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MARGES ARRIÈRE : « Non à un taux maximal unique »
D’un côté, les pouvoirs publics demandent aux pharmaciens d’officine une implication totale dans le générique. De l’autre, ils entendent encadrer encore plus la coopération commerciale. Est-ce compatible ? Hugues Villey, avocat, fait le point pour « Le Moniteur ».
« Le Moniteur » : Quel type d’encadrement les pouvoirs publics peuvent-ils mettre en place sur les marges arrière ?
Hugues Villey : Il est question de plafonner le montant moyen pondéré de remises lié à ces accords commerciaux sur les commandes directes passées aux génériqueurs à environ 15 % dans les deux ans à venir. La baisse en pourcentage des marges arrière devant s’opérer de façon progressive, en paliers successifs étalés.
Peut-on encadrer les coopérations commerciales par voie conventionnelle ?
Un code ou une charte de bonnes pratiques commerciales correspond assez bien à toutes les tentatives conjointes d’autorégulation des excès de coopération commerciale vues ici et là entre industriels et distributeurs. Cette démarche, à l’initiative du GEMME et des syndicats de pharmaciens, n’est pas sans rappeler l’accord Industrie/Commerce de 1989 visant à établir des normes conventionnelles de volumes de coopération admissibles. Le problème d’un engagement contractuel, c’est qu’il n’engage que… les parties signataires. Le risque, c’est qu’il soit donc rapidement dépassé et peu coercitif face une dynamique de marché très forte du générique.
Un code de bonnes pratiques n’a donc aucune chance d’aboutir…
En réalité, je ne crois pas à la seule mise en place d’un tel code qui, aux yeux de la DGCCRF, est assimilable à une entente contraire au droit de la concurrence. En revanche, il peut éclairer le législateur sur les raisons des coopérations commerciales en pharmacie et le guider dans la rédaction d’un texte de loi clair et suffisamment acceptable pour que l’ensemble des opérateurs y souscrive et qu’il ait des chances d’être appliqué. En outre, un code permettra de préciser la nature des services de coopération commerciale, la façon de les valoriser, leur fréquence d’exécution, la nature des outils de contrôle de réalisation desdits services…
Dans ces conditions, la solution législative vous paraît-elle plus adaptée ?
Les lois Sapin, Galland et NRE se sont succédé pour donner plus de corps à la coopération commerciale et encadrer les marges arrière. Cependant, il est économiquement irréaliste de vouloir fixer un taux maximal unique de coopération commerciale et parvenir à réguler d’avance toutes les hypothèses qui peuvent apparaître demain en matière de prestations de services. On ne peut pas en effet empêcher industriels et distributeurs de trouver de nouvelles idées et de les mettre en oeuvre. En ce domaine, les groupements disposent d’une force de frappe sans commune mesure avec les pharmaciens individuels. A l’inverse, légiférer branche par branche ou entreprise par entreprise aboutirait à des systèmes arbitraires où le remède pourrait se révéler pire que le mal.
Quelles autres solutions pourrait-on, selon vous, envisager ?
Une autre façon de traiter le problème consisterait à traquer l’anomalie de surcroît de rémunération. Pour ce faire, on pourrait inclure la marge globale de l’officine sur le remboursable (marges après remises sur les ventes plus marges arrière sur les services) dans l’assiette des éléments de calcul pris en compte dans le plafonnement de la marge au-delà duquel le surplus serait restitué à l’Etat. Ainsi, une évolution de taux de marge importante du pharmacien, au-delà du plafond fixé, conduirait à s’interroger sur la réalité de la coopération commerciale. En effet, pour masquer une fausse coopération ou une rémunération disproportionnée par rapport au service rendu, le pharmacien pourrait être tenté de majorer les charges liées à l’exécution de ce service. Cependant, force est de reconnaître qu’en pharmacie ce type de charges est faible compte tenu de la nature des services rendus. En outre, cette piste ne serait pas sans poser des difficultés sur un plan purement politico-syndical.
On pourrait aussi envisager un prélèvement à la source avec suivi et déclaration obligatoire à la charge de l’industriel en cas de dépassement du taux limite de coopération admissible. Celui-ci serait tenu d’indiquer à l’administration l’identité des bénéficiaires et le montant de ces « coopérations à risque ». En effet, tout dépassement pourrait jeter la suspicion et motiver un contrôle ciblé. Industriels et pharmaciens devraient alors justifier le dépassement. Ce système rendrait la situation beaucoup plus visible pour les pouvoirs publics au regard de la masse importante des accords de coopération commerciale passés. En fait, en ne dépassant pas le taux, les acteurs achèteraient leur tranquillité.
Une fois la loi en vigueur, les contrôles et les sanctions en cas d’infraction risquent-ils d’être plus sévères ?
Après un temps d’adaptation, les contrôles de la DGCCRF vont reprendre. L’heure est venue pour les pharmaciens de prendre pleinement conscience des risques qu’ils encourent en considérant les marges liées à la coopération commerciale comme une remise de plus proposée par les laboratoires. Ils doivent aujourd’hui évoluer vers des relations plus construites avec leurs partenaires et se sentir concernés par les prises de risque. En cas de condamnation, la coresponsabilité des acteurs est engagée et les amendes infligées ne seront plus de principe, mais dissuasives par leur montant, tant pour les sociétés que les personnes physiques. Pour se mettre à l’abri des contrôles et des sanctions, les pharmaciens doivent être capables par eux-mêmes de vendre et de valoriser des services, et, en cas de contrôle, de prouver que le service est réel et a bien été effectué.
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