivrance du MAD.

– La présence d’un pharmacien est indispensable pour la dispensation de l’oxygénothérapie.

– Selon la convention pharmaceutique, la location de véhicules pour les personnes handicapées physiques nécessite un aménagement, intérieur et extérieur, spécifique. L’officine doit disposer d’une rampe d’accès lorsque cela s’avère nécessaire. L’intérieur doit, quant à lui, comporter une surface d’évolution de 16 m2 au minimum et une largeur de 2 mètres.