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GROUPEMENTS – Enseignes : Stop ou encore ?

Publié le 27 octobre 2001
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La constitution d’enseignes est actuellement un sujet important de réflexion au sein des groupements. Mais entre ceux qui ont décidé d’y aller à grands pas, les suiveurs bon gré mal gré et ceux qui ne sont pas convaincus du bien-fondé de cette démarche, un nouveau paysage des groupements est en train de se dessiner.

Dans un contexte où la tendance naturelle est à la concentration et où les protections réglementaires subissent une pression de plus en plus forte, les groupements cherchent la meilleure façon de faire évoluer leurs structures. Certains ont fait le choix délibéré de mettre en place une politique d’enseigne. Une révolution qui a commencé par l’adoption d’éléments identifiants communs au niveau des officines et d’une charte d’engagement vis-à-vis des clients comme du groupement.

D’autres avancent plus timidement sur ce terrain. Pour eux, il ne s’agit pas d’une évolution naturelle de leur démarche mais ils estiment qu’ils doivent se préparer à cette éventualité si elle devait arriver.

Enfin, plusieurs groupements y sont réfractaires, estimant qu’il n’y a qu’une seule enseigne : la croix verte, et qu’il existe d’autres moyens que l’image et la notoriété d’une enseigne pour continuer d’exister.

Les volontaristes

Sur le chemin de l’enseigne, Forum Santé et Plus Pharmacie ont historiquement quelques longueurs d’avance. Depuis toujours, une des conditions d’entrée chez Forum santé est d’accepter de se ranger sous une bannière sans pour autant perdre son indépendance. « L’enseigne, définit François Leyravaud, c’est un comportement des adhérents pour obtenir une certaine cohérence d’action, défendre une certaine notion du service rendu au client, adopter une façon de travailler… » Sur 2001, Forum Santé a changé ses éléments d’identification et donné un nouveau souffle à sa communication. Giphar, le plus ancien des groupements, veut lui aussi fédérer ses troupes derrière une enseigne commune et travaille sur une identification forte de son réseau, avec un nouveau logo et une identification externe et interne du point de vente. « La politique d’enseigne est incluse dans la charte d’engagement Giphar », rappelle Bernard Bourgois, son président. Cette mise sous bannière, – « et non ce clonage », tient-t-il à préciser – est possible de deux façons : la formule a minima, le kit d’identification, ou le réagencement global de l’officine selon le cahier des charges défini par Giphar. Depuis la présentation du concept lors du congrès de Toulouse, en octobre 2000, « nous avons pris du retard dans la mise en place », confesse Bernard Bourgois. Seuls une trentaine d’adhérents sont équipés à ce jour. Mais depuis le congrès de Saint-Malo (octobre 2001), les choses semblent s’accélérer.

Les préparatifs de l’enseigne, chez Giropharm, se font également en douceur. « Le point de départ a été la réalisation d’une enquête auprès des consommateurs pour savoir quels services ils attendent », rappelle Pierre Austruy, son nouveau président. Partant de là, des critères de qualité ont été définis, auxquels doivent satisfaire les adhérents. « Nos conseillers et animateurs commerciaux, sur le terrain, forment les adhérents sur ces services et donnent à chacun la possibilité de s’autoévaluer. » Ces conditions remplies, ils pourront alors utiliser les éléments du concept marchand, en cours de préparation, qui seront éprouvés sur quelques sites pilotes au cours du second semestre 2002.

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Aux yeux de Lucien Bennatan, président du groupement Pharma Référence, la nouvelle loi autorisant la création de holdings de pharmacies peut être une opportunité pour consolider le réseau et se protéger des investisseurs extérieurs. « Pourquoi ne pas imaginer des sociétés civiles d’investissement prenant des participations croisées dans le capital des officines et regroupant à la fois les adhérents et le groupement ? », suggère-t-il. Rappelons que Pharma Référence avance d’arrache-pied pour monter son enseigne Viadys.

Les attentistes

« Gérer, c’est prévoir, souligne Patrick Zeitoun, responsable de la communication de Pharma-6. Cette perspective oblige, qu’on le veuille ou non, à s’y préparer. » Son groupement a donc sous le coude un nom de marque déposé (Apothéka) qui est actuellement utilisé pour une ligne d’une dizaine de produits dermocosmétiques mais qui peut être utilisé à des fins d’enseigne. Un slogan – « Pharmaciens réunis, associés pour vous servir » – est également déposé. Pour l’heure, Pharma-6 s’est fixé pour priorité le développement d’un réseau interofficines basé sur la mise en commun et le partage d’outils, tels qu’un préparatoire centralisé pour plusieurs officines, un serveur informatique implanté en un seul lieu de manière à n’avoir que des écrans de terminaux dans les officines.

Autre groupement prêt à dégainer : Pharmalliance, qui réfléchit sur un schéma d’enseigne dénommé « la quatrième voie libérale », préservant indépendance financière du pharmacien et éthique professionnelle.

Les enseignes de pharmacies n’étant pas autorisées par la loi, « Evolupharm n’entend pas brûler les étapes », indique Jean-Pierre Chulot, qui privilégie pour l’instant l’expansion du groupement. Idem pour Co.Pharm.Ec qui s’est fixé un objectif de 4 000 adhérents pour pouvoir peser significativement sur le marché officinal. Ce groupement s’emploie davantage à peaufiner son offre globale de services et à se doter d’une plate-forme de distribution.

La possibilité de constituer des chaînes de pharmacies via des holdings laisse perplexe Hélène Marvillet, de CEIDO, qui doute « qu’une telle entité veuille entrer dans le capital d’une officine mal placée et peu rentable sous prétexte qu’elle appartient à une enseigne », et qui juge « le regroupement d’officines et de groupements comme une priorité plus importante et plus urgente ».

Optipharm avance également prudemment sur l’enseigne : « Ce n’est pas un impératif immédiat, affirme le président Michel Quatresous, qui n’entend pas devancer l’appel. L’enseigne n’a d’intérêt que si l’on peut communiquer dessus, or le pharmacien n’a pas le droit à la publicité. » Pour l’heure, ce groupement s’attache à évoluer vers un système plus fédérateur grâce notamment à son intranet, pierre angulaire du réseau.

Les opposants

Enfin, parmi les groupements qui ne s’y intéressent pas ou y sont carrément opposés, on peut citer les pharmaciens de Pharmaliberté/Pharmexel qui, par la voix de son nouveau leader, Philippe Didillon, ne manifestent pas une grande motivation pour l’enseigne. Pas question non plus d’architecture commune pour les officines Pharmactiv : « L’enseigne n’est pas le seul moyen pour se rendre visible auprès du consommateur, considère Marie-Laure Fron. Un réseau peut être tout aussi fort sans cela, avec d’autres signifiants et identifiants comme une politique d’homogénéisation de la qualité des services. »

IFMO et Europharmacie ont une position plus radicale. « Enseigne et ouverture du capital sont souvent liées, c’est à mon avis jouer avec le feu », estime Dominique Schmidt, d’IFMO, faisant allusion aux prises de participation par des tiers extérieurs à la profession. Ce groupement se limite à véhiculer son image auprès des consommateurs à travers son journal Pharmélia. L’opposition aux chaînes est toute aussi vive chez Jean-Luc Tomasini, d’Europharmacie, soucieux de respecter l’individualité et l’environnement du pharmacien ! « Non à une politique d’enseigne subordonnée à des engagements contractuels, oui à une politique de communication commune et fédératrice en mettant en place une motivation incitative. »

Ouverture toute !

A la question « Etes-vous favorable à l’ouverture du capital à des non-pharmaciens ? », Apsara, Evolupharm, Forum Santé, Pharma Référence et Plus Pharmacie ont répondu par l’affirmative. Les deux premiers du bout des lèvres : « En dernier recours pour le développement du groupement mais pas pour l’officine individuelle », déclare Apsara, et uniquement « entre groupements » pour Evolupharm.

Le « oui » de Plus Pharmacie est conditionné par la détention de la majorité du capital. Pour Pharma Référence, une telle ouverture est « inévitable, donc à étudier et à proposer plutôt qu’à subir ». Mais pas avec les répartiteurs « tels qu’ils sont organisés aujourd’hui en France ». En revanche, pourquoi pas des industriels de la pharmacie, d’autres groupements, voire des investisseurs qui viennent d’autres secteurs d’activités ?

Forum Santé ne ferme aucune porte. « L’acte pharmaceutique est un acte issu de l’exercice libéral, il est personnel. La structure où s’exerce cet acte peut être indifféremment publique, privée, et les capitaux peuvent provenir d’acteurs très différents. L’ouverture du capital ne peut pas être vécue comme une obligation mais comme une faculté d’exercer sa liberté d’entrepreneur », affirme son directeur général Dominique Deloison.

Les projets

Trois groupements devraient rejoindre Apsara – CEIDO et Forum Santé ont testé un concept de vente de livres – Achat en ligne, centrale d’achats et fournisseur d’accès Internet sont à l’étude chez Co.Pharm.Ec, tout comme un journal grand public chez Europharmacie – IFMO et Optipharm vont également proposer la commande en ligne à leurs adhérents – Evolupharm va créer une centrale HAD/MAD – Pharma Référence a un projet de dépositaire – Plus Pharmacie envisage la sortie d’une gamme à la marque de médicaments conseil.