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SALE TEMPS POUR LES GROSSISTES !
L’année a été agitée pour les répartiteurs. LA NOUVELLE MARGE EST MOINS DÉGRESSIVE MAIS LES PERTES SONT RENDUES PLUS DOULOUREUSES par la baisse de leur activité, lesquelles se répercutent sur les remises des pharmaciens et les frais de livraison. Quant aux ruptures d’approvisionnement, elles sont en hausse sans pouvoir déterminer avec précision la responsabilité des grossistes.
Le bilan de huit mois d’application de la nouvelle marge des répartiteurs est inquiétant : une perte de marge de 4,91 % après contribution ACOSS pour une baisse de CA de 1,03 % sur le médicament remboursable, avec une prévision à – 2 % à fin décembre. « En valeur, la perte est estimée entre 60 et 65 M€ sur l’année, soit plus de la moitié du résultat d’exploitation de la répartition », signale Hubert Olivier, président de la Chambre syndicale de la répartition pharmaceutique (CSRP). Le PLFSS pour 2013 va renforcer cette tendance baissière de l’activité (de – 2,5 % à – 3 %). « Nous avons au maximum trois ans pour trouver avec les pouvoirs publics des solutions pérennes pour stabiliser nos ressources, mais si rien ne change, dès 2015, c’est l’ensemble du secteur qui sera en perte », met en garde Hubert Olivier.
LES EXPORTATIONS PARALLÈLES JUGULÉES
La loi du 29 décembre 2011 relative au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé a donné aux laboratoires les moyens de contrer les exportations parallèles de médicaments en instaurant une liberté des prix pour les médicaments et produits non consommés en France et destinés à l’exportation (liste fixée par arrêté, sous réserve d’une convention tripartite passée entre l’Etat, les laboratoires et les grossistes). « En effet, les prix plus élevés de certains médicaments constatés dans les pays voisins incitaient les intermédiaires (grossistes traditionnels et shortliners) à les revendre à l’étranger, créant un risque de rupture d’approvisionnement de ces médicaments sur le marché national », explique Gilles Bonnefond, président de l’USPO. D’où les systèmes de contingentement mis en place par certains laboratoires afin de limiter les exportations parallèles de médicaments.
LES GROSSISTES TIENNENT À LEURS FRAIS DE LIVRAISON
La ministre de la Santé, Marisol Touraine, est sur la même ligne que Xavier Bertrand, son prédécesseur. Dans un courrier adressé fin août à la CSRP, elle rappelle les obligations des répartiteurs et les règles en matière de frais de livraison, étant entendu que le coût de la prestation est déjà prévu dans la marge du grossiste. Fort de ce courrier, l’USPO a demandé aux grossistes de cesser de facturer des frais de livraison, de solder les contentieux et de rembourser les pharmaciens qui ont payé indûment des frais de livraison (entre 1 500 et 1 800 € sur 10 mois).
Mais ce n’est pas si simple. La CSRP s’abrite derrière le droit commercial et le fait que les frais de livraison sont mentionnés dans les conditions générales de vente des grossistes. Devant cet imbroglio juridique, le gouvernement n’a pas encore tranché sur la licité de ces frais qui ne concernent que 1 % des livraisons.
UN DÉCRET CONTRE LES PSEUDO-RÉPARTITEURS
Le décret sur les ruptures d’approvisionnement paru au Journal officiel du 30 septembre apporte des garanties sur les conditions d’approvisionnement des répartiteurs et leurs capacités à remplir leurs missions de service public. Il charge l’Agence nationale de sécurité des médicaments et des produits de santé (ANSM) de contrôler la capacité de ces acteurs à assumer leurs responsabilités et obligations sur les territoires qu’ils ont déclarés. Le décret devrait donc clarifier la situation de certains opérateurs (shortliners) dont le statut juridique ne correspond pas à la réalité de leur activité.
La CSRP avait demandé à plusieurs reprises au ministère de la Santé d’intervenir pour faire cesser la concurrence déloyale de ceux qu’elle considère comme des « pseudo-répartiteurs ». Le décret prévoit la mise en place de centres d’appel d’urgence des laboratoires qui se substituent aux répartiteurs défaillants pour livrer en direct et sur demande les pharmaciens. Mais il ne règle pas le fond du problème en ne retenant pas le principe d’une liste de produits d’intérêt thérapeutique majeur pour lesquels un plan de gestion des pénuries doit être mis en œuvre et en n’interdisant pas l’exportation. La CSRP regrette que le gouvernement n’ait pas suivi les recommandations de l’Autorité de la concurrence à propos de la centralisation au sein de l’ANSM de l’information en matière de ruptures d’approvisionnement et du renforcement du rôle des pouvoirs publics.
Soulignant ces insuffisances ainsi que le manque de données permettant d’établir les causes réelles des ruptures, Hubert Olivier relance la nécessité de définir précisément la notion « d’intérêt thérapeutique majeur ». « Il faut se focaliser en priorité sur les traitements et les thérapeutiques les plus importants », insiste-t-il. Par ailleurs, il propose de mettre en place un comité de suivi de l’approvisionnement des officines qui aurait notamment comme mission d’évaluer les mesures prises pour éviter ou réduire les ruptures et, si celles-ci s’avéraient insuffisantes, d’en proposer de nouvelles. Enfin, il suggère d’instaurer un dispositif d’approvisionnement d’urgence des officines basé sur 26 établissements « pivots » de la répartition.
LES RÉTROCESSIONS FONT DU TORT
La pratique des rétrocessions et le recours aux centrales d’achat pharmaceutique (CAP) ou aux structures de regroupement aux achats (SRA) se sont amplifiés en 2012 sous le poids des difficultés économiques des officines et suite, aussi, au refus de certains laboratoires de travailler avec les groupements structurés. Les pharmaciens font de plus en plus appel à ces modes d’achats groupés pour les médicaments non remboursables, au grand dam des répartiteurs. Selon le cabinet d’expertise comptable Fiducial, un peu plus d’un tiers des pharmaciens ont aménagé une politique d’achat autour de la rétrocession en 2011. Un examen plus précis de ces pratiques montre que le montant moyen du CA rétrocédé représente 1,49 % du CA HT total et que la majorité des officinaux rétrocède moins de 4 % en volume de leur activité. Les officines qui pratiquent le plus la rétrocession sont les rurales (39,2 %), avec pour montant moyen 23 616 euros, soit 1,42 % de leur CA total. Elles sont suivies des officines de quartier (32,6 %), de centre-ville (23,2 %) et de centres commerciaux (5 %).
En 2012, la fin de la tolérance sur la pratique des rétrocessions entre officines va probablement contraindre un certain nombre de titulaires à s’organiser de façon plus formelle. « On crée des plates-formes d’achats supplémentaires alors que les grossistes, qui sont en surcapacité logistique, sont à même de couvrir les besoins. Multiplier les CAP et SRA, c’est se réserver des difficultés pour la suite », met en garde Emmanuel Déchin, secrétaire général de la Chambre syndicale de la répartition pharmaceutique.
LES NON-GÉNÉRIQUÉS PASSENT AU DIRECT
Malgré les tensions parfois entre les deux professions, le grossiste reste le canal d’achat prioritaire des médicaments remboursés hors génériques pour 47 % des officinaux, selon une enquête de Médian Conseil. Seulement 28 % privilégient le direct pour optimiser leurs commandes et 6 % passent par un shortliner. En volume, les grossistes concentrent encore 68,6 % des ventes des médicaments hors liste et 83,6 % des ventes de princeps (vs respectivement 71 % et 83,8 % en 2009). Leur part diminue toutefois et la progression des ventes directes des médicaments hors Répertoire est symptomatique des nouvelles habitudes de vente des laboratoires : au milieu des années 2000, ce sont les médicaments génériqués qui étaient vendus en direct, aujourd’hui ce sont d’abord les non-génériqués. « La volonté de connaître le point de vente, c’est-à-dire le besoin de transparence des flux, d’empêcher l’export et, pour les médicaments génériqués, de limiter la substitution sont les raisons d’être de ce système », explique Médian Conseil.
La limitation des achats de médicaments vignetés en direct répond au double souci des pharmaciens de conserver une bonne remise grossiste (47 % des réponses) et de ne pas affaiblir le partenaire grossiste (37 %). La tension sur les trésoreries des officines et la loi LME, qui limite les durées de paiement et de facto le montant des commandes, jouent également en faveur des grossistes (20 %).
Toujours d’après Médian Conseil, sur les achats de parapharmacie et l’OTC, les grossistes sont en perte de vitesse alors que commandes sur les plates-formes des groupements ou via les logiciels de gestion officinale progressent.
REPÈRESRuptures : Comment les pharmaciens font face ?
Selon une enquête de la FSPF réalisée en ligne de fin juillet à fin août, la situation sur les ruptures d’approvisionnement en médicaments s’aggrave. Elles concernent 83 % des pharmacies sondées et lèsent 97 % de leurs clients. Face à une rupture, les pharmaciens tentent d’y remédier en commandant auprès d’un autre grossiste (69 % des réponses), en commandant en direct (76 %), en se dépannant auprès d’un confrère (74 %) et, le plus souvent en appelant le ? prescripteur (90 %). Les ruptures d’approvisionnement portent préjudice aux patients à des degrés divers, selon l’urgence du traitement et le type de médicament concerné. Le délai de report de leur traitement s’étale d’une journée (12 %) à une quinzaine de jours (18 %), voire ? plus d’un mois pour 15 % d’entre eux.
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