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UNE ARME À DOUBLE TRANCHANT POUR L’OFFICINE
Levier important de la maîtrise médicalisée des dépenses de santé depuis deux ans, la rémunération sur objectifs de santé publique (ROSP) progresse chez les médecins et l’assurance maladie compte bien accélérer l’allure. Ce qui peut aussi bien faire le bonheur que le malheur des officines.
Grâce aux mesures tarifaires et aux génériques, les dépenses de médicaments de ville ont baissé de 0,4 % à 22,6 milliards d’euros en 2013, confirmant le virage qui fut engagé sur ce poste en 2012 (- 0,8 %). Petit à petit, la France, qui reste au premier rang des dépenses de médicaments par habitant en Europe, réduit son écart avec ses voisins européens. Frédéric Van Roekeghem, directeur général de l’UNCAM (CNAM, RSI MSA), est confiant dans la poursuite de cette tendance. De toute façon, le gouvernement ne laisse pas le choix puisqu’il a annoncé un nouveau plan d’économies de dix milliards pour l’assurance maladie d’ici à 2017, qui se déclinera dans les PLFSS successifs. Pour y arriver, la CNAMTS dispose de plusieurs leviers dont la ROSP (rémunération sur objectifs de santé publique) des médecins, aujourd’hui bien engagée : le taux général d’atteinte des objectifs pour l’ensemble des médecins généralistes a progressé de 8,6 points (de 51,1 % en 2012 à 59,7 % en 2013). Quant au principe, il est bien accepté par 7 Français sur 10.
15 % des médecins déclarent avoir fait évoluer leurs pratiques
Selon le bilan dévoilé par la CNAMTS, la dynamique s’observe sur les quatre volets du dispositif ROSP touchant à l’organisation du cabinet (+ 12 points), l’optimisation des prescriptions (+ 8,2), le suivi des maladies chroniques (+ 6,6) et la prévention (+ 5,5). Seul bémol : le bilan reste hétérogène selon les départements, variant de 38 % à 67 %. « Près de 15 % des médecins ont enregistré une progression du taux d’atteinte supérieure à 10 points », signale Frédéric Van Roekeghem. Paris, la Corse et Limoges font partie des mauvais élèves, les bons se situant en Loire-Atlantique, dans l’Isère et l’Allier (Moulins), à Angoulême, La Rochelle… Peu importe ! L’Assurance maladie semble avoir gagné une bataille. Elle cite une enquête d’opinion réalisée par BVA en décembre 2013 qui « démontre que les médecins généralistes ont radicalement changé d’attitude et d’avis sur la convention médicale, lui reconnaissant maintenant un fort effet incitatif sur leur comportement ». 80 % d’entre eux déclarent même avoir fait évoluer leurs pratiques ou prévoient de le faire dans l’année qui vient.
Une douche écossaise pour l’officine
En contribuant plus activement en 2013 à l’optimisation et à l’efficience des prescriptions, les médecins font à la fois le bonheur et le malheur de l’officine d’un point de vue économique. Ils soufflent le chaud sur la profession en augmentant leurs prescriptions de génériques à l’intérieur des 5 classes thérapeutiques concernées par les objectifs de santé publique : IPP (+ 13,2 points en 2013), statines (+ 11,5 points), antihypertenseurs (+ 7,3 points), antidépresseurs (+ 1,7 point) et antibiotiques (+ 0,5 point). Mais aussi le froid. Par exemple, sur le volet de la prévention du risque d’iatrogénie médicamenteuse, la ROSP a permis de faire baisser en moins de deux ans le nombre de prescriptions d’antibiotiques de 650 000 et le nombre de patients consommant des benzodiazépines à demi-vie longue de 240 000. Conséquence : c’est un manque à gagner évident pour l’officine. Néanmoins, « on ne peut pas reprocher à nos autorités de santé de faire la chasse aux prescriptions inutiles », fait remarquer Gilles Bonnefond, président de l’USPO. Autre exemple : l’efficience des soins (qui consiste à prescrire le médicament le moins cher à efficacité équivalente) ne fait pas non plus les affaires de l’officine. On sait, par exemple, que l’aspirine est l’antiagrégant plaquettaire le plus ancien et le moins cher de sa classe.
Encouragée par la CNAM notamment au travers des lettres et visites de médecins rappelant les recommandations en vigueur, la part des patients traités par l’aspirine à faible dosage parmi les patients traités par antiagrégants plaquettaires a augmenté de près de 5 points depuis la mise en place des ROSP, pour atteindre aujourd’hui un taux de 84,4 %. En revanche, dans l’HTA, le recours aux IEC plutôt qu’aux sartans, moins économiques, enregistre une progression plus mitigée sur 2013 (+ 0,8 point). « Face à des objectifs de maîtrise médicalisée devenus inéluctables, les pharmaciens ne peuvent pas s’opposer quand les mesures sont bonnes, commente Philippe Gaertner, président de la FSPF. Les résultats des médecins nous confortent dans le fait de nous battre pour la mise en place des honoraires de dispensation déconnectés des prix et pour les faire évoluer en restant dans cette logique d’optimisation et d’efficience. »
Les gains pour l’Assurance maladie encore à évaluer
Le directeur général de l’UNCAM a indiqué qu’il était favorable à la mixité des rémunérations. Il dit aussi préférer « avoir à négocier la ROSP qui permet d’avoir une vision plus dynamique plutôt qu’une augmentation d’un euro de la consultation médicale ». Une dynamique qu’il entend accélérer en 2014 avec l’appui des agences régionales de santé (ARS) et des commissions paritaires locales. « Les ROSP sont parfaitement intégrées dans les pratiques des médecins et des pharmaciens, il faut maintenant accepter que ces modes de rémunérations prennent plus de place en tant qu’alternative au paiement à l’acte médical et à la marge de dispensation sur le médicament », souhaite Gilles Bonnefond. Sur les objectifs liés aux génériques, nos deux ROSP doivent être complémentaires et inscrits dans un accord interprofessionnel. »
En 2013, la rémunération sur objectifs de santé publique a coûté 267 M€ à l’assurance maladie et la prime perçue prochainement par les 85 187 médecins libéraux sera en moyenne de 4 003 € (5 774 € par médecin généraliste). Pour savoir si la ROSP s’autofinance, il faudra évaluer les gains générés par ce dispositif. Malgré la complexité d’une telle étude, la CNAM entend s’y atteler.
Forte baisse des dépenses des traitements des épisodes aigus
Les dépenses des médicaments des épisodes aigus (- 238 M€) ont été davantage touchées qu’en 2012 par les baisses de prix et les génériques, alors que la diminution des montants liés aux traitements des pathologies chroniques a été deux fois moindre (- 219 M€). Les médicaments de spécialités prescrites en cas de pathologies lourdes sont toujours le principal moteur de la croissance des dépenses (+ 356 M€).
Prescriptions inutiles : l’hôpital annonce 2 milliards d’euros d’économies
Alors que le gouvernement de Manuel Valls s’apprête à dévoiler un plan d’économies de 10 milliards d’euros dans la santé d’ici 2017, la Fédération hospitalière de France veut devancer les politiques. Dans un courrier adressé au Premier ministre, elle propose à l’Etat sept mesures qui, selon elle, pourraient lui rapporter 5 milliards d’euros sur cinq ans. Parmi l’une des pistes citées : la lutte contre les prescriptions inutiles, qui concernent près de 30 % des actes, pourrait à elle seule rapporter 2 milliards d’euros d’économies. Pour y parvenir, la Fédération hospitalière de France réclame la mise à disposition des données de l’assurance maladie pour repérer les anomalies de pratique et de réalisation d’actes inutiles.
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