Pénuries de médicaments : en automédication aussi ?

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Pénuries de médicaments : en automédication aussi ?

Publié le 20 mars 2025
Par Christelle Pangrazzi
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À l'heure où les ruptures de stock sont de plus en plus médiatisées, Luc Besançon, délégué général de Nérès (organisme représentant l'industrie des médicaments d'automédication), apporte un éclairage nuancé sur la situation actuelle, faisant la distinction entre les différentes catégories de médicaments.

Contrairement à l’impression générale, toutes les catégories de médicaments ne sont pas égales face aux pénuries. « On voit surtout, actuellement, la plupart des pénuries concentrent sur les médicaments de prescription médicale obligatoire, notamment les antibiotiques », souligne Luc Besançon.

Les médicaments à prescription médicale facultative (PMF), couramment appelés médicaments en vente libre ou d’automédication, semblent largement épargnés par ces tensions d’approvisionnement. Selon le délégué général de Nérès, la seule exception notable récente concerne « le paracétamol pédiatrique [qui] a expérimenté il y a trois ans ou deux ans [des tensions]. » Tout en précisant immédiatement : « Désormais, il n’y a plus cette problématique. »

Les médicaments d’automédication : une chaîne d’approvisionnement plus résiliente

Cette meilleure résistance aux pénuries s’explique par plusieurs facteurs structurels. Tout d’abord, une production majoritairement locale : « 60 à 70 % des volumes de médicaments de PMF en France sont fabriqués sur le territoire national et quasiment 100 % en Europe, » affirme Luc Besançon.

À cela s’ajoute une diversification des sources d’approvisionnement en principes actifs. Bien ces derniers puissent provenir de pays hors Europe, Luc Besançon rappelle : « Dans les principes actifs, vous avez généralement 6 à 7 producteurs mondiaux sur la plupart des molécules de PMF. »

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L’absence de protection par brevet constitue également un atout majeur : ces médicaments « ne relèvent pas de brevets. Donc, n’importe quel acteur peut s’engager sur ces sujets. »

Une confirmation au niveau des classifications officielles

Le caractère moins stratégique des médicaments d’automédication se confirme également dans les listes officielles. Comme le note le délégué général de Nérès, « les textes sur les médicaments critiques au niveau européen ne présentent quasiment aucune molécule de prescription médicale facultative, à l’exception je crois, d’une vitamine et du charbon actif, » ce dernier étant principalement utilisé « pour des antidotes à des intoxications. »

Réaction face aux crises : adaptabilité et augmentation des capacités

Face aux rares tensions d’approvisionnement touchant les médicaments en vente libre, l’industrie a démontré sa capacité d’adaptation. Luc Besançon souligne : « Quelques acteurs ont augmenté leur capacité de production sur certaines molécules importantes, dont le paracétamol. »

Cette réactivité s’explique notamment par la prévisibilité relative de la demande : « Nous avons la chance, entre guillemets, d’être saisonniers. Résultat ? C’est assez prédictif. »

Le délistage : un atout potentiel contre les pénuries ?

Interrogé sur l’impact potentiel du délistage sur les risques de pénurie, Luc Besançon se montre optimiste. « Les médicaments délistés offrent une meilleure résistance aux ruptures notamment grâce à une liberté de prix. Vous avez une plus grande capacité d’ajustement en cas de hausse de prix, de vos matières premières ou de l’aluminium utilisé dans les blisters, par exemple. » Ces derniers mois, le coût de ce matériau avait augmenté de 300 % notamment en raison de la guerre en Ukraine.