Freins de mâchoires
Après avoir serré les dents en début de crise où il enregistrait une chute de 1,4 % en 2008, le marché du buccodentaire tend à se stabiliser.
Alors qu’il subit une baisse globale toute relative de ses ventes à 0,6 % (- 0,2 % en valeur à 340,60 millions), avec près de 82 millions d’unités vendues, c’est plus en pharmacie que le buccodentaire manque de mordant à moins 0,8 % des ventes (- 0,5 % en valeur). En parapharmacie, en revanche, il marque une réelle avancée avec une hausse de 1,4 % des ventes, et même 3,4 % en CA. Toutefois, avec ou sans AMM, le buccodentaire reste largement distribué par l’officine qui détient 92,1 % de parts de marché en valeur (91,7 % en unités). A noter cependant l’appétit croissant de la parapharmacie qui, davantage encore que la GMS, grignote peu à peu ce marché. Les parts de la parapharmacie passent ainsi à 8,3 % (+ 1,4 %) en unités de ventes et à 7,9 % (+ 3,4 %) en CA.
La grande distribution se ressaisit
De façon générale, pharmacie et parapharmacie continuent de tirer la langue sur les segments les plus vulnérables à la concurrence des GMS (brosses à dents, produits pour dentiers et dentifrices), avec notamment une chute de 4,3 % des fixateurs pour dentiers suite à la polémique sur le zinc.
Et ce n’est pas fini. Car la voracité de la GMS dans ce domaine semble reprendre. Alors qu’elle avait subi de plein fouet un transfert des ventes vers le hard discount au début de la crise, la GMS se ressaisit avec l’appui notamment des fabricants qui se sont recentrés sur elle en lançant des produits plus conventionnels dans leurs packagings et leurs conditionnements. A titre d’exemple, Henkel, qui a longtemps misé sur son format de dentifrice en flacon tête en bas, a remis sur le marché des tubes classiques et dans la mouvance du « développement durable » pour ses trois nouvelles références Xtreme White, Xtra Cool et Complet.
Toute différente est l’approche de la vente de dentifrices en pharmacie. Arthrodont, qui devance Fluocaril 125 et 75 ml – deux autres AMM – au top-3 des dentifrices pour adultes, mise sur son statut de médicament pour se différencier de la concurrence. « Notre positionnement en officine ne repose pas sur l’action promotionnelle mais davantage sur la visibilité », décrit Thomas Drieux, responsable marketing Oral Care chez Pierre Fabre. Il croit par ailleurs au ralentissement de l’offensive des hard discounters, qui avaient vu leurs ventes augmenter de 10 % en 2008. « Le marché des consommateurs qui privilégiaient le prix a déjà été capté. Les autres, qui s’étaient tournés vers le hard discount en raison de la crise, vont revenir vers leur distributeur initial. La tendance va donc se stabiliser et, après avoir touché le fond en pharmacie, nous allons assister à un retour des consommateurs captés momentanément par la GMS mais qui restent convaincus par l’offre en pharmacie », analyse Thomas Drieux. C’est dans ce climat d’optimisme que le groupe a vu grimper ses ventes en buccodentaire de 10 % en 2009. Pierre Fabre, qui détient déjà le palmarès du groupe « brosses à dents non électriques » avec la gamme médicale Inava, vient de lancer Elgydium Diffusion, une brosse à dents disposant de la technologie AFT (Anchor Free Tufting). Cette brosse esthétique et morphologique à l’implantation de brins sans agrafes est aujourd’hui présente sur le marché de la pharmacie à plus d’un million d’exemplaires (1,90 euro en prix d’achat pour un prix de vente élevé à 3,60 euros). Elle devrait confirmer la reprise des ventes de brosses à dents en officine (+ 1,2 % en 2009) après les années noires de 2007-2008 qui avaient connu une baisse de 1,8 % en valeur selon IMS Health, et même de 18 % en volume selon Nielsen.
De fait, l’officine qui croque encore 313,64 millions d’euros dans le buccodentaire (et écoule 75 millions d’unités) a tout à gagner des recommandations des chirurgiens-dentistes et des orthodontistes. C’est le cas des dentifrices pour enfants Elmex Junior et Fluocaril Kids, par exemple, qui font preuve d’une stabilité à 0,8 % et 1,1 % de croissance en parts de marché sur un segment en baisse de 0,9 % (6,92 millions d’euros). Mais c’est surtout le cas des prescriptions de ces mêmes spécialistes et principalement le cas des traitements pour infection buccale. Eludril a cependant subi de plein fouet l’arrivée des génériques et tend, tant bien que mal, à se stabiliser. Ce médicament des laboratoires Pierre Fabre n’en continue pas moins de détenir le palmarès de cette catégorie de produits. Alodont, qui n’est pas génériqué, souffre forcément moins.
Face à ce bouleversement du marché, Hextril, qui ne compte plus aucune référence prise en charge par la Sécurité sociale, ne peut miser que sur son positionnement marketing très axé sur le curatif et les maux de la bouche. Ces traitements des infections buccales, qui constituent 44 % des ventes en buccodentaire (112,4 millions d’euros, à – 0,5 %), sont de plus en plus concurrencés par les produits d’hygiène buccale et les bains de bouche, en hausse respective de 4,4 et 2,2 %. Dans cette gamme, les deux produits leaders, Méridol bain de bouche et Elmex Sensitive, poursuivent ainsi leur percée, enregistrant respectivement une croissance de 2,8 % et de 1,5 % de leurs parts de marché. La constance de cette progression ne devrait pas faillir cette année puisque, en avril dernier, les laboratoires Gaba/Méridol détenaient 5,7 % des parts de marché en valeur contre 4,3 % en avril 2009.
L’halitose n’est plus taboue
Le recul des produits à base de chlorhexidine est évalué par certains acteurs du marché à 13 %, et ce au profit des bains de bouche dits « cosmétiques ». Le succès remporté par le relancement de Listérine, de McNeil, division santé de Johnson & Johnson, en est cette année l’une des preuves les plus éclatantes.
Plusieurs explications à cette explosion estimée, tous canaux confondus, à 40 %. A grand renfort de communications, le bain de bouche a fait son entrée sur les rayons des GMS et s’est, de ce fait, banalisé. Parallèlement, l’émergence de ce nouveau marché a contribué à lever un tabou. De plus en plus, les consommateurs prennent conscience du facteur handicapant de l’halitose dans leur vie sociale et professionnelle et n’hésitent plus aujourd’hui à en parler à leur pharmacien. C’est sur ce terrain fructueux que Méridol Halitosis s’est installé à l’automne dernier, recueillant d’emblée 0,66 % des parts de marché.
« Sur ce marché très peu développé, nous avons lancé un actif doté de trois modes d’action sur les causes et les symptômes de la mauvaise haleine », expose Sophie Michaut, responsable marketing chez Méridol/Gaba. Ce succès, tout comme celui d’Alibi (Pierre Fabre), leader du segment de l’haleine en hausse de 24 % en 2009, est d’autant plus notable que le marché des « simples » déodorants de l’haleine (1,6 % des parts de marché du buccodentaire) marque un recul de 3,3 %. Il en est de même pour les autres produits annexes pouvant être considérés comme accessoires (fils dentaires, gratte-langue, brossettes, qui accusent eux aussi une baisse similaire).
– 0,5 %
En 2009, les ventes officinales dans le domaine buccodentaire ont représenté un chiffre d’affaires de 313,6 millions d’euros (soit – 0,5 % par rapport à 2008), correspondant à 75 millions d’unités vendues (- 0,8 %).
(Source IMS Health.)
Ambiance électrique
Les diverses propositions dentaires électriques ont fait un bond formidable. Ce segment est le seul à réaliser une croissance à deux chiffres (30,5 % en valeur et 33,1 % en ventes). Procter & Gamble, au palmarès avec ses trois références Oral B Power Vitality, enregistre même une progression de 57 %. Elles portent à elles seules la croissance du marché de la brosse à dents rechargeable, estimée à 70 %. Cet engouement pour un tel produit (pour lequel il faut débourser au minimum 15 à 20 euros) peut apparaître paradoxal en période de crise. Il est en fait une réponse aux campagnes d’information menée par Procter & Gamble sur l’efficacité du brossage électrique contre la plaque dentaire. Il résulte également d’un fort travail de sensibilisation du fabricant auprès des officines. Procter & Gamble a ainsi doublé son réseau, passant de 3 000 à 6 000 pharmacies en un an. Ce segment reste cependant sous-représenté face aux autres canaux de diffusion de la brosse à dents électrique que sont les chaînes spécialisées et la GMS. Il ne contribue qu’à 10 % du volume des ventes et 2 % du chiffre d’affaires. Les pharmacies sont néanmoins identifiées par les fabricants comme dotées d’un fort potentiel de croissance, d’autant qu’elles bénéficient d’une grosse crédibilité et de la recommandation des dentistes. Ce marché de 6 millions d’euros, qui ne constitue que 1,9 % du chiffre d’affaires du buccodentaire en pharmacie et parapharmacie, ne demande donc qu’à se développer.
LES MEILLEURES VENTES
Traitement des infections buccales
1 Eludril solution
2 Alodont 200 ml
3 Hextril 1 % 200 ml
Dentifrices pour adultes
1 Arthrodont 80 g
2 Fluocaril BI 250 menthe 125 ml
3 Fluocaril BI 250 menthe 75 ml
Produits pour dentiers
1 Fixodent Pro crème fixative confort 40 ml
2 Fixodent Pro crème fixative neutre 40 ml
3 Stéradent cp nettoyants/90
Brosses à dents non électriques
1 Inava 15/100 chirurgicale
2 Inava 20/100 souple
3 Inava 7/100 postopératoire
Brosses interdentaires et accessoires
1 Gum Proxabrush R1412
2 Gum Proxabrush R1414
3 Gum Proxabrush R1614
Bains de bouche
1 Méridol 400 ml
2 Elmex Sensitive 400 ml
3 Botot Eau dentifrice 150 ml
Dentifrices enfants
1 Fluocaril Junior 7-12 ans
2 Elmex Junior 75 ml
3 Fluocaril Kids 2-6 ans
Déodorants de l’haleine
1 Alibi pastilles (24)
2 Fluocaril spray buccal
3 Spray Ricqlès atomiseur buccal 15 ml
Un petit coup sur le zinc
Le 18 février dernier, GSK Santé Grand Public a arrêté la commercialisation de ses crèmes renfermant du zinc et les a retirées du marché. Une mesure prise à titre de précaution. Appliquées en excès pendant plusieurs années, les crèmes adhésives renfermant du zinc, en partie ingéré, peuvent alors engendrer des effets indésirables comme des engourdissements, des picotements, des faiblesses dans les bras ou dans les jambes, des difficultés pour marcher ou pour garder l’équilibre ou encore des anémies. En cause : un surdosage en zinc au niveau du tube digestif, entraînant à son tour une carence en cuivre. A l’officine, les références Corega Adhérence Maximum, Corega Adhérence Maximum Fraîcheur, Corega Performance Maximum et Corega Fraîcheur, Polident Pro Soin Complet ainsi que Poligrip ont été retirées du marché.