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Tarification dynamique : des solutions pour aider à la fixation des prix
Avec l’inflation qui fait le yoyo et l’utilisation croissante des étiquettes électroniques, le commerce physique a de plus en plus recours aux logiciels d’aide à la fixation des prix. Désormais, les pharmacies se voient aussi proposer des solutions.
« Nous sommes capables depuis longtemps de booster l’optimisation des prix dans le voyage en ligne. Mais personne ne s’était intéressé jusque-là aux biens de consommation », lance Aurélie Noblet, chargée du digital marketing de PricingHub. C’est sur ce constat que trois anciens d’eDreams (agence de voyages en ligne) décident de créer la société TLC Solutions en 2018 et, cinq mois plus tard, la plateforme de tarification PricingHub. Auparavant, « Xavier travaillait à l’information technologie (IT), Guillaume optimisait l’algorithme du prix des billets d’avion, et Jérôme était responsable marketing », raconte-t-elle. Désormais, PricingHub mobilise une trentaine de collaborateurs, gère une vingtaine de contrats, équipe notamment le groupe Adeo (détenteur de Leroy Merlin), Fnac Darty, Carrefour en Espagne, Cdiscount… et a doublé son chiffre d’affaires entre 2021 et 2022. »
Les éditeurs français en pointe sur le pricing
Si la majorité de ses clients vient de l’alimentaire, du bricolage, et de l’équipement de la maison, PricingHub indique avoir signé un contrat sous trois mois avec un groupement de pharmacies exploitant un site internet. Le logiciel PricingHub propose deux modules principaux : un moteur de règles et une optimisation de prix basée sur l’IA et la sensibilité au prix du consommateur. Le premier sert à définir des scénarios et des ajustements de prix en fonction de différents facteurs, tels que les prix pratiqués par la concurrence, la localisation, les dates et horaires, la marge visée, etc. Le second, à partir de flux de données transmis – le catalogue de produits et l’historique des ventes –, utilise du machine learning, permet de mesurer la sensibilité au prix du consommateur, illustrée par des courbes d’élasticité, et de délivrer des conseils de définition de prix. « Nos solutions sont encore mal connues ou redoutées. Très souvent, le commerçant craint de perdre la main sur la fixation des prix. Ou simplement, par habitude managériale et vis-à-vis de sa clientèle, il tient à garder un cap sur ses prix. Dans ce cas-là, il peut aussi déléguer à notre solution la fixation des prix à l’intérieur d’un plancher et d’un plafond, précise Aurélie Noblet. Pour des produits saisonniers, des tests de quatre à six semaines sont menés en amont pour évaluer dans quelle mesure les prix peuvent varier, ce qui prépare le machine learning aux périodes de grande demande. » De plus, PricingHub peut établir un partenariat avec un prestataire pour faire de la veille concurrentielle.
Fonctionnant sur le même principe – analyse de l’historique des ventes, mesure de la sensibilité prix et aide à leur fixation –, Pricemoov a été créée en février 2016 par Pierre Hébrard, un ancien de la banque d’affaires, du trading puis de l’e-commerce. Après huit ans d’existence, l’entreprise annonce une cinquantaine de collaborateurs, près de 10 millions d’euros de chiffre d’affaires, entre 30 et 40 contrats en cours en Europe et en Amérique, et une récente levée de fonds de 10 millions de dollars. Elle travaille notamment pour la grande distribution alimentaire et la rechange automobile : Bridgestone, Speedy et Midas aux États-Unis…
Quel retour sur investissement ?
« Dans un monde où l’inflation est un sujet omniprésent, le contrôle des marges, en gardant un œil sur l’évolution des revenus, est primordial. De plus, dans les points de ventes, le nombre de références et de fournisseurs est aujourd’hui tel que les tableurs Excel ne suffisent plus à gérer les prix », argumente le président de Pricemoov. Une fois la solution installée, il reste à mesurer son efficacité. Comment savoir si l’augmentation des ventes ou des marges est due à une meilleure tarification ? « En début d’implémentation, nous relevons une batterie d’indicateurs : marge, chiffre d’affaires, écoulement des stocks… autant de données influencées par le pricing. Nous les suivons tout au long de l’année et réalisons un bilan trimestriel avec nos clients pour mesurer l’influence de Pricemoov. Et quand vous avez la marge qui bondit de quelques points, trois mois après l’implémentation, il est facile d’y voir l’impact du pricing », ajoute Pierre Hébrard, qui affirme un retour sur investissement égal à dix fois le prix de la licence pour certains de ses clients. Pricemoov fournit un monitoring des ventes, des préconisations de prix et des modèles d’élasticité établis d’après un algorithme et l’historique des ventes. La météo et la saisonnalité sont, par exemple, des facteurs qui peuvent être retenus.
Des nouvelles solutions directement sur les logiciels métiers
Créé dans le Nord et nouant, dès 2011, ses premiers contrats avec Auchan, Optimix, qui indique 6 millions d’euros de chiffre d’affaires et 40 collaborateurs en 2023, a déjà une longue expérience dans la gestion de prix. « Développée depuis 2019, notre solution est adaptée à un groupement ou a minima cinq ou six officines regroupées. Elle se décline en une suite de modules, explique Gaëtan Bizard, un technico-commercial. Nous identifions d’abord les produits de notre client, puis nous comparons les prix afin d’analyser la concurrence. Avec la cohérence de gamme, nous relions les produits entre eux afin de garder une logique lors d’un changement de prix, et que la crème X en 30 ml reste moins chère qu’en 60 ml. Le groupement définira ensuite les règles du jeu d’après une segmentation selon la typologie des officines, les régions où elles sont implantées, les produits, les concurrents… et enverra ses préconisations de prix aux adhérents, qui pourront les répercuter ou les modifier dans leurs logiciels métiers d’officine ».
Les éditeurs de logiciels métiers s’y mettent à leur tour, à l’image d’Equasens qui propose une solution parmi les plus avancées sur le marché officinal : le logiciel id. « Les algorithmes de notre logiciel métier id. traitent le parcours du produit, de l’achat à la vente. Ils analysent les différentes propositions commerciales, les profils de remises, et donnent l’opportunité d’acheter au meilleur prix de revient, affirme Raynald Martino, directeur commercial. Une fois le prix de vente fixé, id. lui indique son point mort, ses revenus, sa marge, s’agissant du produit, de la gamme, du laboratoire, ou encore du linéaire… Lors d’un changement de prix, id. peut détecter automatiquement la mise en place d’une promotion et proposer l’impression d’étiquettes de facing. Et peut aussi appliquer des règles, notamment afin de préserver la marge en cas d’augmentation des prix de revient. S’appuyant sur l’historique des ventes, le logiciel est aussi capable de prévoir la vitesse d’écoulement de la commande. Le titulaire sera alors averti d’un risque de surstock en cas de commande au prix très alléchant mais aux quantités trop importantes », ajoute Christophe Juge, responsable grands comptes. Id. peut aussi calculer des simulations de marges en fonction des prix de ventes. « Les titulaires partent très souvent du prix de revient pour prévoir leurs marges et prévisions de vente. Mais id. permet aussi de mener l’opération inverse : déterminer un prix de revient souhaitable par rapport à un prix de vente souhaité », poursuit-il. Si l’on ignore encore combien d’officines clientes exploitent ces programmes, nul doute que la gestion informatisée des prix en officine ne fait que commencer.
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