Revoilà les TFR
Après l’annonce des plans de redressement des payeurs, les réactions des syndicats de pharmaciens ne se sont pas fait attendre. Si l’heure est aux discussions, il suffirait d’un rien pour en revenir à une situation de crise : le gouvernement reparle des « TFR hauts », ce qui reviendrait à bafouer les accords sur le générique.
Les syndicats ont beau protester, rappeler aux pouvoirs publics que les pharmacies ne sont pas responsables des dépassements de l’ONDAM « soins de ville », ni en situation de supporter de nouvelles contributions sur le médicament, ils ne se font guère d’illusion sur la nature des mesures qui seront annoncées par le gouvernement début juillet. Bien décidé à ne plus laisser filer les déficits et à imposer des efforts à tous, il ne devrait pas se priver de mesures d’économies simples à mettre en oeuvre et à effet rapide. Aussi, plutôt que de pratiquer la politique de l’autruche, les syndicats regardent, dans les propositions des différents régimes sociaux (CNAMTS, RSI, MSA) concernant le médicament (voir Le Moniteur n° 2683), celles susceptibles d’être appliquées à moindre mal pour l’officine et celles qui sont inacceptables.
Effort générique et baisses des prix
« Les 60 millions d’euros d’économies sur le générique peuvent faire l’objet d’une extension de l’accord conventionnel », conçoit Pierre Leportier, président de la FSPF. Sur les baisses de prix qui doivent dégager 200 millions, les syndicats grimacent mais la pilule serait moins amère si elles restent cantonnées aux médicaments chers (PFHT #gt; 150 Û) sur lesquels la marge en taux des pharmaciens est plus faible. Attendant de voir ce qui sortira du chapeau du gouvernement, Gilles Bonnefond, secrétaire général de l’USPO, souligne que « 900 millions d’économies, c’était déjà beaucoup, mais trouver 1,4 milliard sur les soins de ville sera impossible à supporter ». Il signale que l’effort demandé à la profession ne sera pas le même selon le taux de remboursement des produits concernés par la mesure : « Si les déremboursements portent sur des médicaments remboursés à 35 %, l’effort devra être de 350 millions pour qu’il puisse rapporter 200 millions à l’assurance maladie ! » De son côté, Claude Japhet, président de l’UNPF, souligne que les baisses de prix sur les produits chers, remboursés à 100 % et en forte progression en volume, procureront le meilleur rendement, soit 100 % de bénéfices. »
Sur les 75 millions de contribution pressentis sur les dispositifs médicaux, l’USPO refuse toute ponction sur l’officine, estimant que les pharmaciens ont assez donné au travers des baisses de prix depuis deux ans.
Le retour des « TFR hauts »
Le ministère de la Santé a jeté un pavé dans la mare en faisant part, en fin de semaine dernière, aux syndicats de son intention d’établir des « TFR balais » dans les groupes génériques au taux de pénétration inférieur à 70 %. L’Etat ne pouvait pas mieux s’y prendre pour remettre le feu aux poudres, vu le respect par la profession de ses objectifs génériques 2006 et 2007, censés éviter les TFR ! « On va droit au clash, met en garde Pierre Leportier. Le TFR a toujours été vécu comme une sanction car chaque nouvelle molécule sous TFR enlève au pharmacien la possibilité d’une substitution générique. Le retour des TFR serait de nature à remettre en question les accords conventionnels sur lesquels personne ne peut rien nous reprocher. » Pour Claude Japhet, « il s’agit d’un cas de casus belli, le TFR haut est ni plus ni moins une mesure couperet ». L’Etat semble avoir la mémoire courte ou, alors, « il n’a pas tiré les leçons de 2005 ou souhaite prendre sa revanche », s’interroge Gilles Bonnefond, faisant allusion à la tentative échouée de mise en place de TFR au bout de 24 mois. « La profession est vaccinée contre les TFR hauts ou généralisés et ne se laissera pas faire, avertit-il. En revanche, nous acceptons de discuter de TFR balais pour des groupes génériques où la substitution n’est pas opérationnelle. »
Pour le ministère de la Santé, le « TFR haut » permettrait de réaliser une nouvelle économie de 60 millions venant en déduction des économies générées par les baisses de prix, qui seraient alors ramenées à 140 millions.
La généralisation du « tiers payant contre générique »
Une généralisation de cette mesure serait perçue comme une sanction par la FSPF, « pouvant avoir des conséquences très graves sur les relations avec l’assurance maladie ». L’UNPF y est aussi opposée. « Une généralisation serait suicidaire pour le marché du générique, met en garde Claude Japhet. La substitution grimperait à 95 % et, pour ne pas être victimes de discriminations, les laboratoires de marque demanderaient alors la mise en place d’un TFR généralisé. »
Entre TFR et généralisation de l’accord, l’USPO a choisi son camp. « L’extension du « tiers payant contre générique » à tous les départements par voie conventionnelle facilitera la substitution là où c’est nécessaire, considère Gilles Bonnefond. En revanche, sa systématisation n’a pas de sens. C’est au pharmacien de l’appliquer avec intelligence. » Parallèlement, l’USPO demande au gouvernement d’« optimiser le volume des molécules à substituer » en incitant à prescrire dans le Répertoire et en élargissant celui-ci aux médicaments essentiellement similaires.
Déremboursements
Pierre Leportier préfère le maintien d’un remboursement à 15 % à une suppression de la vignette ! « Le déremboursement laisse la totalité du prix du médicament à la charge de l’assuré et entraîne un risque de report des prescriptions vers une alternative remboursable, alors que la vignette orange induit un transfert de remboursement vers les complémentaires par le jeu de la concurrence. »
L’USPO fait savoir qu’elle n’acceptera pas la proposition du Régime social des indépendants (RSI) de dérembourser les antalgiques de classe 1 et les laxatifs. « Sur les antalgiques, cette mesure de poche ne rapportera rien à l’assurance maladie du fait de leurs prix bas (moins de 2 Û) et des transferts des prescriptions. Et sur les laxatifs, la décision sera politiquement lourde car elle pénalisera les personnes âgées », commente Gilles Bonnefond. D’autant que la coupe est pleine : « Le 1er janvier 2008, le déremboursement des vignettes orange nous coûtera 200 millions supplémentaires », rappelle-t-il.
Claude Japhet a moins d’états d’âme sur ce dossier : « Le gouvernement doit avoir le courage politique de dérembourser par pathologie ou par classe, sans laisser en route des niches remboursables, sinon il n’y aura pas de place pour la médication familiale. »
Au-delà des discussions sur des mesures d’économies immédiates, les syndicats souhaitent en finir avec la fixation d’ONDAM intenables et les tours de passe-passe des dépenses de l’hôpital vers les soins de ville. Pour s’affranchir d’un système pervers, Claude Japhet réclame la mise en place d’une enveloppe financière pour la pharmacie discutée à l’occasion de la nécessaire remise à plat de la MDL et d’un « ONDAM distribution » dont le taux d’évolution serait négocié chaque année.
Les prix des médicaments déremboursés flambent
La Mutualité française a dévoilé les résultats d’une étude destinée à analyser l’évolution du marché des veinotoniques, dont le taux de remboursement est passé à 15 % au 1er février 2006, et des médicaments à service médical rendu insuffisant, déremboursés en mars 2006. Verdict sans appel : les prix des médicaments déremboursés, devenus libres, ont en moyenne grimpé de 36 % entre février et décembre 2006. L’étude montre également que les médecins ont modifié leurs habitudes de prescription puisqu’ils ont massivement cessé de prescrire les médicaments déremboursés : – 50 % entre 2005 et 2006. Même motif, même punition pour les veinotoniques : leurs prescriptions ont baissé de 21 %.
Les patients, qui utilisent ces médicaments principalement lorsqu’ils leur sont prescrits, « ne se sont que faiblement tournés vers l’automédication, insuffisamment en tout cas pour compenser la baisse des prescriptions, » mentionne la Mutualité française.
Et ensuite le PLFSS 2008 !
L’immédiat, c’est le plan de redressement, le futur, c’est le PLFSS 2008 à la rentrée. Le distinguo est d’importance pour les syndicats, même si, pour Claude Japhet, les mesures immédiates auront des conséquences sur les mesures futures. Sans anticiper sur les prochaines discussions après l’été, les syndicats ont déjà indiqué que ce n’était pas aux pharmaciens de gérer sur le plan technique la « franchise médicaments » annoncée par Nicolas Sarkozy. Sur la TVA sociale, les syndicats estiment que ce dossier est du ressort du débat national et que le rééquilibrage des comptes nécessite en effet de nouvelles recettes, mais aussi une refonte de l’ALD.
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