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Comment un nom marque les esprits

Publié le 19 octobre 2002
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L’élaboration d’un nom de marque n’a rien d’un simple courant d’inspiration. Pour le médicament comme pour les autres produits de consommation, la recherche se déroule en quatre étapes majeures. Un parcours de longue haleine.

Dans un premier temps, pour imaginer le futur nom d’une marque, il s’agit d’établir le cahier des charges ou de « définir le territoire d’expression », pour reprendre la terminologie de l’agence Nomen Axopole. En compagnie du client, l’équipe cadre le contexte (positionnement du produit ou du service, vocation de l’entreprise, clientèle ciblée, caractère de la marque…). Ce travail permet d’établir la stratégie, d’orienter la création, d’informer le client sur la durée moyenne de l’opération et sur son coût. Chez Nomen Axopole, cette étape aboutit même à la proposition d’une dizaine de noms exemples.

La phase de recherche et de création. Là, l’humain et la technique sont étroitement mêlés. Des créatifs internes se concertent et cogitent ensemble. Leur réflexion est alimentée par des recherches documentaires et étoffée par l’utilisation de moyens informatiques spécialisés qui permettent la création de néologismes. Les équipes de Pierre Chanut, par exemple, disposent de logiciels de création maison, exclusifs (Nomen7, Combi, Helena), qui élargissent le champ d’investigation de la recherche par émulation lexicale ou combinaisons de mots. Les créatifs de l’agence peuvent également s’appuyer sur une banque de noms, « NOMENclature », où 60 000 noms sont classés par évocations et par secteurs d’activités. Enfin, mondialisation oblige, une base de mots internationaux, « Pangloss », fournit plus de 18 000 mots compréhensibles dans les huit principales langues européennes. A l’issue de cette étape, ce ne sont pas moins de trois à quatre mille noms qui sont créés pour un seul produit.

La sélection. Une sélection « naturelle » s’opère par le préfiltrage juridique qui permet d’éliminer les noms déjà déposés. Il s’effectue, au minimum, sur les bases de données des marques françaises, internationales et communautaires. Là, il ne reste généralement plus que 300 noms. L’évaluation linguistique des noms à vocation internationale fait même tomber les scores à une trentaine de noms.

Le contrôle et la validation. Au stade ultime de la validation, une dizaine de noms sont soumis à des tests comme l’enquête d’évocation au cours de laquelle un panel représentatif de la cible du produit est interrogé sur le résultat des recherches. Ces propositions sont également confrontées à des études sémio-linguistiques qui en objectivent les atouts et les faiblesses formels et sémantiques. Restent alors quatre à cinq noms qui vont pouvoir être soumis à l’approfondissement juridique mené par les conseils en propriété industrielle qui veilleront au dépôt final.

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Ce parcours de longue haleine est parfois simplifié par le recours au rachat de nom. En effet, « il n’est pas rare que les laboratoires se créent des portefeuilles de noms proches de celui qu’ils ont choisi pour leur produit pour occuper le terrain, commente Jean-Pierre Gauthier, directeur de l’agence Apanage. Il s’instaure alors des pratiques d’échange ou d’accord de coexistence entre les laboratoires. Une tactique beaucoup plus fréquente dans le domaine du médicament que dans celle de l’agroalimentaire. Un bon accord vaut mieux qu’un long procès en déchéance », conclut-il, saluant à l’occasion, comme ses concurrents, le fair-play de l’industrie pharmaceutique.