Surchauffe
Les compléments alimentaires n’aiguisent plus l’appétit des clients. Pour la seconde année consécutive, ce marché s’affiche en négatif. Et aggrave même son recul à 5,3 %.
Les chiffres du marché des compléments alimentaires ont de quoi inquiéter, avec une chute des ventes en unités de 3,6 %. Mais, d’une certaine façon, ils sont aussi porteurs d’une bonne nouvelle pour l’officine. Car les baisses s’enregistrent surtout en parapharmacie : – 12 % des ventes en unités et – 14,4 % des ventes en valeur. Et la pharmacie digère mieux les faiblesses de ce marché. Sur une assiette de 673,67 millions d’euros, un brillant 89,4 %, soit 602,32 millions, continue de lui revenir. Alors même que le danger de la concurrence de la grande distribution semble être écarté, le marché des compléments alimentaires reste sujet à caution et même décrié dans bien des domaines – la minceur ou la ménopause –, et continue de subir nombreuses turbulences.
La minceur principale victime
« Si nous enregistrons une involution sur les segments minceur et solaire, nous avons en revanche bien su résister et nous imposer sur certains segments, notamment les gênes urinaires avec Cyscontrol, le capillaire avec Forcapil ou encore en minéralothérapie avec notre gamme Azinc », constate Laurent Martineau, directeur marketing chez Arkopharma. Le laboratoire reste leader en sorties unitaires avec 17 % en phytothérapie et plus de 80 % de parts de marché avec les Arkogélules et les Arkofluide, et de fortes progressions de son portefeuille en aromathérapie.
Aussi, l’évolution de ce marché – très segmenté – est à différencier entre les compléments en timide progression (toniques et cheveux), et les lanternes rouges. Une nouvelle fois, la minceur perd de son tour de taille au sein de ce marché où elle enregistre la deuxième plus forte baisse à 18,5 % de son chiffre d’affaires.
Si le marché de la minceur reste le premier marché des compléments alimentaires à 136,55 millions d’euros, il a doublé sa baisse en un an après avoir subi un recul de 9 % en 2008. Comme l’analyse Pierre Lafitte, chef de produits minceur chez Arkopharma, « ce marché est saturé depuis plusieurs années. On a assisté au développement d’une offre qui a perdu le consommateur mais aussi le pharmacien : déboussolés, ne sachant pas quoi acheter ou conseiller, ils ont fini par bouder ces produits qui par ailleurs étaient porteurs de surpromesses ». Il prédit par ailleurs que « ce marché va désormais se recentrer sur des valeurs sûres et des produits efficaces dont les allégations seront vérifiées ».
Probiolog, numéro trois du marché après les deux produits de Ménophytea, se défend quant à lui de se positionner exclusivement sur la minceur et lui préfère une image médicale. « C’est le produit le plus prescrit par les gastroentérologues, favorisant l’équilibre de la flore intestinale », définit Alix Germain-Lacour, responsable du marketing éthique, en charge de Probiolog chez Mayoly-Spindler. Si la moitié de ses ventes sont effectivement issues de prescriptions médicales, l’autre moitié est constituée de rachats spontanés ou sur conseil du pharmacien. Quatre ans après son lancement, il enregistre 50 % de progression annuelle, et Alix Germain-Lacour voit l’avenir avec sérénité : « La nouvelle réglementation européenne va mener à un assainissement du marché. Il va falloir désormais prouver les allégations qui sont avancées sur l’emballage ! »
Le marché de la peau est en baisse (- 18 %) alors qu’il a été le pionnier du complément alimentaire. « Ce marché est sans doute celui qui a souffert à la fois de la crise et de la mode, mais aussi de la météo, défavorable depuis trois années consécutives », commente Nicole Mourey, chef de produits Forme et beauté chez Arkopharma, dont les deux Selenium et le Phytobronz figurent dans le peloton de tête des segments peau et solaire. Le laboratoire a d’ailleurs été le premier à lancer un complément solaire.
Mauvaise passe pour la ménopause
Dans ce contexte, il faut également noter la longévité d’Eltéans, du laboratoire Jaldes, un petit qui joue dans la cour des grands. « Depuis 19 ans que nous sommes présents sur ce marché, nous n’avons pas failli à notre positionnement de départ, celui de la recommandation par les dermatologues, ce qui nous permet d’échapper aux modes sur un marché très fluctuant », expose Dominique Barreau, directeur commercial de Jaldes. La stabilisation de ces produits est d’autant plus remarquable qu’ils subissent les assauts des cosmétiques très innovants et dont les promesses séduisent davantage les consommateurs en période de crise.
D’autant que les compléments alimentaires ont mauvaise presse. Cela se vérifie également dans les produits pour la ménopause. Depuis maintenant cinq ans, ce marché se délite, embourbé dans le débat médicoscientifique sur les produits à base d’isoflavones de soja. Seules les références revendiquant le « sans soja » ou le « sans hormone » ont pu tirer leur épingle du jeu. Sur ce créneau des « sans phytohormone », Serelys continue de surfer en tête du marché du complément alimentaire de la ménopause. Manhae, des laboratoires Nutrisanté, est parvenu à se hisser en deuxième position grâce à une progression de 11,6 %, avec 151 000 unités vendues pour un chiffre d’affaires de 3,6 millions d’euros.
A l’instar d’Evestrel, les autres produits contenant du soja ont accusé des chutes de 20 à 30 % de leur chiffre d’affaires en 2009. Ils continuent néanmoins de défendre leur réputation, comme l’affirme Jocelyn Petit, chef de produits pathologies de la femme chez Arkopharma : « Arkopharma a réalisé une étude clinique sur trois ans ayant démontré l’innocuité de Phytosoya sur le sein et l’endomètre et son efficacité sur la réduction des bouffées de chaleur ». Etude clinique ou pas, l’approche de ce marché reste délicate. Pour des raisons scientifiques. Mais aussi en termes d’image. « Même si le sujet est aujourd’hui moins tabou, qui se vante aujourd’hui d’avoir des désagréments liés à la ménopause ? », remarque Sandrine Huzé, responsable marketing chez Nutrisanté. Ce laboratoire a d’ailleurs fait le choix d’être très suggestif sur le packaging de Manhae, un produit dont la relance a profité du débat sur les phytohormones. « Nous redynamisons ce rayon, en perte de vitesse, grâce à notre coopération avec les gynécologues, notre investissement en termes de communication, notamment dans des campagnes radio et sur le point de vente, et en nous positionnant comme produit ne contenant pas de sources d’hormones », expose Sandrine Huzé. Il s’agit aujourd’hui de rassurer les femmes. L’enjeu est important d’un point de vue financier. Un demi-million d’entre elles entrent en ménopause chaque année !
Un cheveu très combatif
Dans ce contexte, la solidité du segment cheveu s’enracine d’année en année, avec en 2009 une nouvelle progression de 4,6 % de ventes unitaires supplémentaires. La progression la plus forte des compléments alimentaires ! Sa force reste toutefois toute relative puisqu’il ne représente qu’à peine 6 % du marché. Certains produits continuent de briller avec des progressions encore supérieures. C’est le cas de Forcapil, coleader en valeur avec Œnobiol. Sur ce marché, les données de ventes unitaires sont faussées par des durées de traitement allant, selon le produit, de un à trois mois. Comme l’ensemble des compléments alimentaires en tête du classement, Forcapil est promu en visite médicale, en officine et bénéficie d’actions plurimédias, points de vente et offre consommateur. La conjugaison de ces différents canaux de communication est désormais adoptée par nombre de laboratoires. Arrivés à maturité sur certaines allégations, qui flirtent avec l’indication médicale, ils renforcent leur rôle de partenaire auprès des pharmaciens en mettant à leur disposition les services nécessaires à l’animation de leur officine.
Par ailleurs, un credo domine : pour toucher sa cible avec efficacité, un complément alimentaire a besoin d’être accompagné d’un conseil officinal. Cela est particulièrement vrai alors que les laboratoires s’orientent vers de nouvelles problématiques : défenses immunitaires, troubles métaboliques et digestifs, gynécologie, fonctions cognitives ou problèmes articulaires.
– 4,1 %
En 2009, les ventes officinales de compléments alimentaires ont représenté un CA de 602,3 millions d’euros (soit – 4,1 %, par rapport à 2008), correspondant à 43,2 millions d’unités vendues (- 2,5 %).
(SOURCE IMS HEALTH.)
LES MEILLEURES VENTES
Minceur
1 Ménophytea Ventre plat, cp (30)
2 Ménophytea rétention d’eau, cp (30)
Toniques
1 Supradyn Intensia cp effervescents (30)
2 Alvityl Plus cp (40)
3 Acérola 1000 Arkopharma, cp à croquer (30)
Stress et sédatifs
1 Supradyn Magnesia, cp effervescents (30)
2 Bioptimum Mg 300+, cp (80)
3 Cyclamax, caps (60)
Cheveux
1 Forcapil Nouvelle formule, gélule (180)
2 Œnobiol Capillaire capsules antichute duo (3 x 60)
3 Vitalfan antichute René Furterer, capsules (3 x 60)
Ménopause
1 Serelys, comprimés (60)
2 Manhae, capsules (60)
3 Evestrel Jour et Nuit, comprimés (30 + 30)
Peau
1 Eltéans, capsules (60)
2 Selenium ACE comprimés (90)
3 Selenium ACE comprimés (120)
Solaires
1 Doriance solaire Nouvelle formule, capsules (2 x 30)
2Œnobiol Solaire intensif hydratant, comprimés (2 x 30)
3 Phytobronz gélules peau claire et sensible (2 x 30)