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LES TITULAIRES INVITÉS À S’AUTOÉVALUER
Reformulant de manière plus didactique les recommandations de l’Ordre sur la chaîne du froid, la sous-commission « du dernier kilomètre » vient d’élaborer un questionnaire permettant aux titulaires de poser un œil critique sur leur procédure de conservation des médicaments thermosensibles.
Suivant la voie tracée par les recommandations « PST » (produits de santé thermosensibles) émises par l’Ordre en décembre 2009, le froid s’invite à nouveau à l’officine. Cette fois, sous la forme d’un questionnaire d’autoévaluation mis au point par la sous-commission SFSTP/AFF(1) dite du « dernier kilomètre »(2), diffusé via Internet et présenté lors d’une table ronde à Pharmagora le 6 avril prochain(3). Cette équipe pluridisciplinaire composée de pharmaciens, de métrologistes, de microbiologistes mais aussi de spécialistes de l’emballage, de répartiteurs, de logisticiens et de fabricants, a récapitulé en vingt-cinq questions les différentes étapes qui permettront aux officinaux de faire leur état des lieux et, le cas échéant, de rectifier le tir. « Ce questionnaire est une explication de texte sur forme de check-list », résume Jean Arnoult, membre de la sous-commission et président du Conseil régional de l’Ordre du Nord-Pas-de-Calais.
Un sujet loin d’être maîtrisé
Fallait-il à nouveau réchauffer les ardeurs des titulaires ? Oui, car de l’avis des experts de la sous-commission, le sujet est encore loin d’être maîtrisé par le monde officinal. Selon Michel Dufros, microbiologiste et président de la sous-commission, seuls 10 à 20 % des pharmaciens disposent de systèmes de sondes extérieurs pour surveiller la température de leur enceinte thermostatique. Une enceinte thermostatique dont les officines ne sont d’ailleurs pas toutes équipées. « Seules 82 % des officines que j’ai étudiées en disposaient. Sans parler des alarmes présentes dans seulement 40 % des cas », relève Marie Boned, pharmacien assurance qualité, membre de la sous-commission et auteur en 2012 d’une enquête approfondie auprès de cent officines d’Ile-de-France.
« Très souvent, les titulaires pensent qu’investir dans du bon matériel suffit. Ils occultent la suite de la procédure qui consiste à assurer chaque jour la surveillance et la constance de la température, à former les équipes pour répondre aux exigences de qualité et de traçabilité », observe Philippe Villeneuve, pharmacien, consultant et membre de la sous-commission. Il ne s’agit toutefois pas d’incriminer les titulaires aux prises avec la technicité des recommandations et confrontés à la certification du matériel et aux sollicitations commerciales des fabricants. « La majorité des titulaires interrogés sont prêts à s’investir humainement dans ce domaine, mais l’investissement technique et financier constitue encore un obstacle », reconnaît Marie Boned. De son côté, Michel Dufros compare la situation actuelle des officinaux à celles des laboratoires de biologie médicale : « Les titulaires sont aujourd’hui au même stade que les laboratoires d’analyses biologiques il y a vingt ans. Ceux-ci ont été ensuite obligés d’évoluer face à l’accréditation obligatoire en 2016 ».
L’avenir est aux produits frais
Pour aider les pharmaciens, le questionnaire se matérialise dans une feuille de route du dernier kilomètre : commande/livraisons, réception, stockage et dispensation.
Car il y a aujourd’hui urgence à boucler le dernier maillon de la chaîne du froid. La loi HPST, la HAD et la sortie de la réserve hospitalière ont accentué la nécessité d’un savoir-faire du pharmacien d’officine dans le stockage et la manipulation des molécules thermosensibles ainsi que des biotechnologies. « Il est indispensable de garantir que des produits destinés à des pathologies lourdes et graves, arrivent en parfait état au chevet du patient. C’est un réel souci de la part des officinaux », décèle Sandrine Rousselot, pharmacien conseil en exercice officinal-section A et membre de la sous-commission à travers les sollicitations des pharmaciens d’officine.
Le titulaire a également tout intérêt à faire valoir sa propre expertise face aux compétences de la grande distribution dans le domaine. « Les chaînes agroalimentaires sont rodées depuis cinquante ans à la conservation des produits frais », rappelle d’ailleurs Michel Dufros.
Enfin, comme le remarque ce dernier, « la chaîne du froid élément essentiel du management de la qualité est un critère de valeur de l’officine. » En cas de cession, on peut ainsi imaginer qu’un repreneur refuse un stock froid qu’il jugera suspect. Michel Dufros en veut pour preuve l’exemple de certains laboratoires biologiques « réfractaires » à cette démarche « qualité froid », qui n’ont pas trouvé acquéreur.
Trois nouveaux degrés
Au-delà de l’aspect déontologique et de la santé publique, les enjeux économiques doivent aujourd’hui convaincre les titulaires à investir 1 500 à 2 000 euros dans une enceinte thermostatique. Cet investissement fera d’ailleurs l’objet des prochains travaux de la commission. Car la sous-commission qui attend avec impatience le retour des titulaires sur leur autoévaluation, lance déjà de nouveaux chantiers. « Nous allons approfondir nos travaux dans trois directions : il faudra statuer sur les pochettes isothermes aujourd’hui inefficaces, déterminer la méthodologie du choix de l’enceinte et enfin, définir le coût de la qualité », énonce Marie Boned. Sur ce dernier point, la sous-commission risque de faire mouche auprès des titulaires dont le « frigo » contient parfois jusqu’à 25 000 euros de stocks.
(1) Société française des sciences et techniques pharmaceutiques/Association française du froid
(2) voir le Moniteur des Pharmacies N° 2877, 2917, 2928 et 2942.
(3) De 16h30 à 17h30
Informer et convaincre
Il n’est pas envisagé de soumettre les titulaires à la question « froid ». C’est sur une base volontaire qu’ils téléchargeront le questionnaire sur les sites de la SFSTP (www.sfstp.org) et de l’AFF (association-francaise-du-froid.fr). Le questionnaire a par ailleurs été communiqué à l’Ordre et aux trois syndicats de pharmaciens. De manière plus concrète, Jean Arnoult indique qu’il le remettra aux nouveaux installés de sa région. Si cette initiative était dupliquée à l’échelle nationale, ce mode de diffusion de proximité permettrait de relayer rapidement le mouvement.
Extraits du questionnaire d’autoévaluation
Préambule Gestion de reglementation
Ai-je connaissance des « Recommandations de gestion des produits de santé soumis à la chaîne du froid » de l’Ordre national des pharmaciens ?
1 Commande/livraison
Suis-je attentif à l’heure de livraison des produits de santé thermosensibles (PST) et les commandes sont-elles transmises en conséquence ?
2 Réception
A chaque réception, les caisses contenant des PST sont-elles repérées, ouvertes sans délai et leur intégrité est-elle vérifiée ?
3 Stockage
L’enceinte est-elle équipée d’un dispositif de surveillance régulier des températures et d’une alarme ?
Ai-je une procédure écrite sur le suivi et les anomalies des températures ?
4 Dispensation
Lors de la dispensation au patient, la pharmacie met-elle en place des actions de conseils spécifiques au respect de la chaîne du froid des PST sous forme de consignes orales et d’une fiche explicative ?
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