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Résoudre au mieux les mésententes entre associés
Relations conflictuelles entre associés ? Incompatibilités d’humeur ? Cela fait partie des risques de l’entreprise. Aussi, mieux vaut prévoir des échappatoires avant que le torchon ne brûle.
Dans le feu du démarrage d’une association, les pharmaciens manquent souvent de temps pour tout prévoir. Conflits d’intérêts, luttes de pouvoir, mésentente… Entre associés, la lune de miel est parfois de courte durée. Or, de nombreux désaccords proviennent de petits détails. Luc Bertrand Manry, avocat au cabinet Havre-Tronchet, cite spontanément le cas d’une note de téléphone salée d’un associé qui utilisait régulièrement la ligne de la pharmacie pour appeler sa famille au Portugal.
Des statuts bien rédigés, un règlement intérieur et un pacte d’associés bien compris permettent d’anticiper les conflits, notamment sur la rémunération ou sur des prises de décisions. Mais, au-delà, il reste à affronter les relations au quotidien. Et ce n’est qu’avec le temps que l’on peut réellement se rendre compte si l’on est fait pour s’entendre. Car deux associés doivent être nécessairement sur la même longueur d’onde en termes d’investissement personnel, de sacrifices raisonnés, de vision de développement de l’entreprise. Si les associés ne sont pas d’accord sur ces points, le risque est réel de voir l’association péricliter. L’affectation des bénéfices au bout de plusieurs années peut être également un motif de discorde : l’un veut tout prélever pour des raisons d’engagements personnels, l’autre veut laisser une partie des bénéfices dans l’entreprise pour réinvestir. « Les relations se gâtent quand le changement de situation personnelle de l’un impose à l’autre une évolution de sa propre situation », explique l’avocat.
Des méthodes extrajudiciaires…
Dès lors qu’un conflit ouvert s’installe entre les associés, il est possible de recourir à des méthodes extrajudiciaires. « Les conflits entre associés résultent souvent de divergences qui aboutissent à plus ou moins brève échéance à une disparition du dialogue ou à des échanges explosifs, constate Luc Bertrand Manry. Il est donc important, dès l’apparition d’un conflit, de pouvoir rétablir les conditions d’une communication normale. » Pour cela, il est possible d’anticiper certains différends en insérant des clauses spécifiques dans le pacte d’associés :
– La clause d’arbitrage ou de médiation permet de solliciter l’aide d’un tiers, neutre et indépendant, choisi en amont par les parties. « L’Ordre des pharmaciens peut intervenir également dans la résolution d’un litige », indique cet avocat. Prévue dans les statuts ou le pacte d’associés, la clause de médiation ou d’arbitrage permet ainsi aux associés de recourir à un tiers qui tâchera de dégager une solution de compromis. « La mission de conciliation peut être attribuée à un mandataire ad hoc avant que les associés s’enferment définitivement dans un litige qui ne pourra les conduire qu’au divorce », ajoute-t-il.
– L’exclusion peut être prévue par une clause insérée dans le règlement intérieur (pour les sociétés de personnes) ou le pacte d’associés (pour les sociétés de capitaux) pour les cas où ces différentes procédures amiables mises en œuvre ne permettent pas l’apaisement du conflit. L’exclusion constitue une atteinte grave au droit de propriété. Pour cette raison, la procédure d’exclusion et ses motifs doivent faire l’objet d’une rédaction suffisamment détaillée dans le pacte d’associés pour éviter le risque de contestation. « L’efficacité d’un pacte est renforcée quand il est signé par tous les associés d’une société. Mais il n’est pas toujours aisé de prouver qu’un associé n’a pas respecté ses engagements ou a commis une faute et de faire jouer une clause d’exclusion », signale Luc Bertrand Manry.
– D’autres clauses peuvent être utilisées pour éviter les blocages entre deux associés égalitaires, telles que la clause « revolver » (voir ci-contre) ou la convention de tirage au sort pour désigner l’associé qui doit céder sa participation à l’autre à un prix acceptable et accepté par les deux parties. « Ces clauses sont efficaces si les deux associés ont les mêmes facultés contributives et financières dans la société. »
… et judiciaires pour résoudre les conflits
Il est impossible de prévoir toutes les solutions à un conflit entre associés dans les statuts. L’intervention des tribunaux est parfois indispensable. « Ce cas de figure est extrêmement rare », souligne l’avocat. Lorsqu’une crise affecte la gestion d’une entreprise, avec le risque de la paralyser, un administrateur provisoire peut être nommé. La procédure de désignation est très rapide et ne prendra que quelques jours. Le rôle de cet administrateur provisoire est de se substituer au gérant majoritaire (SELARL), au président (SELAS) ou au conseil d’administration (SELAFA). Il a alors les pleins pouvoirs pour prendre les décisions dans l’intérêt des associés. Cela peut aboutir à une transaction – moyen efficace de régler la difficulté – voire à l’exclusion d’un associé dans le cas d’une faute grave. Au pire, il peut être décidé de dissoudre la société si des motifs suffisamment importants le justifient.
« A ce stade extrême de la judiciarisation du conflit, les associés ne cherchent plus une solution mais plutôt à avoir la peau de l’autre », précise Luc Bertrand Manry. L’issue sera souvent financièrement désastreuse pour les deux parties : « Le juge ayant prononcé la dissolution, les parts de l’entreprise deviennent alors un bien indivis. Chaque partie peut demander la vente aux enchères du fonds. »
Désenchanté
Une mauvaise sortie d’association est naturellement vécue comme un échec. Certains confrères sont désenchantés et préfèrent repartir seuls. « S’associer, c’est intéressant en début ou en fin de carrière, moins en maturité professionnelle, car c’est une perte de liberté difficile à accepter », c’est le point de vue de Pierre, titulaire d’une pharmacie qu’il a repris en solo après une expérience en association qui a mal tourné.
Des clauses pour éviter le pire
• La clause de retrait organise un départ volontaire.
• La clause de sortie peut être liée aux résultats économiques. « S’ils sont nettement en deçà des prévisionnels établis ou si la marge de l’officine est exceptionnellement basse, les associés sont tenus de se séparer et de vendre le fonds », indique Luc Bertrand Manry, avocat.
• La clause revolver permet à l’un des associés de proposer à l’autre de lui céder sa participation. Si l’autre associé refuse, il est alors réputé vendeur de sa propre participation aux conditions de prix proposés par son associé. Inversement, il peut aussi exister le cas d’un associé qui propose un prix pour l’acquisition de ses propres actions par son associé. En cas de refus, il est tenu d’acquérir les actions de ses associés au même prix.
Recommandations
• Il est toujours préférable d’accepter de sortir soi-même de l’officine en vendant ses parts plutôt que de laisser la société être placée sous administrateur provisoire aux fins de dissolution.
• Choisir des conseillers neutres (avocat, expert-comptable, notaire…), c’est-à-dire sans lien avec l’un ou l’autre des associés.
• Eviter l’immixtion des conjoints dans l’affaire, c’est un des facteurs numéro un de mésentente entre associés.
• Il faut pouvoir se parler en cas de problème, avant que les choses ne dégénèrent. « L’approbation des comptes annuels de la société doit être l’occasion de consulter un tiers qui pourra prévenir ou déminer un litige qui couve », recommande Luc Bertrand Manry.
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