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Leclerc : l’expérience italienne

Publié le 10 mai 2008
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Leclerc réclame la vente de médicaments en France, en mettant notamment en avant son expérience en Italie depuis un an. Effectivement, les prix ont baissé. Mais les officines tiennent, pour l’instant, sur ce marché grâce à des rabais moyens de 13 %.

Depuis août 2006, le gouvernement transalpin a pris des mesures favorisant l’ouverture du marché pour certains médicaments. Tous les commerces peuvent vendre des médicaments non sujets à prescription à la condition que la vente se fasse dans « un espace spécialement consacré à ce type de produits et en présence d’un pharmacien ». Comme la plupart des GMS, Leclerc s’est engouffré dans la brèche avec son partenaire italien Conad. Immédiatement, les grandes surfaces, et notamment Leclerc-Conad (seules les « petites surfaces » conservent le seul nom de Conad), ont appliqué des rabais jusqu’à 35 %. « Lorsqu’on ouvre une para non loin d’une officine, l’impact se fait tout de suite sentir, confirme Marinella Ciraolo, responsable des parapharmacies chez Leclerc-Conad, qui travaillait auparavant pour un grossiste pharmaceutique. Dans certaines villes, les officines pratiquent désormais elles aussi 30 % de remise ! »

431 espaces OTC en GMS

« Nous estimons autour de 13 % les rabais moyens pratiqués par les pharmaciens », annonce Federfarma (Fédération des pharmaciens italiens). De fait, on ne trouve plus d’officines en Italie qui ne vante quelque promotion sur tel ou tel produit OTC. De même qu’aller acheter une aspirine en grande surface est devenu une alternative acceptée par bon nombre d’Italiens. On dénombrait fin mars 2 223 structures vendant de l’automédication hors officine, dont 1 862 paras et 431 espaces en grandes surfaces. L’an dernier, le marché de l’OTC a pesé 2,138 milliards d’euros contre 2,03 milliards en 2006 et 2,17 en 2005. Au dernier trimestre 2007, 95,8 % de ces ventes sont passées par le canal des officines, 1,9 % en GMS et 2,3 % dans les paras. Mais la part des GMS et des paras pourrait passer à… 15 % en 2010, commentait un représentant de la pharmacie italienne lors du dernier Pharmagora. Celui-ci donnait un prix moyen, pour l’OTC, de 5,20 Euro(s) en GMS, 5,80 Euro(s) dans les coopératives et 6,20 Euro(s) en officine.

300 à 500 références chez Leclerc-Conad

L’enseigne Conad, qui compte 28 hypermarchés en Italie, a pour l’instant ouvert 19 parapharmacies avec Leclerc. S’inspirant du concept bien rôdé des paras de son partenaire français, Leclerc-Conad propose deux formats, de 100 m2 et de 65 m2, plus amples que les 20 à 30 m2 aménagés par ses concurrents. « C’est l’un de nos projets stratégiques et nous y avons investi plus que les autres chaînes, avec un ameublement plus sophistiqué et coûteux. Le client a d’emblée la sensation d’entrer dans une vraie pharmacie », souligne le responsable du canal superette et hyper chez Conad-Leclerc, Alberto Moretti.

En un an, l’OTC et les « SOP » (médicaments sans obligation de prescription interdits de publicité) y sont passés de 300 à 500 références, tandis que tous les produits consacrés à la beauté et au bien-être sont passés de 2 500 à 3 000. « Nous nous sommes davantage orientés sur les produits naturels, de la phytothérapie, aux intégrateurs, en passant par l’homéopathie. On a également revu l’assortiment en fonction de la demande locale », explique Marinella Ciraolo. En moyenne, les parapharmacies Conad réalisent 2 % du CA total du point de vente, avec des pointes à 5 %.

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Alors, a-t-on besoin en France d’un séisme à l’italienne pour faire baisser les prix ? Non si les pharmaciens jouent le jeu. Comme le rappelaient il y a trois semaines les partenaires de la contre-campagne Leclerc (PHR, Collectif des groupements, UNPF, USPO), la profession a assuré aux pouvoir publics qu’elle était capable, elle-même, de faire chuter les prix de 10 à 12 %, comme en Italie et au Portugal, sans qu’il soit nécessaire pour cela d’ouvrir le monopole.

Leclerc vendra de l’OTC au Portugal en 2008

D’après les derniers chiffres d’Infarmed, l’Autorité nationale du médicament et des produits pour la santé, la libéralisation de la vente de médicaments non sujets à une ordonnance médicale (MNSRM) au Portugal depuis août 2005, a pesé sur les prix. L’Infarmed explique que les prix affichent un indice de 96,4, « ce qui signifie qu’ils sont en moyenne inférieurs à ceux qui existaient avant la libéralisation du marché ». Le marché total des MNSRM s’est élevé en 2007 à 181 ME dont 12,3 ME hors pharmacies, soit 7 % du total.

Modelo Continente, qui a créé une enseigne spécifique, Pharmacontinente, aligne 67 points de vente et contrôle 33 % du marché hors pharmacies. Avec 613 établissements distributeurs hors pharmacies, l’offre est surtout concentrée sur les villes de Lisbonne, Setubal et Porto.

Paracétamol et ibuprofène y sont les produits les plus vendus, selon Infarmed. La part de marché de Pharmacontinente a tendance à se réduire en raison de la forte concurrence que lui livrent d’autres chaînes de la grande distribution comme Jumbo et Pão de Açucar (du groupe Auchan), Pingo Doce (du groupe Jeronimo Martins) ou les grands magasins El Corte Inglés de Lisbonne et de Porto. Leclerc, qui exploite 12 mini-hypermarchés dans le pays, prévoit d’ouvrir ses premières parapharmacies d’ici fin 2008, notamment pour y vendre du médicament. En juin 2006, Michel-Edouard Leclerc lui-même avait annoncé son intention de vendre de l’OTC au Portugal. A l’époque, il le prévoyait pour 2007.

Armand Chauvel