En France, les pouvoirs publics n’ont pas une vision de l’officine, mais deux qui, de surcroît, sont polairement opposées ! Chacune d’entre elles joue sur la double nature du métier de pharmacien, à la fois professionnel de santé et commerçant, pour exacerber l’une de ces dimensions au détriment de l’autre.
La première trouve son origine dès 2009 dans la loi Hôpital, patients, santé et territoires (HPST) avec les fameuses « nouvelles missions » rémunérées et, ensuite, le passage progressif d’une rémunération à la marge à une rémunération à l’honoraire de dispensation. Il s’agit de reconnaître le pharmacien comme un véritable acteur de soins primaires, notamment au sein des Communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS). Dernièrement, on lui a confié, par avenant conventionnel, un rôle éminent dans le développement des « télésoins » profitant que la distribution territoriale des officines est plus harmonieuse que celle des cabinets médicaux. Mais pour jouer ce rôle indispensable, encore faudrait-il sauvegarder les 21 000 officines qui nous restent et préserver en particulier celles implantées dans des zones médicalement sous-dotées. Or c’est précisément ce nombre qui est contesté par l’autre point de vue, celui de la Cour des comptes, qui le trouve excessif et qui aimerait le ramener à environ 16 000. La seconde vision de l’officine, portée essentiellement par la Cour mais aussi par l’Autorité de la concurrence, par quelques groupements, par des associations de consommateurs et par la défunte commission Attali, a comme objectif principal d’abaisser le coût de distribution du médicament en France jugé trop important. Les pharmaciens sont sommés d’être des « distributeurs efficients » avant d’être des acteurs de soins primaires. Pour cela, divers moyens sont proposés par les uns ou les autres : regrouper les officines, lever les restrictions sur la propriété du capital, constituer des groupements d’achat plus performants, réduire la dépendance aux génériques, développer le e-commerce, intensifier la concurrence sur des produits de prescription médicale facultative « démonopolisés », etc. Bref, des pharmacies moins nombreuses, plus grosses, davantage exposées à la concurrence des parapharmacies et des GMS, orientées e-commerce (click & collect, click & deliver) et ouvertes aux investisseurs extérieurs. Le contraire de l’officine de proximité.
Le paradoxe, c’est que si la première vision est politiquement dominante – elle est soutenue par les pouvoirs politiques, la Caisse nationale de l’assurance maladie et les syndicats – la seconde est économiquement à l’œuvre. Le nombre de fermetures d’officines a atteint un record en 2018, notamment les petites, celles qu’il faudrait maintenir pour assurer le maillage territorial souhaité par la première vision. Les « nouvelles missions » marquent le pas comme le montre le nombre décevant de bilans partagés de médication. En revanche, les très grosses officines progressent nettement mais dans certaines zones généralement bien couvertes médicalement. Le « modèle politique » et le « modèle économique » de l’officine divergent. C’est mortel pour le premier pourtant défendu par la profession.
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