Un boulevard !
Le marché officinal des autotests affiche une croissance insolente de près de 5 % par rapport à l’année dernière. Merci qui ? Les mauvaises habitudes alimentaires et la peur panique de la grippe A. Décryptage d’une année 2009 fébrile.
La crise ? Les acteurs du marché des autotests ne la connaissent pas. Avec 18,1 millions d’unités écoulées (+ 8,4 %) et 523,3 millions d’euros de chiffre d’affaires (+ 4,5 %), le marché officinal se porte bien. Et ce ne sont pas les fabricants de thermomètres qui s’en plaindront, La Cooper (qui représente 30 % des parts de marché du thermomètre classique), Magnien et Hartmann en tête. Le segment, qui affiche deux fois plus de ventes en 2009 qu’en 2008, reste troisième, mais sa part de marché s’élève désormais à près de 12 % (contre 8,5 % l’année précédente).
« Les ventes ont décollé à partir des mois d’août et de septembre », indique Anaïs Malterre, chef de produit sur les dispositifs médicaux et accessoires au sein de La Cooper. Dans leur cas, les commandes des pharmaciens ont augmenté de 70 % par rapport à la même période de l’année précédente. « L’explosion des ventes est due à la panique générée par le virus de la grippe A, explique Stéphanie Bapt, chef de produit chez Hartmann. Il faut avouer que les autorités n’ont pas lésiné sur la communication… » C’est ainsi que plus de 2 millions de thermomètres (tous modèles confondus) se sont vendus en 2009.
Qui dit marché en bonne santé, dit forte concurrence. Pour se différencier, face à la multiplication des acteurs, les stratégies diffèrent. Hartmann a ainsi décidé de jouer la carte technique et de sortir un nouveau produit en 2010. Autre stratégie, celle de La Cooper, qui mise sur la gamme la plus large possible avec 6 produits (dont un modèle à l’ancienne en verre et gallium, un temporal et quatre électroniques). Ce sont les thermomètres frontaux, auriculaires et temporaux qui ont dopé les ventes de 2009, équivalentes à 27 millions d’euros, la tendance étant d’aller vers des appareils non invasifs, synonymes de confort pour l’utilisateur. L’année 2009, dont les résultats reposent sur une conjoncture particulière, devrait néanmoins rester une année atypique.
Rien à voir, mais le segment leader des lecteurs de glycémie (60 % du marché en volume, 83 % en valeur) renoue avec la croissance (+4,8 % en volume et 3,7 % en valeur). « Cette croissance est corrélée à une croissance organique de la population diabétique. On parle de pandémie. La mauvaise alimentation et la sédentarité de la population sont en cause », explique Frédéric Jacquey, directeur de la division Diabète de Roche Diagnostics.
Lecteurs de glycémie à la pointe du progrès
Qu’ils soient acteurs majeurs (Lifescan et Roche Diagnostics détiennent 80 % des parts du marché) ou mineurs, à l’exemple de Ménarini (2,5 % de parts de marché), tous ont l’innovation pour credo. Avec des définitions sensiblement différentes cependant. En sortant Accu Check Performa Nano en 2009, bel objet de petit format, Roche Diagnostics a voulu contrecarrer la consonance médicale du produit et privilégier la portabilité de l’appareil. Pour Marlène Mehl, chef de produit chez Ménarini, « le marché prend la même direction que celui des téléphones mobiles. Auparavant, les critères techniques tels que le temps de mesure ou la microgoutte de sang prévalaient. Aujourd’hui, le design, le toucher voire le nom de marque importent davantage ». Convaincues que l’émotionnel fera désormais la différence, les équipes de Ménarini ont axé la communication 2010 vers un côté humain. « A chacun son style », clament les dispositifs accompagnants le lancement de Glucofix ID.
A l’opposé, chez Bayer, l’innovation est technique. Le laboratoire affiche la plus forte progression du marché en volume (15 %) et n’est pas prêt de revenir sur une stratégie qui le place leader de l’innovation depuis 2007. Les lecteurs Bayer disposent d’une électrode de correction qui permet de compenser les substances interférentes pour donner un résultat encore plus sûr. En septembre 2009, de nouvelles lancettes atténuant la douleur de la piqûre (Microlet siliconées) ont été lancées ainsi qu’un système antirebond (Microlet 2).
Bis repetita pour les tests de grossesse
Concernant les tests de grossesse, l’année 2009 ressemble à s’y méprendre à la précédente : une augmentation en volume de 5,2 % (avec 4,4 millions d’unités) et une stagnation du CA due à la forte concurrence sur les prix dont les acteurs « low cost » sont à l’origine (+ 0,5 % en valeur avec un CA de 36 millions). Clearblue reste le leader du marché avec 20,7 % de parts de marché en volume. Son premier concurrent (Giphar) arrive loin derrière avec 7 % de parts.
Le marché des tests de grossesse reste très exposé avec ses 33 marques. Pour rester le premier, « il faut innover et communiquer », juge Sylvain Pinto, chef de produit Clearblue chez Procter & Gamble. En lançant son premier test, la marque Clearblue se voulait avant-gardiste. Une position qu’elle continue de tenir. La croissance du marché repose sur l’augmentation du nombre de tests digitaux vendus. Ils expliquent plus de 40 % de la croissance. Les ventes des tests classiques, en revanche, sont en baisse.
Le segment des tests d’ovulation est le seul à afficher des données en baisse : – 1,5 % en volume et – 10,2 % en valeur. Seules 152 000 unités ont été vendues en 2009, alors que « le marché a un potentiel de 4 millions d’unités », regrette Sylvain Pinto. Même si le nombre de marques différentes sur le marché s’élève à 17, aucune ne rivalise avec Clearblue (48,5 % de parts de marché en volume et 64,4 % en valeur). « S’il y a eu moins de tests vendus, c’est parce qu’il y a eu moins de communication grand public en 2009 », avance Magalie Thomas, chef de produits home tests chez Giphar. Ce que confirme la marque leader Clearblue, qui essaie d’inverser la tendance en 2010 avec des plans de communication renforcés à la télévision et sur Internet.
Certains acteurs envisagent de se désengager de ce marché. C’est le cas de la société Sabiluc, du groupe Batteur. Romain Chavigne, chef de produits, expose la stratégie : « Les tests d’ovulation ne constituent pas notre cœur du métier. La société préfère arrêter cette activité peu créatrice de valeur ajoutée et se concentrer sur l’aromathérapie. » D’autres, à l’instar de Giphar, sont devenus de nouveaux entrants. Objectif : que leur offre commerciale soit cohérente avec leurs tests de grossesse. Ce dont se réjouit le chef de produit Clearblue, qui saute sur l’occasion pour rappeler ce constat maison : « Nous avons réalisé une étude qui montre que la pharmacie qui propose Clearblue et des marques de distributeur double son chiffre d’affaires par rapport à une pharmacie qui n’aurait qu’une marque de distributeur à proposer. »
Légère tension sur les autotensiomètres
Le marché des tensiomètres continue de croître et augmente de 4,7 % en volume par rapport aux chiffres de l’année 2008. Cela s’explique par les recommandations des cardiologues qui incitent de plus en plus les patients à prendre leur tension eux-mêmes.
Le chiffre d’affaires du marché ne suit pas la même tendance et accuse une baisse de près de 5 %. « Aujourd’hui, tous les groupements se mettent à l’autodiagnostic, constate le représentant de l’un d’entre eux. Le groupement n’a pas vocation à être leader en innovation. Le laboratoire, oui. Il défriche le marché, éduque les consommateurs. Le groupement apporte une solution moins chère d’environ 25 %. »
L’offre oscille entre les produits Omron, hauts de gamme, prescrits par le médecin, et les références plus basiques de La Cooper. Simples d’utilisation (un seul bouton), ces dernières ont vu leurs ventes s’envoler de plus de 40 % en 2009.
+ 4,5 %
Après + 3,1 % en 2008, les ventes officinales signent en 2009 un + 8,4 % en unités vendues (18,15 millions) et + 4,5 % en CA (523,34 millions d’euros).
(Source IMS Health.)
Même pas peur de Sanofi !
Le challenger Abbott, troisième du marché des lecteurs de glycémie – ce marché qui a rapporté en 2009 plus de 435 millions d’euros – attend avec intérêt la venue de Sanofi, laquelle a été annoncée pour le mois de septembre 2010.« Sur ce marché, il y a tous les jours de nouveaux entrants. Cette année, j’ai recensé cinq ou six nouveaux lecteurs. Je pense que Sanofi ne va pas être un petit joueur. Mais nous avons tous des stratégies différentes, entre ceux qui vont faire du low cost ou ceux qui vont privilégier les appareils destinés à l’hôpital », déclare Céline Aknine Gele, « marketing manager » chez Abbott Diabetes Care. Frédéric Jacquey, chez Roche Diagnostics, est prêt pour la bataille : « Les acteurs vont jouer le jeu du haut et du bas de gamme s’ils veulent être compétitifs sur le prix. Pour nous, l’innovation est notre cheval de bataille. En 2011, il va y avoir une vraie rupture technologique. Nous avons d’ailleurs fait l’acquisition de la société israélienne Medingo dans ce sens. » Il va donc y avoir du sport…
LES MEILLEURES VENTES
Bandelettes pour lecteurs de glycémie
1 One Touch Ultra
2 Accu Check Performa
3 Accu Check Go
Tests de grossesse
1 Clearblue Digital
2 Clearblue Classique
3 Elle Test
Tests d’ovulation
1 Clearblue
2 Persona
3 Easytest
Thermomètres
1 Thermoflash LX 26
2 Thermoflash auriculaire IRT4520
3 Magnien Frontal IR FR1
Tensiomètres
1 Tensoval Mobil poignet
2 Tensoval Duo brassard
3 Predictor T poignet
La loi HPST favorable aux autotests ?
Le marché très attractif des home tests devrait continuer à attirer de nouveaux acteurs. « Pour les départager, le pharmacien pourrait jouer le rôle de l’arbitre car il dépasse son métier de vendeur et détient, de plus en plus, un rôle de conseil, expose Alain Gilbert, fondateur associé de Bionest Partners, cabinet de conseil spécialisé dans les questions financières et de santé. En effet, la loi “Hôpital, patients, santé et territoires” reconnaît des missions aux pharmaciens qui vont au-delà de la seule dispensation. Le conseil pharmaceutique est reconnu comme un soin de premier recours. » Ce qui pourrait changer la donne sur de nombreux segments.
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