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« Les médecins n’ont pas forcément conscience du rôle de premier recours du pharmacien »
Nicolas Fauquet est directeur scientifique et technique de Pharma Système Qualité (PHSQ). Aux côtés de Martine Costedoat, sa directrice générale, ce pharmacien a coordonné le déploiement technique de l’expérimentation Osys (Orientation dans le système de soins). Un projet qui n’aurait pas vu le jour sans concertation et construction d’un lien étroit avec les médecins.
Quelle est la genèse du projet Osys et quels sont ses objectifs ?
Osys est une expérimentation menée sur le modèle de l’article 51 de la loi de financement de la Sécurité sociale de 2018. Le projet est né en 2019 et sa mise en œuvre en Bretagne remonte à l’automne 2021. Il s’agit pour des pharmacies situées dans des zones en sous-densité médicale d’orienter vers la consultation d’un médecin, un service d’urgence ou de s’en tenir au conseil officinal dans 13 situations de premier recours bien définies.
Quel a été l’accueil des médecins ?
L’expérimentation a été proposée à l’union régionale des professionnels de santé (URPS) des médecins libéraux de Bretagne, qui représente six syndicats médicaux. Le projet a été mis en place en lien étroit avec les médecins, qui s’y sont impliqués de manière opérationnelle. Deux membres de l’URPS ont intégré le comité de pilotage. Ils ont un regard sur la communication faite au sujet de ce dispositif. Au préalable, nous sommes allés connaître les problématiques des médecins et ce qui pourrait constituer des réticences. Cette approche nous a permis de nouer un véritable lien de confiance avec les médecins qui ne s’est pas démenti en bientôt trois ans de projet.
Quelles préoccupations ont-ils exprimées ?
Nombreux sont ceux qui viennent chercher une caution médicale, que ce soit pour un arrêt de travail ou une délégation de tâches vers un autre professionnel de santé. Les médecins ont parfois à endosser des responsabilités qu’ils ne maîtrisent pas forcément et dont ils ne sont pas toujours réellement informés des contours. Cela peut les mettre dans une situation inconfortable. En outre, ils font valoir qu’ils ont besoin de pouvoir équilibrer leur exercice entre des situations cliniques complexes et d’autres qui le sont moins.
Comment perçoivent-ils l’intervention des pharmaciens ?
Les médecins n’ont pas forcément conscience du rôle de premier recours du pharmacien. Une situation de cystite se présente une à deux fois par mois en cabinet médical. En officine, c’est une à deux fois par semaine. Et le médecin n’a pas connaissance que la problématique a été résolue à la pharmacie. Dans ce dispositif, le pharmacien est facilitateur de l’accès à la consultation médicale. Les médecins doivent donc avoir confiance dans le triage réalisé à l’officine. Ils craignaient aussi que les pharmaciens sortent des lignes. Un premier bilan a établi que ceux-ci étaient respectueux des arbres décisionnels.
Comment ces arbres décisionnels ont-ils été élaborés ?
Quatre binômes médecin-pharmacien ont planché sur les 13 situations de premier recours. Ont participé un médecin urgentiste, deux généralistes et un praticien de SOS Médecins. Nous sommes partis du référentiel du netCare suisse en l’adaptant aux recommandations des autorités sanitaires françaises. Les médecins ont relevé des divergences significatives entre leur exercice et ces recommandations. Chaque binôme a proposé des adaptations, qui devaient être documentées. Il fallait construire un cadre précis pour organiser ce triage qui, rappelons-le, ne constitue pas un diagnostic. Puis une session plénière a permis de valider l’ensemble.
Avez-vous rencontré des difficultés particulières dans cette élaboration ?
La qualification de la déshydratation de la diarrhée, par exemple, a été délicate à codifier. Il y a une évaluation du niveau d’urgence qui n’est pas simple à poser par écrit. Un arbre décisionnel est sujet à interprétations. C’est pour cela qu’une formation est nécessaire pour l’utiliser. Il faut savoir pourquoi telle question est posée, ce qui est recherché à travers elle. Le niveau de formation des pharmaciens a été validé par les médecins. De même, ceux-ci ont précisé ce que devait contenir le compte rendu qu’ils attendent de la part des pharmaciens.
Quelle est la prochaine étape d’Osys ?
Le dispositif a vocation à s’étendre au niveau national. Un appel à projet a été lancé en ce sens auprès des agences régionales de santé. La seconde phase ne porte que sur six pathologies au lieu de 13 : plaies simples, piqûres de tiques, brûlures, puis également cystites, angines et conjonctivite. Elle prévoit des prérogatives renforcées pour les pharmaciens notamment en matière de délivrances de médicaments de prescription médicale obligatoire.

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