LE GRATTAGE PEUT RAPPORTER GROS
Le marché des produits OTC positionnés sur la prévention et le traitement des allergies est au beau fixe. Il peut compter sur des patients, de plus en plus autonomes, qui connaissent bien leurs symptômes et les marques vendues en pharmacie.
SI LA SPHÈRE DES RÉFÉRENCES ANTIALLERGIQUES VENDUES EN AUTOMÉDICATION reste mineure au regard des produits de prescription, elle n’en est pas moins dynamique. Un chiffre significatif : les formes orales (comprimés et gélules) drivent les ventes du secteur, avec une croissance de + 12 % en valeur, en cumul annuel mobile à fin septembre 2020 (Ospharm), quand les médicaments listés progressent à hauteur de + 1,9 % (source fabricants). Traduction : les patients déjà soignés, souvent passés par la case médecin, connaissent leur(s) allergie(s) et comment la (les) traiter. A la question « Pour quelles raisons achetez-vous en pharmacie des médicaments accessibles sans ordonnance pour traiter votre rhinite allergique ? » posée par Arcane Research dans son étude de 2019*, 32 % des interrogés répondent : « Je connais bien mon problème et je sais quel type de médicaments acheter ». Parmi les autres motifs invoqués : « le conseil du pharmacien », ainsi que « le gain de temps ». L’automédication est en hausse et concerne près de 4 adultes sur 10, précise l’étude Arcane Research.
L’impact de la crise du Covid-19.
Cette catégorie de produits intéresse également les patients occasionnels, touchés par des symptômes ponctuels. Ensuite, l’habituelle saisonnalité du marché (enregistrant des pics de vente entre mars et juillet) est moins évidente et se dilue sur l’ensemble de l’année, pollution et dérèglement climatique obligent. Enfin, cette période très particulière que nous traversons, marquée par le Covid-19, a également eu un impact sur le niveau des ventes : « Il y a eu un fort report des patients, qui ne se sont pas rendus chez le médecin, sur la pharmacie où ils se sont procurés des antihistaminiques accessibles sans ordonnance », constate Nuria Colomies, directrice marketing, au sein de Zambon, partenaire du laboratoire UCB pour la commercialisation de Zyrtecset. Sans compter sur une météo au beau fixe et une augmentation de la prévention. Un grand nombre de patients essayent d’anticiper leurs crises, en se tournant vers des produits préventifs, ou en utilisant leur antihistaminique plusieurs mois de suite. Résultat : le marché des antiallergiques en automédication enregistre une progression de taille : + 11,3 %, en volume (source Iqvia).
Des marques bien implantées.
Le secteur OTC est dominé par des marques à très forte notoriété, soutenues par des communications à destination du grand public et une forte visibilité en officine. Toujours selon l’étude Arcane Research, 1 acheteur sur 4 avait en tête une ou plusieurs marques de traitement sans ordonnance contre la rhinite allergique avant d’entrer en pharmacie, soit 76 % des interrogés. Sans surprise, la première marche du podium est occupée par le laboratoire Urgo, qui dispose d’une large gamme de références couvrant l’ensemble des besoins des allergiques (prévention et traitement), dont ses deux produits star : Humex Rhume des foins à la Béclométhasone (10,4 % de parts de marché, en valeur, selon Ospharm), le seul corticoïde par voie nasale disponible en automédication, et Humex Allergie Cétirizine (9,8 % de pdm). Son concurrent direct, le laboratoire Zambon, propriétaire de Zyrtecset (UCB), la version OTC de Zyrtec, réalise avec ce seul produit, best-seller du secteur, 14,9 % de parts de marché, en valeur (Ospharm). Sa force : « Un long historique de prescription et un médicament qui s’attaque à tous les symptômes de l’allergie : nez qui coule, yeux qui piquent, urticaire… », explique Nuria Colomies.
Le succès des formes nomades.
En bonne place, le laboratoire Cooper se distingue avec son comprimé orodispersible Alairgix goût pomme (6,4 % de pdm en valeur, Ospharm). Clairement, les formes nomades, assurant une facilité de prise, marquent des points : Dans le top 10 des meilleures ventes, figurent également les comprimés à sucer Drill Allergies (Pierre Fabre HealthCare) et Rhinallergy (Boiron), un médicament homéopathique, qui se distingue par sa double indication (rhinites et conjonctivites allergiques) et qui est sans effet sédatif. Au global, la majorité des produits cible la rhinite allergique (85,1 % de pdm en valeur, Ospharm) quand certains s’inscrivent sur la prévention (9 % de pdm en valeur, Ospharm) ou sont indiqués pour le traitement des allergies, sans autre critère distinctif (5,9 % de pdm en valeur, Ospharm). Le marché est dominé par les médicaments qui pèsent de tout leur poids (91 %, de pdm en valeur, Ospharm).
La Cétirizine, molécule phare du marché.
Alors que les molécules sont bien connues des patients qui s’automédiquent, les génériqueurs composent l’autre poids lourd du secteur. Mylan, Biogaran, Arrow ou encore Sandoz, connaissent de fortes progressions (respectivement + 24,5 % et + 53,4 %, en valeur, pour les deux premiers laboratoires, selon Ospharm). Rattaché au groupe Viatris, « Mylan affiche une position de leader sur le marché de la Cétirizine, qui s’explique, notamment, par sa très bonne implantation dans 90 % des officines », justifie un porte-parole du laboratoire. La Cétirizine, en effet, s’impose plus que jamais comme la molécule phare (70,3 % des volumes écoulés, + 19 %, Ospharm) et est même devenue centrale avec l’avènement du coronavirus. Durant le premier déconfinement, les ventes de Cétirizine ont explosé, certains patients s’étant rendus directement en pharmacie acheter leur traitement habituel (sans passer chez le médecin en raison de l’épidémie). Par ailleurs, la prise d’antiinflammatoires pour le traitement des rhumes des foins a été déconseillée, en raison de leur interférence possible avec la réponse immunitaire de l’organisme face au Covid-19. Résultat : les sprays sont à la baisse (- 3,7 % de pdm en valeur, Ospharm), probablement impactés par la moindre performance du produit Humex Rhume des foins (- 12,8 %, en valeur, Ospharm). Face à la supériorité de la Cétirizine, les autres molécules du marché sont sous-représentées : Béclométhasone (10,4 % de pdm en valeur), Loratadine (6,9 %), ou encore, Cromoglicate de sodium (1,3 %).
Les solutions nasales, en traitement local.
Si les voies orales sont plébiscitées par les personnes allergiques pour leur facilité d’utilisation, les solutions nasales et gels (19,3 % de pdm en valeur, Ospharm), ainsi que les sirops et solutions buvables (une offre infinitésimale : 0,3 % de pdm en valeur), composent l’autre pan du secteur. Les solutions de sérum physiologique et d’eau de mer sont particulièrement prisées des parents pour traiter leurs enfants (40 % des traitements achetés en automédication, d’après l’étude Arcane Research). Proposée en prévention et en usage quotidien, cette sphère de produits concentre des réponses spécial allergies. Parmi les best-sellers, figurent les sprays nasaux Sterimar Nez Allergique, à l’eau de mer et enrichi en manganèse, Allergoforce, une solution hypertonique aux huiles essentielles (Pranarôm), Clariver Allergies (Cooper), à base d’eau de mer, de camomille et d’aloe vera, mais aussi des marques plus généralistes, comme Prorhinel ou Physiomer, pour les enfants. Complémentaires de cette offre, les références orientées vers la protection, à utiliser en prévention ou dès l’apparition des premiers symptômes, intègrent dans leur formule des composants filmogènes à l’effet bouclier contre les allergènes, tels les produits Sterimar Stop & Protect, à base d’acides hyaluroniques, Allergyl Spray Protection, à base de poudre de cellulose végétale et de menthe poivrée, Phytosun Arôms Allergie, Humer stop Allergies, Puressentiel Spray Nasal Protection, etc.
Le naturel, en hausse.
Les formules à base d’ingrédients naturels créent la tendance du moment. A l’absence d’effets secondaires et de contre-indication, « principaux critères de choix d’un médicament contre la rhinite allergique accessible sans ordonnance », souligne l’étude Arcane Research, s’ajoute « l’attente de naturalité », en progression. Cette demande est désormais aussi forte que la recherche d’efficacité, pointe l’étude. « Les gens se détournent de plus en plus des médicaments susceptibles d’entraîner des effets secondaires. Les formules naturelles présentent l’avantage de cibler un public large et peuvent être délivrées en conseil associé. Un patient auquel on aura prescrit de la Cétirizine pourra, par exemple, utiliser un traitement local, comme un spray nasal à la composition naturelle », indique Cécile Adant, pharmacienne chez Pranarôm. Récent et encore assez peu développé, ce segment enregistre une croissance de + 9 % sur le marché des allergies (décembre 2020, source fabricants). Pour proposer une alternative aux traitements médicamenteux, le laboratoire Urgo lançait, de son côté, en janvier dernier, un dispositif de photothérapie intranasal, sous la marque Humer, destiné plus particulièrement aux allergiques chroniques (acariens, pollens, poussière) : il est doté de deux embouts, qui émettent deux types de lumière, rouge et infrarouge, et agit au niveau des muqueuses nasales en limitant la libération de l’histamine et en réduisant l’inflammation. Si le marché étudié ne connaît pas d’innovation thérapeutique particulière, les traitements naturels et alternatifs se distinguent.
* Rhinite allergique, Prévalence, prise en charge et opportunités de développement commercial, Arcane Research, mai 2019.
+ 11,3 %8,5 M d’unités vendues
La croissance des volumes se justifie t-elle par une augmentation des personnes allergiques, dérèglement climatique et pollution obligent ? La part des génériques, notamment ceux signés Mylan, contribue à la croissance du secteur.
+ 9 %40,4 M€ de chiffre d’affaires
Dominé par les ventes d’antihistaminiques, Cétirizine en tête, le marché des antiallergiques a bénéficié en 2020 d’une météo favorable, d’une hausse de la prévention et de l’impact du Covid-19. Trois facteurs qui donnent au secteur une vraie impulsion.
Source : Iqvia, en cumul annuel mobile à fin septembre 2020.
Les topiques, dépendants des moustiques
La vente des antiallergiques topiques est majoritairement liée aux piqûres d’insectes et, principalement, aux attaques de moustiques. Sauf que l’été dernier, un mois de juillet sans infestation et l’ombre du Covid-19 (avec ses limitations de déplacements) ont généré moins de trafic en pharmacie. Résultat : le marché de la démangeaison est flat (+ 0,7 % en valeur, pour un chiffre d’affaires de 40,1 M€, en cumul annuel à fin décembre 2020, source fabricants). Antihistaminiques, aux propriétés calmantes, et dermocorticoïdes, à visée anti-inflammatoire, scindent le marché. Réunissant ces deux actions, le médicament Onctose Hydrocortisone est le produit star du secteur, donnant au laboratoire Procter & Gamble Health, également propriétaire des références Onctose, Apaisyl et Cortapaisyl, une position dominante (75,8 % de pdm, en valeur, Ospharm). « De nombreux pharmaciens ont remonté une forme de “cortocophobie”de leurs patients envers les dermocorticoïdes. En réalité, ils semblent eux-mêmes avoir intégré certains freins liés à un amalgame avec les corticoïdes par voie orale. C’est pourquoi nous les accompagnons via des formations pour favoriser le bon usage des dermocorticoïdes », explique Christelle Paty, responsable de la marque Apaisyl. Challenger du secteur, le laboratoire Cooper commercialise les marques Cortisedermyl et Sedermyl, qui lui assurent 19 % de pdm (en valeur, selon Ospharm).
76 %
des personnes interrogées connaissent une ou plusieurs marques de traitement sans ordonnance-contre la rhinite allergique, avant d’entrer en pharmacie.
Source : Arcane Research
CHIFFRES-CLÉS
TOP 5 DES LABOS
PARTS DE MARCHÉ, EN VALEUR, EN CUMUL ANNUEL MOBILE, À FIN SEPTEMBRE 2020.
Source : Ospharm
90,2 %
C’est la part, en volume, que représentent les traitements pour la rhinite allergique.
Source : Ospharm
RÉPARTITION ET ÉVOLUTION, EN VALEUR, DU MARCHÉ PAR TYPOLOGIE DE PRODUITS. EN CUMUL ANNUEL MOBILE À FIN SEPTEMBRE 2020.
Source : Ospharm
TOP 5* DES PRODUITS
PARTS DE MARCHÉ, EN VALEUR, EN CUMUL ANNUEL MOBILE, À FIN SEPTEMBRE 2020.
Source : Ospharm
1 Zyrtecset comprimé 10 mg 14,9 %
2 Humex rhume des foins pulvérisation nasale 10,4 %
3 Mylan cétirizine comprimé 10 mg 9,9 %
4 Humex Allergie cétirizine comprimé 10 mg 9,8 %
5 Alairgix cétirizine comprimé à sucer 6,4 %
30 % de la population actuelle est concernée par une allergie respiratoire, contre 3 % en 1970.
Source : Association Asthme & Allergies.
Les marques ombrelles aussi. DoliAllergie, Drill Allergie, Actifed Allergie… les marques ombrelles ont également leur référence dédiée aux allergies, s’ajoutant à l’offre spécialiste du secteur.
Zyrtecset “new look”. En 2020, le médicament leader Zyrtecset s’est doté d’un nouveau packaging, à la fois plus visible et plus attractif, s’alignant sur les codes OTC de l’allergie. De quoi encore booster ses ventes…
Traitement alternatif. Nouveau, le dispositif intranasal Humer Stop Allergies s’utilise durant les crises, mais aussi avant la saison pollinique, pour réduire signifi cativement les symptômes allergiques (éternuement, obstruction nasale, rhinorrhée, démangeaison nasale) lors de l’exposition aux pollens.
Bouclier protecteur naturel. Récent, le Spray Nasal Protection de Puressentiel prévient des symptômes de la rhinite allergique et affi che une formule 100 % naturelle : solution saline, agent fi lmogène d’origine végétale et huile essentielle bio d’eucalyptus radié.
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