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UNE PRO DE LA TÉLÉ

Publié le 1 novembre 2020
Par Favienne Colin
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Christine Genin-Cossin, la titulaire de la pharmacie du Griffon*, a co-créé une association pour mettre à disposition des pharmacies un service de téléconsultation organisé avec les professionnelsde santé du territoire. Et ce, quasi gratuitement pour l’officine !

En ce jour de septembre, un patient d’une trentaine d’années est particulièrement attendu à la Pharmacie du Griffon, à Argentan, dans l’Orne. Ce jeune homme a rendez-vous pour une téléconsultation avec un médecin généraliste d’Alençon, ville située à moins de 50 km de là. A son arrivée, la titulaire Christine Genin-Cossin, qui a toujours imaginé qu’un jour les pharmacies emploieraient des médecins, a fait en sorte que tout soit prêt. Alice, sa jeune adjointe, une jeune geek qui suit ses entraînements de trail avec une montre connectée, a allumé la plateforme Telepharm, du nom de l’association co-créée par la titulaire, qui met à disposition des officines de l’Orne et de la Normandie, un service de téléconsultation en lien avec les médecins du territoire, et actuellement expérimenté avec le soutien de l’ARS. Elle a renseigné la fiche du patient avec son nom, son numéro de sécurité sociale, les coordonnées de sa mutuelle… Le médecin a accès à ces documents de façon sécurisée.

Un protocole en rodage.

Dans cette salle équipée d’une table d’examen et d’un ordinateur, le patient est d’abord invité à lire et accepter les conditions de la consultation. La titulaire enchaîne par une prise de tension et pose quelques questions sur son ressenti, comment se passe le traitement… Enfin, elle lui demande s’il souhaite rester seul avec le médecin. Sans hésiter, il préfère qu’elle reste l’épauler. Puis, le visage du médecin apparaît sur l’écran et la consultation commence. En sortant, le patient est enjoué. « C’est comme si j’étais avec le médecin. Madame Genin a posé le stéthoscope pour écouter le cœur, les poumons… », explique-t-il pas gêné d’avoir dû retirer son t-shirt devant elle. « C’est ma pharmacienne, j’ai entière confiance. Et regardez ici c’est presque comme au bloc, il y a des compresses, des ciseaux pour vous charcuter », plaisante-t-il. Christine Genin-Cossin passe le flambeau avec le sentiment d’une avancée concrète pour les malades. « Ce patient était venu me voir désespéré, parce qu’il n’avait pas de médecin traitant pour le suivre. Aujourd’hui, il incarne la joie de vivre », sourit-elle.

Pour l’instant, le process n’est pas encore abouti. L’équipe parle du service au comptoir. La titulaire envoie un sms ou un e-mail à la généraliste, salariée du conseil départemental, qui a réservé son vendredi matin à Telepharm. Elle est aussi en contact avec une dermatologue d’Alençon, un médecin libéral retraité salarié d’une association, un oncologue de Caen etc.

Un investissement limité.

Toutefois, la présidente de Telepharm sait que le process n’est pas encore totalement abouti. Mais, l’investissement est infime pour l’officine : la cotisation est de 50 €/an et le coût du matériel d’environ 1450 €. De plus, la CPAM prévoit une rémunération aux pharmaciens (10 officines participent déjà au test) de 1125 € la première année (350 €, les suivantes) et une participation forfaitaire au temps passé (entre 200 et 400 €/an). « L’idée est que cela ne coûte rien au pharmacien, qui y passe déjà beaucoup de temps », résume la titulaire. En contrepartie, avec un outil si puissant l’officine a de quoi espérer rendre un service remarquable. Et fidéliser sur une prestation de santé publique dans un désert médical !

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*Christine Genin-Cossin, titulaire de la pharmacie du Griffon au moment de notre reportage, a pris sa retraite le 1er octobre 2020. Elle est actuellement présidente de l’association Telepharm, qui met en lien des patients d’officine avec des médecins situés dans les villes alentours.