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ALLEMAGNE : C’est tous les jours Noël !

Publié le 14 décembre 2002
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En Autriche et au Royaume-Uni les pharmaciens sont chiches. Contrairement à l’Allemagne où nos confrères gâtent aussi les médecins. Mais c’est en Belgique que les étrennes étaient les plus intéressantes… jusqu’à ce que le gouvernement s’en mêle.

En Allemagne, pour tout achat dans une officine, un petit cadeau (ours en gélatine, savon, paquet de mouchoirs en papier…) va rejoindre, au fond du sac, le sirop, le tube d’aspirine ou l’antibiotique. « Au début, c’était les échantillons. Maintenant ce sont de véritables petits cadeaux. Et gare celui qui oubliera d’offrir aux enfants les sacro-saints bonbons de dextrose ! Il se fera rapidement rappeler à l’ordre », raconte une titulaire de Limburgerhof.

Le phénomène a pris tant d’ampleur ces vingt dernières années qu’il suscite maintenant un véritable besoin chez le client. Le temps des simples cadeaux publicitaires, du type parapluies, sacs en tissu ou blocs-notes est révolu, tout comme celui du classique calendrier. Ce sont désormais des masques désincrustants, des savonnettes, des tubes de vitamine C qui atterrissent dans le panier du client, souvent sans que celui-ci s’en aperçoive.

Certes, dans un pays où le numerus clausus n’existe pas et où la concentration d’officines est particulièrement aiguë dans les centres-villes, tout pharmacien est enclin à recourir à cet instrument de marketing. Ceci d’autant plus que les pharmacies souffrent d’une réduction drastique de leur marge. Carsten Pelzer, juriste auprès de l’ABDA*, en convient : « On pourrait a priori prévoir une régression du phénomène des cadeaux proportionnelle à la baisse de la marge. Mais, parallèlement, les pharmaciens sont incités à utiliser tous les leviers du marketing pour défier la concurrence. »

« Ces cadeaux servent davantage à fidéliser la clientèle qu’à attirer de nouveaux clients », assure Diethard Grundl, directeur de la MGDA. Cette société de marketing affiliée à l’ABDA propose aux pharmaciens des produits en rapport direct avec la pratique professionnelle (sparadraps, savons…) ou avec la sécurité (brassards réflecteurs pour les enfants marqués du logo de la pharmacie).

D’autres comme le répartiteur Phoenix ou le fournisseur de matériels pour pharmacie Kress+Meinberg disposent d’une gamme plus large de cadeaux.

Publicité

Strictement interdite il y a encore trois ans, la publicité pour l’officine est aujourd’hui tolérée pourvu qu’elle se limite à la parapharmacie ou aux activités de service. Il est cependant difficile de définir la part accordée aux cadeaux dans le budget annuel moyen de 10 000 euros que consacre chaque officine allemande à sa communication.

En ce qui concerne la valeur du cadeau, le code professionnel des pharmaciens est plus précis que le nôtre : pas plus de 0,50 euro ! A deux exceptions près : le calendrier de fin d’année et les cadeaux célébrant un anniversaire de l’officine, qui peuvent atteindre 4,50 euros. Si certains pharmaciens outrepassent de toute évidence la réglementation, l’Ordre n’a à ce jour enregistré aucune plainte. Un représentant de l’ABDA se contentant de commenter : « Là où il n’y a pas de plaignant, on ne trouve pas de juge… »

Hellmuth Eiberger, titulaire de la Sonnen Apotheke, jure ses grands dieux qu’il a supprimé les cadeaux cette année : « En cette période de récession et de réduction des coûts de santé, j’ai changé de politique. » Pourtant le temps n’est pas si loin où ce pharmacien du centre-ville de Spire complétait allégrement les prescriptions de quelques menus présents qu’il glissait dans le cabas de ses clients.

L’un de ses concurrents avoue : « Nous nous trouvons à la limite de la légalité. Mais en raison de la baisse drastique de notre bénéfice, les pratiques de certains confrères nous imposent de nous plier à leur jeu. Ce n’est plus le conseil et le service qui font la différence auprès de la clientèle, mais le gel douche ou la boîte de chocolats. Qu’on ne nous parle plus de déontologie ! Nous sommes devenus de véritables épiciers… » Ce pharmacien, qui tient à garder l’anonymat, consacre plus de 2 à 3 % de son CA à ces actions publicitaires qu’il étudie attentivement. « Outre les cartes d’anniversaire à mes clients privilégiés, j’envoie chaque année depuis deux ans des cartes de voeux … accompagnées d’un bon d’achat de 5 euros. Le calendrier est devenu un standard que les clients nous réclament dès l’été. Ce qui leur faut désormais, ce sont les cadeaux inédits comme le convertisseur d’euros de l’année dernière ou, cette année, le pot de pharmacie en porcelaine rempli de sucre candis. »

L’imagination fait la différence. Les moyens financiers également. A tel point que ce titulaire considère décembre comme un mois d’investissement. « Je ne fais aucun bénéfice, tout l’argent que je gagne part en cadeaux pour mes clients. » Il a cependant bon espoir que la situation se régularise d’elle-même. « Si, comme le voudrait le gouvernement, on parvient à une libéralisation du prix du médicament, alors nous n’aurons plus besoin d’attirer la clientèle avec de la pacotille… »

* Bundesvereinigung Deutscher Apothekerverbände, organe représentant l’Ordre et le syndicat professionnel majoritaire.

Contacts : Où acheter ses cadeaux ?

Les laboratoires Nomina se sont spécialisés, grâce à la sérigraphie, dans la réalisation de petits cadeaux personnalisés et originaux (flacons d’eau de toilette, savonnettes, bougies décoratives, conditionnements de circonstance…) portant le logo ou l’en-tête de la pharmacie, en faibles quantités (commandes avec un minimum de 200 unités) et à des coûts unitaires dépassant rarement 1,50 euro.

Les laboratoires et les parfums Berdoues proposent également, à l’occasion des fêtes de Noël, des séries spéciales de petits flacons d’eaux parfumées.

Côté savonnettes, il y a les grands classiques en pharmacie : Roger Gallet, Anne de Péraudel…

Les répartiteurs, dont l’OCP, font également des offres à leurs clients.

Bic, sur son site http://www.bicgraphic-europe.com, propose de créer des produits à la marque (stylos, briquets…).