L’automesure version connectée
Avec l’émergence des nouveaux objets connectés de santé, l’automesure médicale est en train d’entrer dans une nouvelle dimension. Et offre aux pharmaciens l’occasion d’affirmer leur rôle d’accompagnement des patients.
Avant de débattre sur l’automesure connectée, il faut d’abord savoir de quoi on parle. « Sous l’impulsion des fabricants, nous assistons au rapprochement de l’automesure et du quantified self, deux cultures qui relèvent d’univers biens distincts », souligne Nicolas Postel- Vinay, médecin à l’unité d’hypertension artérielle de l’hôpital Georges-Pompidou à Paris, et fondateur du site automesure.com. Apparu au début des années 2000 aux Etats-Unis, le mouvement du quantified self est porté par des gens en bonne santé qui mesurent, via des trackers d’activité, des paramètres comme le nombre de pas, les calories dépensées, la distance parcourue, la fréquence cardiaque ou le taux d’oxygène dans le sang… « Le quantified self renvoie à l’univers du bien-être alors que l’automesure se distingue, elle, par sa finalité 100 % médicale, rappelle le docteur Eric Couhet, directeur général de Connected Mag. Elle concerne des patients atteints de maladies chroniques comme le diabète, l’hypertension ou l’asthme qui mesurent eux-mêmes leur glycémie, leur tension ou leur souffle pour les communiquer à l’équipe médicale qui les suit. »
Ce distinguo établi, les vertus de l’automesure médicale sont connues depuis longtemps. « Vingt ans de recherche ont démontré qu’elle améliore la prévention et l’observance, qu’elle permet d’adapter de manière plus fine les traitements, et qu’elle incite les patients chroniques à devenir acteurs de leur propre santé, explique Nicolas Postel-Vinay. Dans l’univers de la tension artérielle, les études montrent que l’automesure effectuée dans de bonnes conditions, est plus efficace sur le plan de la surveillance et du pronostic que des mesures ponctuelles effectuées au cabinet du médecin ou en pharmacie. »
APPLIS sur le tapis
Lorsqu’on les interroge sur les limites de l’automesure, les experts épargnent les capteurs. « Les fabricants utilisent en général des technologies éprouvées pour capter les données, assure Nicolas Postel-Vinay. Ce qui pèche souvent, c’est la qualité des applications. Pour les tensiomètres connectés, on observe par exemple un manque d’exigence dans la gestion de la pression artérielle et la restitution des mesures. Or, le savoir-faire médicoscientifique est indispensable car si une personne en bonne santé perd 1 kg, ce n’est pas grave… Chez un insuffisant cardiaque, cela peut avoir des conséquences dramatiques. »
Cette critique semble d’ailleurs avoir été entendue par les fabricants. « Visiomed fournit désormais avec son tensiomètre MyTensio une application qui a été conçue en collaboration avec la Société française de cardiologie, et qui colle aux recommandations internationales sur l’hypertension artérielle », souligne Eric CouhetDe son côté, Withings a décidé d’intégrer à son application Health Mate le logiciel Hy-Result développé par l’unité d’hypertension artérielle de l’hôpital Georges-Pompidou. Ce logiciel génère automatiquement une interprétation des résultats d’automesure de la tension artérielle, avec un protocole validé par des données scientifiques et par les recommandations de la Société européenne d’hypertension artérielle.
RÉVOLUTION pour le pharmacien
« L’enjeu pour les pharmaciens aujourd’hui, c’est de basculer sur les appareils d’automesure connectés », assure Nicolas Postel-Vinay, qui estime en revanche que les trackers d’activité n’ont pas leur place dans les officines : « Les utilisateurs préfèrent les acheter sur Internet ou dans des enseignes comme Darty et la FNAC. Le réseau officinal reste le plus légitime pour vendre des objets connectés de santé. Je rappelle d’ailleurs que les pharmacies sont depuis longtemps le premier vendeur de tensiomètres en France. » Eric Couhet va plus loin : « Si j’étais pharmacien aujourd’hui, j’installerais dans mon officine un espace connecté dans lequel je recevrais mes patients pour des entretiens digitaux, l’objectif étant de les aider à prendre en main les appareils d’automesure et à analyser les résultats. J’irais même jusqu’à leur proposer d’héberger leurs données de santé afin d’assurer un suivi qui permettrait de sécuriser l’observance. »
Pour l’entrepreneur numérique Gilles Babinet, l’automesure et la digitalisation pourraient même révolutionner le métier de pharmacien : « Des chercheurs ont montré que le développement des données de santé aurait pour conséquence de diminuer l’apport de la chimie. Les pharmaciens devront donc faire évoluer leur métier s’ils veulent s’imposer comme l’un des acteurs du parcours de soins connectés. »
ON EN PARLE
→ URGENCE
Un bracelet bien informé
Les bracelets Liva permettent de partager ses informations d’identité et de santé via un QR code unique gravé sur un bijou. Pour activer le service, il faut d’abord flasher le bracelet avec un lecteur de QR code qui a été au préalable téléchargé sur son smartphone. Il ne reste plus ensuite qu’à s’inscrire et à créer sa fiche de santé en précisant ses antécédents médicaux, ses allergies, son groupe sanguin, ses traitements médicaux, les personnes à contacter… En situation d’urgence, la personne qui vient en aide, un passant ou un secouriste, et l’équipe médicale n’auront qu’à flasher le QR code du bracelet pour voir apparaître la fiche d’identité et de santé. En vente en ligne.
Y.R.
DEMAIN
Impulsé par Les Propulseurs, un groupement d’entrepreneurs indépendants, lasantedemain.com se projette dans le futur afin d’imaginer les tendances et les métiers de demain dans un univers qui sera de plus en plus connecté. Un site utile pour nourrir sa réflexion sur le sujet.
Y.R.
11 % c’est le pourcentage de pharmaciens qui utilisent les réseaux sociaux dans le cadre professionnel, une pratique que suivent 14 % des médecins généralistes (source baromètre digital CESSIM 2015).
M.L.
L’APPLI DU MOIS
Le département pharmacie de l’université d’Angers vient de lancer, en partenariat avec la société Observia, Mon Carnet AVK. Cette application gratuite sous iOS s’adresse au 1,1 million de patients traités par un anticoagulant de la famille des antivitamines K. Elle indique dans l’agenda du téléphone, avec une fonctionnalité de rappel automatique, les dates auxquelles les examens de laboratoire (INR) doivent être réalisés ainsi que les prises quotidiennes de médicaments, avec les doses journalières à prendre. Mon Carnet AVK conserve également une trace numérisée des résultats de suivi biologique (INR) en fonction des doses de médicaments pris afin de mieux comprendre les évolutions de l’efficacité du médicament.
Y.R.
ASSURANCES
Allianz France vient de signer un partenariat avec iHealth qui permet à ses clients de bénéficier de 20 % de réduction sur les balances connectées, les oxymètres de pouls, tensiomètres et les traqueurs d’activités iHealth. Allianz entend ainsi encourager ses clients à mieux suivre leur santé au quotidien…
Y.R.
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