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L’Ordre ne veut plus des SELAS
Le nombre des SELAS (SEL par actions simplifiées) a crû de 200 % en 2004. A la différence des SELARL, leurs exploitants ne peuvent pas détenir la majorité du capital de leur société. Un risque pour l’indépendance professionnelle dénoncé par l’Ordre.
Le nombre de SEL explose. Il progresse de 101 % depuis 2002, de 50 % en 2004. On en comptait 1 462 fin décembre et la tendance se maintient : 104 de plus se sont créées depuis le début de l’année 2005. Elles représentent désormais près de 6,5 % du total des officines. « Nous étions sur une croissance de l’ordre de 2,5 % chaque mois, on passe à 4 %, constate Isabelle Adenot, présidente de la section A de l’ordre national des pharmaciens. Les confrères découvrent cette forme d’exploitation, c’est une évolution importante que nous devons surveiller. » L’Ordre présentait donc mardi dernier son premier « bilan sectoriel » pour l’année 2004. D’emblée, Isabelle Adenot a voulu « casser tout ce qui est véhiculé sur les SEL ». Comprenez : l’exploitation en SEL n’est pas nécessairement synonyme de création de réseaux d’officines. « 76 % des SEL fonctionnent en vase clos, sans lien direct ou indirect avec une autre SEL. Et quand des participations croisées existent, elles sont très limitées, rarement au-delà de quatre ou cinq officines », précise Isabelle Adenot.
Le pharmacien exploitant une SEL prend une participation dans une ou deux SEL extérieures et parfois sa propre SEL, personne morale, prend des participations dans deux autres SEL. Quant aux réseaux constitués de SEL « en cascade », dans lesquels une SEL accueillant les participations d’autres SEL participe elle-même au capital d’une ou plusieurs SEL, et ainsi de suite, on en compterait seulement « une petite dizaine ». Le plus grand réseau agrégerait tout de même trente officines ! « Géographiquement, ces réseaux regroupent des officines de communes limitrophes le plus souvent, parfois de départements limitrophes, très rarement d’autres régions, remarque Isabelle Adenot. Une pharmacie de Lille qui investit dans une autre de Marseille, ça n’existe pas. Cela montre que l’objectif n’est pas seulement capitalistique, il s’agit de mettre en synergie des compétences locales. »
Les instances ordinales s’inquiètent, en fait, de l’arrivée tonitruante des SELAS (SEL par actions simplifiées) dans le paysage officinal. Depuis fin 2003, le taux d’enregistrement des SELAS est exponentiel : 188 % en 2003, 213 % en 2004. Aujourd’hui, 73 SELAS sont effectivement constituées. « Entendant le mot « simplifié », les pharmaciens sont persuadés que le montage et le fonctionnement de leur société seront plus aisés, estime Isabelle Adenot. Ils sont aussi sous l’influence d’une mode en vogue dans certains cabinets d’expertise comptable. » A la différence des SELARL dans lesquelles le capital est proportionnel au droit de vote (une part de capital égale un droit de vote) et où les associés y exerçant sont nécessairement majoritaires, les SELAS permettent de distinguer les droits de vote du capital. Si ces associés détiennent dans tous les cas plus de 50 % des droits de vote, leur part du capital peut être réduite à la portion la plus congrue : une part. Cette dichotomie soulève la question de l’indépendance professionnelle des pharmaciens exerçants. Détenant la majorité des droits de vote, ces derniers peuvent s’opposer en assemblée générale à toutes décisions qu’ils estiment contraires au bon fonctionnement de l’officine, mais combien de temps peuvent-ils tenir face à ceux qui détiennent le capital de leur entreprise ?
Des prête-noms ?
La seconde inquiétude de l’Ordre porte sur les comptes courants d’associés (CCA). Les associés prêtent de l’argent à leur société sous la forme d’un compte courant : une méthode de financement efficace pour faire « tourner » la société mais soumise à des règles strictes. Et notamment au respect de l’article 1 du décret du 23 juillet 1992 : le pharmacien exerçant ne peut abonder le CCA au-delà de deux fois sa participation au capital social de la société, et le professionnel investisseur ne peut y déposer plus que sa participation initiale.
« On peut créer des sociétés avec un capital social de quelques centaines d’euros. Mais chacun sait qu’une pharmacie nécessite un montant relativement important d’argent frais pour fonctionner », explique Isabelle Adenot. Aujourd’hui le capital des SEL ne peut s’ouvrir vers l’extérieur qu’à des pharmaciens : d’autres SEL, des pharmaciens titulaires exerçant ailleurs, des retraités ayant exercé pendant dix ans dans la SEL ou leurs héritiers pendant cinq ans. Or ces associés investisseurs pourraient abonder le CCA au-delà dès règles fixées par le décret avec de l’argent provenant de poches extérieures à la profession.
L’Ordre propose donc de faire évoluer la législation pour que les exploitants de SEL déposent chaque année à la section A une déclaration annuelle de conformité des CCA au décret de 1992. « Nous ne voulons pas connaître le montant des comptes d’associés, simplement s’assurer de leur légalité », assure Isabelle Adenot. En plus des statuts et règlement intérieur des SEL, la section A souhaite également disposer des pactes d’associés qui, « dans certaines de leur dispositions, vont parfois à l’inverse du règlement intérieur ». Enfin, l’Ordre souhaite « exclure la possibilité pour les professionnels investisseurs de détenir plus de la moitié du capital d’une SEL » : la fin des SELAS. « Notre rôle est de faire respecter l’indépendance du pharmacien, sa liberté de décision dans tous ses actes professionnels », justifie Isabelle Adenot. Ces modifications seront portées dans le projet de loi « Entreprise » de Christian Jacob, ministre délégué aux PME, qui sera déposé à l’Assemblée nationale avant l’été.
ATTENTION !
L’Ordre rappelle que si « les pharmaciens doivent s’entourer de conseils, ils doivent être vigilants quant aux documents qu’ils signent et à leur implication ».
Inscription
A défaut de solliciter une inscription propre au tableau de l’Ordre,
les SEL peuvent être traduites devant la chambre de discipline.
EXPLICATION-1 462 SEL (+ 50 % en un an) dont 1 376 SELARL (à responsabilité limitée), 73 SELAS (par actions simplifiées), 8 SELCA (en commandite par actions) et 5 SELAFA (à forme anonyme).
– Les officines exploitées en SEL représentent 6,5 % du total des officines. Les SEL dites « familiales », c’est-à-dire regroupant au moins deux pharmaciens reliées par un nom de famille commun par naissance ou par alliance, représentent 18 % du total des SEL.
– Au sein des SEL, les associés gérants sont en moyenne plus jeunes que les associés investisseurs : 34-43 ans contre 44-53 ans, démontrant que les titulaires passent le relais « en douceur » au successeur qu’ils ont choisi.
– Huit régions ont vu leur nombre de SEL augmenter d’au moins 50 % : Bretagne (90 %), Pays de la Loire (80 %), Rhône-Alpes (74 %), Bourgogne (69 %), Auvergne (55 %), Nord-Pas-de-Calais (55%) et PACA-Corse (50 %).
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