Groupements Réservé aux abonnés

Mettre en place une carte de fidélité

Publié le 19 décembre 2009
Mettre en favori

Si la méthode s’est banalisée dans de nombreux commerces, elle s’invite de plus en plus en officine. Des groupements, des enseignes, mais aussi certains pharmaciens, à titre individuel, voient dans la carte de fidélité une arme efficace pour fidéliser leur clientèle.

Face à la concurrence agressive des autres circuits de distribution, la tentation est grande d’utiliser leurs « armes » pour séduire et garder ses clients sur le segment de la parapharmacie. Une méthode consiste à proposer à une clientèle ciblée des avantages personnalisés pour récompenser sa fidélité via une carte. Banalisée dans la grande distribution et les enseignes du textile ou de l’optique, la carte de fidélité commence à franchir peu à peu la porte de la pharmacie, en excluant évidemment le médicament. Des réseaux officinaux le proposent à leurs patients de façon confidentielle, alors que le groupe PHR (avec la carte Pharmadys) et Pharmesprit affichent clairement leurs cartes de fidélité.

1. Une étude précise de la clientèle

La typologie de la clientèle intéressée par la carte de fidélité pourra être très différente d’une pharmacie à l’autre en fonction de la zone de chalandise. C’est donc au gré de l’analyse des comportements d’achat des porteurs de la carte que vous pourrez moduler les services et les animations. Celles-ci ne seront pas ciblées sur les mêmes avantages ou produits si la carte de fidélité intéresse la femme de plus de 60 ans ou la femme active de 20-40 ans. C’est pourquoi une analyse fine de votre clientèle, voire une enquête, devra permettre de cibler quelle catégorie sera séduite par une carte de fidélité.

2. Un programme d’avantages ciblés

Si la pharmacie tente, elle aussi, d’adhérer au concept de la carte de fidélité, c’est qu’elle recèle bien des avantages pour les pharmaciens. Pour Lucien Bennatan, le patron de PHR, il s’agit clairement de « fidéliser le client à un point de vente et d’augmenter le panier moyen des achats de parapharmacie ». Avec la carte Pharmadys, proposée dans les enseignes Pharma Référence et Viadys depuis bientôt un an, PHR tire un premier bilan satisfaisant. « 80 000 familles sont en possession de notre carte et leur panier moyen est actuellement 27 % plus élevé que le panier moyen français », annonce fièrement Lucien Bennatan. La carte permet, en effet, de cumuler des points donnant ensuite droit à une ristourne sur des produits de parapharmacie.

Publicité

Outre le classique cumul de points sur un point de vente ou une enseigne, une carte de fidélité peut s’élargir à tout un panel de distributeurs. Les pharmacies peuvent alors en faire partie. C’est par exemple la stratégie menée par Pharmesprit, qui conçu un label « santé et bien-être » porté par la carte. « Cela permet aux pharmacies de proposer une carte de fidélité en toute légalité, explique Mathias Raimbault, le créateur du concept qui a déjà séduit vingt officines. Nous choisissons les distributeurs qui s’engagent à respecter notre charte. Avec cette carte, les consommateurs ont accès, chez les distributeurs labellisés, à un programme d’avantages. Ils cumulent des points à chaque achat qui leur donne ensuite droit à un bon d’achat de 8 euros. » Ces clients sont même prévenus par e-mails des promotions et invités aux différentes animations mises en place chez les distributeurs, qui s’engagent sur un planning à l’année.

3. Des cartes informatisées

Pour constituer un outil de fidélisation, la carte doit pouvoir identifier son détenteur. Il faut donc la doter d’un numéro ou, mieux, d’un code à barres qui renvoie à des informations déjà enregistrées. Les plus sophistiquées sont dotées d’une piste magnétique, voire d’une puce électronique, permettant le stockage de plus nombreuses informations et l’identification automatique du détenteur. La forme prise par la carte a donc une importance capitale : elle doit permettre d’enregistrer et d’analyser des informations sur la typologie de la clientèle et ses comportements d’achat.

4. Attention à la réglementation

En matière de réglementation, les pharmaciens ne savent plus sur quel pied danser. Tout d’abord, il faut savoir que l’article R. 5053-3, stipulant qu’il « est interdit aux pharmaciens d’officine d’octroyer à leur clientèle des primes ou des avantages matériels directs ou indirects et d’avoir recours à des moyens de fidélisation de la clientèle », a été purement et simplement abrogé en 2004. Il n’empêche, l’article R. 4235-57 indique que la « publicité pour les médicaments, produits et articles dont la vente est réservée aux pharmaciens ne peut s’effectuer que conformément à la réglementation en vigueur ». Si les produits de parapharmacie, qui ne sont pas réservés à l’officine, ne sont donc pas concernés par ces interdictions, le CSP affirme que les pharmaciens doivent s’abstenir de tout acte de concurrence déloyale » ainsi que de « solliciter la clientèle par des procédés et moyens contraires à la dignité de la profession »…

En outre, le pharmacien doit respecter l’arrêté du 31 décembre 2008, applicable à tout commerce, qui fixe de nouvelles règles pour les annonces de réduction de prix. Notamment, il doit afficher les conditions tarifaires préférentielles accordées de manière sélective aux détenteurs de carte de fidélité sur le lieu de vente.

L’Ordre est contre

Interrogée sur le sujet, la section A de l’Ordre des pharmaciens se prononce en défaveur des cartes de fidélité. « L’article R. 4235-64 du Code de déontologie stipule que le pharmacien ne doit pas, par quelque procédé ou moyen que ce soit, inciter ses patients à une consommation abusive de médicaments. L’article R. 4235-22 du Code de déontologie interdit, par ailleurs, au pharmacien de solliciter la clientèle par des procédés contraires à la dignité professionnelle. Dans tous les cas, la carte de fidélité pour une officine donnée est considérée comme un procédé de sollicitation de clientèle contraire à la dignité de la profession. »

Les plus et les moins

+ Un avantage réclamé par les consommateurs.

+ Un bon outil pour déterminer les habitudes d’achat et personnaliser ses offres.

+ Un générateur de trafic.

+ Un bon vecteur de croissance du CA en parapharmacie.

– La conformité de la carte de fidélité à la réglementation (art. R. 5125-28 du CSP) reste discutable.

– Un service qui prend du temps (enregistrement et analyse des données, négociation et planification des animations avec les laboratoires partenaires).

– Un coût non négligeable (mise en place, réductions offertes).

– Une carte est mieux adaptée à des officines importantes, en zone commerciale, qu’à de petites officines de quartier.