GO POUR LE “ZÉRO DÉCHET” !
Poussés par des consommateurs de plus en plus réfractaires au gaspillage, les industriels et les commerçants sont contraints d’agir au plus vite pour réduire leur impact sur l’environnement. Un changement de stratégie qui va parfois jusqu’à se fixer le cap du “zéro déchet”.
Tout a commencé il y a des années par une révolte contre ces quantités de cartons et de PLV que nous envoient les laboratoires », se souvient Dominique Vaissières, titulaire avec son mari et son fils de la Pharmacie de la Tour à Castelginest (31). Labellisée Très haute qualité sociale et environnementale (THQSE) depuis le printemps 2020, il a fallu, entre autres, mettre en place une stratégie pour limiter le gaspillage. Aujourd’hui, c’est une tendance de fond, les citoyens comme les fabricants et les commerces partent à la chasse au gaspi. « Actuellement, les consommateurs exigent une attitude responsable des entreprises. C’est sous leur pression que les marques et les points de vente se sont remis à proposer des solutions “zéro déchet”. Désormais, elles sont visibles et impliquent le consommateur, comme avec le vrac », décrypte Monique Large, fondatrice de l’agence conseil en innovation Pollen TrendConsulting. Ainsi, le vrac en grandes surfaces alimentaires a trouvé une place et des réseaux de franchise spécialisés dans le vrac, tels que Day by Day, ont vu le jour. Ou encore, Biocoop a inauguré en juin 2019, son premier magasin anti-déchets… En 2021, le discours à l’unisson des experts en environnement, « le meilleur déchet est celui qui n’existe pas ! », résonne, enfin !
Adopter les bons réflexes.
Une démarche “zéro déchet” commence par un diagnostic. Il s’agit de faire le point sur ses différents types de déchets (cartons, médicaments, dasri,…), les lieux où ils sont entreposés, l’évaluation de leur origine (livreurs…). Puis, de les quantifier pour être capable d’observer l’évolution des courbes. « La boîte à outils du “zéro déchet” consiste en cinq verbes : refuser, réduire, réutiliser, recycler et retourner à la terre », résume Tristan Duhamel, fondateur de la société de conseil Déclic Ecologique, spécialiste de l’accompagnement dans la transition écologique des entreprises. Au quotidien, il existe quantité de réflexes faciles à adopter au sein même d’une équipe officinale. Ne plus distribuer de sac en plastique, mais proposer un sac lavable. Ne pas imprimer un document quand c’est possible. Interdire les gobelets en plastique en back-office et offrir un verre ou une tasse à chacun. Dès 2014, Dominique Vaissières s’est offusquée de la quantité de fax reçus chaque jour. « Très vite, nous nous sommes mis à les recevoir sur écran, et à ne les éditer qu’en cas de nécessité », se souvient la co-titulaire qui voit un double intérêt à l’informatisation : « Cette méthode facilite la pratique en plus d’éviter l’utilisation du papier ! ».
Quant on veut, on peut !
Face aux prestataires, une démarche “zéro déchet” devient moins fastidieuse au fil du temps. Tel est le constat de Dominique Vaissières qui, pour refuser les PLV, les flyers, les factures en version papier… a dû, au départ, souvent décrocher son téléphone. Aujourd’hui, elle tente de faire signer une charte à ses grossistes et fournisseurs. Le texte a été rédigé avec l’aide de La Pharmacie de la Lèze (09), également engagée, avec le soutien du Laboratoire Pierre Fabre, dans une démarche éco-responsable. « Ils s’engagent à réduire le volume et la dangerosité des déchets. La Cerp l’a signée. D’autres grossistes seraient sûrement prêts à le faire », estime la co-titulaire, qui compte ainsi sur moins de livraisons, moins de cartons… « Aujourd’hui, tout s’est amélioré. Mais, il y a encore 3 ou 4 ans, on envoyait des photos aux laboratoires pour leur montrer leurs énormes cartons quasi vides », dit-elle. Désormais, elle se réjouit de pouvoir cocher sur les bons de commandes, la possibilité de s’abonner ou pas à leur magazine, de recevoir ou pas les flyers “prix malins” etc. « Chez les grossistes, comme au sein des groupements, il n’y a plus vraiment de problème, si vous ne voulez pas telle vitrophanie, tel flux poussé, c’est possible », confie Dominique Vaissières. Et elle conclut : « Le “zéro déchet” n’est qu’une question de volonté du titulaire ». Les fabricants, aussi, ont compris que la démarche ne pouvait être que collective. Ainsi, Lamazuna, marque “zéro déchet”, se fixe pour objectif 2021 d’accompagner davantage ses fournisseurs et revendeurs, pour les embarquer dans sa démarche. « Nous souhaitons les associer et les impliquer pour que tous les maillons de la vie de nos produits soient les plus zéro déchet, écologiques et éthiques possible », explique sa chargée d’Impact Environnemental, Anne-Laure Sorraing.
Donner du sens à son référencement.
Tendre vers le “zéro déchet”, implique un référencement adapté. Certaines jeunes marques sont positionnées depuis leur naissance sur cet engagement, via le vrac, les emballages recyclés/recyclables (Lamazuna et ses lingettes lavables, Cozie et ses pots en verre consignés, etc). Au rayon hygiène, l’offre pour les menstruations a particulièrement évolué ces derniers temps. Après l’arrivée des coupes menstruelles, lavables, viennent les culottes de règles. Ces produits permettent d’éviter ou de limiter les tampons et autres serviettes, qui partent à la poubelle ou dans les égouts ! De très nombreuses marques sont désormais sur ce créneau : Blooming, Saforelle, PliM, So’Cup… Signe de l’appétence pour ce type de produits, Lamazuna a décliné son concept sous la marque The Green Emporium, à destination de la grande distribution. Au début de l’année, elle annonce être déjà référencée dans « plus de 200 magasins » comme Auchan, Système U, E.Leclerc, Intermarché et, à partir de septembre 2021, chez Monoprix. D’autres fabricants, plus anciens, revoient leur offre. Et le phénomène touche désormais de nombreux rayons. Chez Klorane, l’année 2021 sera marquée par un test de distribution en vrac dans « des flacons en verre réutilisables à l’infini ». Engagée dans une démarche à faible impact environnemental, comme son groupe Pierre Fabre, « elle va économiser 184 tonnes de plastique vierge, en passant toutes les bouteilles de shampooings en plastique recyclé dès 2021 », selon Claire Caplat, directrice de la marque. Exit aussi les étuis cartons de ces flacons, « soit 55 tonnes de cartons économisé. […] Nos tubes vont être allégés de 33 % de plastiques, nos pots de 48 % », égrène-telle. La Pharmacie du Réart à Saleilles, dans les Pyrénées-Orientales, adapte son offre au fur et à mesure, en dénichant de nouvelles gammes. « Le “made in France” est non négociable sauf exception, pour éviter l’impact du transport, soutenir l’économie locale… […] Dans la logique du “zéro déchet”, on attend au minimum un emballage recyclable », explique le co-titulaire, Cyril Stutz, qui a d’abord recruté les produits solides de la marque C’est Moi Qui l’Ai Fait et l’offre de produits d’hygiène en vrac Lab@bulles. Il y va pas à pas. De fait, “le zéro déchet” nécessite toujours un engagement fort, mais il n’est plus réservé aux seuls militants.
60 %
Des Français estiment que leur action individuelle peut contribuer à changer les choses en triant/recyclant.
Source : Observatoire de la consommation responsable 2020 de l’Obsoco et Citéo.
98 %
C’est le pourcentage de déchets produits par Weleda et revendiqués comme valorisés.
18 000 PHARMACIES
Se sont engagées dans le réseau Dastri, éco-organisme issu des industriels de santé, qui collecte les déchets d’activités de soins à risques infectieux et assimilés.
Source : DASTRI
S’ORGANISER POUR LE TRI ET LE RECYCLAGE
Comme il reste toujours quelques déchets, le tri est l’ultime étape du process. Preuve d’engagement, Sephora dispose de bornes de collecte dans lesquelles les clients peuvent déposer pots de crème, mascara, parfum… depuis septembre dernier. Du côté de la pharmacie, certains fabricants sont allés jusqu’à organiser leur propre filière auprès des pharmaciens. Exemples ? Cosmétique Active (L’Oréal) qui, avec Terracycle, collecte les emballages de cosmétiques non recyclables, toutes marques comprises, ou encore, Bioseptyl, qui fournit un collecteur pour récupérer ses brosses à dents usagées. Les officines peuvent aussi compter sur Cyclamed, qui collecte les médicaments périmés et, pour laquelle, elles doivent tenir un registre attestant de la traçabilité des produits. Bien sûr, elles bénéficient, comme les autres commerces, des filières de tri de leurs collectivités locales.
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