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Le couac rédactionnel
A peine née, déjà critiquée ! La nouvelle mouture de l’article R. 5148 bis fait l’objet d’interprétations divergentes de la part des professionnels de santé. Dur pour une modification qui clarifie pourtant la situation.
Ces derniers mois, de plus en plus d’officinaux se voyaient adresser des refus de prise en charge par les caisses d’assurance maladie, voire des demandes de reversement des sommes payées parce que l’ordonnance omettait de préciser l’une ou l’autre des mentions obligatoires : posologie accompagnée de la durée de traitement ou du nombre d’unités de conditionnement. Une situation que dénonçaient Ordre et syndicats. Ils ont finalement été entendus.
Mais voilà : la modification de l’article R. 5148 bis (décret n° 2002-1216 du 30 septembre 2002, JO du 2 octobre) s’avère déjà sujette à caution ! La première partie du nouveau texte pose en effet un lourd problème d’interprétation. Les trois premiers alinéas stipulent désormais que « pour permettre la prise en charge » des médicaments par un organisme d’assurance maladie, l’ordonnance doit « indiquer pour chacun des médicaments prescrits : 1° La posologie. 2° Soit la durée du traitement, soit, lorsque la prescription comporte la dénomination du médicament au sens du I de l’article R. 5000, le nombre d’unités de conditionnement » ; cet article R. 5000-I énonçant que « la dénomination d’un médicament peut être soit un nom de fantaisie, soit une dénomination commune ou scientifique assortie d’une marque ou du nom du fabricant ».
Ambiguïtés. Deux interprétations sont possibles. Premièrement : les prescriptions de produits sous nom de marque et en dénomination commune ou DC (voir encadré p. 13) assortie d’une marque ou d’un nom de laboratoire (Amoxicilline Merck par exemple) pourront comporter la posologie et la durée du traitement ou la posologie et le nombre d’unités de conditionnement, tandis que les prescriptions en DC « pure » ne devront indiquer que la durée de traitement, ce qui semble logique puisque le médecin ne peut pas savoir par avance ce que le pharmacien délivrera à son patient. Deuxième interprétation, les prescriptions sous nom de marque et en DC plus nom de fabricant devront uniquement mentionner la posologie et le nombre de boîtes, la posologie et la durée de traitement étant seules réservées aux DC « pures ». Et dans ce cas, des ordonnances types « Mopral 20 mg, 1 cp/j x 10 jours » ou « Amoxicilline Merck 1 g, 2 cp/j x 6 jours » ne sont plus remboursables par l’assurance maladie… Ubuesque. « Cette première partie est totalement absurde, regrette Claude Japhet, président de l’UNPF. Nous avons contacté le ministère pour qu’il nous donne une explication, qu’il nous dise ce que souhaite réellement le législateur. » La CNAM devra elle aussi livrer son interprétation du texte avant de donner ses instructions aux CPAM. « Nous allons travailler à l’interprétation du texte avec les pharmaciens et nous accorder sur une analyse commune, avant d’envoyer une circulaire nationale », promet Claire Martray, responsable du département Médicaments et dispositifs médicaux de la CNAM. « Je ne veux pas d’un texte interprétable. Qui nous dit que tous les directeurs de CPAM suivront l’interprétation de la CNAM ? », rétorque Claude Japhet, qui milite pour qu’une modification du décret intervienne rapidement.
Allô médecin ! Quant au reste du nouveau texte, il a le mérite de clarifier la situation. Car désormais, en l’absence de l’une ou l’autre ou de toutes les mentions obligatoires (posologie, durée de traitement, nombre d’unités de conditionnement), la prise en charge sera possible. S’il s’agit d’un médicament listé, le pharmacien pourra délivrer le nombre de boîtes « correspondant aux besoins du patient après avoir recueilli l’accord du prescripteur qu’il mentionne expressément sur l’ordonnance ». Ainsi l’ordonnance libellée « Di-Antalvic 2 gél. trois fois par jour en cas de douleur », autrefois refusée par la CNAM au seul motif que ne figure pas la durée du traitement, sera désormais prise en charge si le pharmacien obtient l’accord du médecin.
S’il s’agit d’un médicament non listé, le pharmacien peut délivrer sans l’accord du prescripteur mais à la condition de délivrer soit « le nombre d’unités de conditionnement commercialisé comportant le plus petit nombre d’unités de prise, soit, si le nombre d’unités de conditionnement ne figure pas sur l’ordonnance, le conditionnement comportant le plus petit nombre d’unités de prise parmi les conditionnements commercialisés ». Par exemple, l’ordonnance « Advil en cas de fièvre » sera également remboursée si le pharmacien délivre une boîte de 20. Reste que pour la seconde boîte, il devra appeler le médecin… « Le texte est imparfait, reconnaît Pierre Leportier, en charge du dossier Protection sociale à la FSPF. On peut ainsi se demander si le pharmacien sera remboursé au cas où il ne délivrerait pas le plus petit conditionnement. Mais globalement, ce texte est satisfaisant car il indique aux pharmaciens la procédure pour éviter une bonne partie des contentieux avec les caisses. C’est une règle du jeu claire. »
Pour l’USPO il s’agit d’un réforme inachevée. « Nous souhaitions que dans le cas de produits listés les pharmaciens puissent délivrer sans appeler le médecin, sous certaines conditions, en reconnaissant l’opinion pharmaceutique », estime Gilles Bonnefond, secrétaire général du syndicat.
Par ailleurs, le nouveau texte permet la rédaction d’ordonnance valable un an au lieu de six mois précédemment. Enfin, en stipulant que « pour en permettre la prise en charge le pharmacien ne peut délivrer en une seule fois une quantité de médicaments correspondant à une durée de traitement supérieure à quatre semaines », le texte laisse supposer que le pharmacien pourra délivrer une quantité de médicaments supérieure à un mois, mais que seul un mois de ce traitement sera pris en charge. Or l’article R. 5198 du même code interdit formellement toute délivrance supérieure à un mois sauf pour les contraceptifs. A quel texte se fier ?
Les modalités de prescription en DC
Outre qu’il intronise définitivement et officiellement l’intitulé « dénomination commune » (ou DC) en lieu et place de « dénomination commune internationale » (DCI), le décret n° 2002-1216 du 30 septembre 2002, publié au JO du 2 octobre, précise les mentions à porter sur l’ordonnance pour une telle prescription. L’ordonnance en DC, outre les indications habituelles, doit mentionner :
– Le principe actif selon sa dénomination commune.
– Le dosage en ce principe actif.
– La voie d’administration.
– La forme galénique. Au cas où la prescription vise une association, cette association est signalée par le signe « + » placé entre le nom et le dosage de chaque principe actif.
– La posologie.
– La durée d’emploi ou, dans le cas d’une prescription en DC assortie d’une marque ou d’un nom de laboratoire, le nombre d’unités vendues…
– Y figure aussi éventuellement le nombre de renouvellements prescrits.
Réaction
Christian Blaesi
Président de la section A de l’ordre des pharmaciens
Je suis extrêmement déçu. Je m’attendais à mieux. On estime toujours que le pharmacien est incapable de la moindre initiative et surtout qu’il est scientifiquement incapable de délivrer. N’importe quel pharmacien sait à quoi correspond l’ordonnance « Une boîte de Zyloric 100 ». Il n’y a pas besoin d’appeler le médecin pour cela.
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