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Faire face à des difficultés de trésorerie
Une officine peut traverser une période délicate en trésorerie. Face à des problèmes conjoncturels isolés, il existe un certain nombre de remèdes pour en venir à bout. Mais le mieux est encore de les prévenir.
Dans la grande majorité des cas, les difficultés de trésorerie des pharmaciens viennent de problèmes structurels : insuffisance de fonds propres et charge de remboursement des emprunts trop importante par rapport à l’autofinancement dégagé par l’exploitation, prélèvements du titulaire excessifs au regard des possibilités de l’officine, baisse tendancielle du niveau d’activité ou de la marge à la suite, par exemple, d’un événement déstabilisant (transfert d’une pharmacie, création d’un centre de parapharmacie à proximité, déplacement de l’attractivité commerciale, etc.).
Les solutions à mettre en oeuvre seront d’autant plus draconiennes que les difficultés seront grandes (réétaler le prêt, s’associer, vendre, déposer le bilan…).
Mais il se peut aussi que les difficultés soient passagères, en rapport avec un surcroît d’activité, des stocks trop élevés, des retards de paiement des caisses de Sécurité sociale, etc. Dans ce cas, les solutions envisagées permettront de donner des impulsions conjoncturelles pour maintenir les objectifs d’équilibre de trésorerie, prévenir la dégradation du fonds de roulement et faire face aux à-coups des besoins en fonds de roulement, notamment en période d’investissement. Il faut rappeler que la trésorerie de l’officine dépend de l’écart entre le fonds de roulement et le besoin en fonds de roulement lié au décalage entre les recettes et les dépenses totales.
Avant toute chose, il convient de comprendre les raisons de la dégradation de sa trésorerie : une croissance rapide du chiffre d’affaires, ou à l’inverse une baisse temporaire, une moins bonne maîtrise des stocks, un phénomène saisonnier, des délais de remboursement des caisses qui s’allongent au moment des congés du personnel (pic en mai, mois butoir pour la cinquième semaine de congés payés, et en été), des charges exceptionnelles (licenciement, redressement fiscal ou social, autres….), une fermeture momentanée, un arrêt maladie…
L’explication d’une augmentation du besoin en fonds de roulement sera mise en lumière par l’analyse de l’évolution des ratios concernant la rotation des stocks, les crédits fournisseurs et les crédits clients (exprimés en jours de CA). « Le pharmacien devra immédiatement agir sur le niveau du besoin en fonds de roulement en tentant de réduire ses délais d’encaissement des créances clients et d’obtenir des délais de paiement plus intéressants de ses fournisseurs », expose Olivier Delétoille, expert-comptable, directeur associé de KPMG Entreprises.
Le recours au crédit fournisseur est une bouteille d’oxygène qui permet au pharmacien de « surfer » sur les problèmes financiers. Mais les répartiteurs n’apportent pas leur soutien à l’aveuglette. « Nous privilégions avant tout le diagnostic des difficultés, explique Geoffrey Blondel, responsable du service conseil financier de la CERP Rouen. Une analyse du bilan est systématiquement effectuée pour savoir si un phénomène conjoncturel ne cache pas un problème de fond. » Si ce n’est pas le cas, différentes solutions sont alors envisagées.
Le premier réflexe du pharmacien sera de demander un allongement du crédit fournisseur. « Il n’y a pas d’inconvénient particulier à passer le pharmacien d’un délai de paiement de cinq jours à quarante et un jours de huitaine », souligne Geoffrey Blondel. Un report d’une échéance peut aussi être accordé ponctuellement, « sans excéder un délai de deux ou trois mois », précise-t-il. En revanche, la CERP Rouen consent moins facilement un découpage de l’échéance en retard en plusieurs mensualités, estimant que « le répartiteur n’a pas à jouer le rôle de la banque ». Financièrement, le pharmacien n’y trouve pas son intérêt. Le répartiteur lui facturera des agios plus élevés et, pour des avances de trésorerie importantes, il pourra exiger en plus des garanties. « Le découpage peut se concevoir pour des événements exceptionnels tels qu’un investissement ou une grève prolongée des remboursements des CPAM. »
Les répartiteurs se montrent malgré tout prudents à l’égard de ces solutions car, en soutenant de façon abusive l’activité d’un pharmacien qui a de réelles difficultés financières, ils s’exposent à une mise en cause par les tribunaux si le pharmacien dépose le bilan.
Pour diminuer le besoin en fonds de roulement, le pharmacien doit toujours se rappeler que tout l’argent qu’il y a en stock et le crédit accordé aux clients ne sont pas en caisse. La surveillance du stock (rotation) sera accrue et la télétransmission des dossiers de tiers payant, synonyme de délais courts de paiement, visera à faire baisser l’encours moyen du poste clients.
Olivier Delétoille mentionne aussi la possibilité, en dernier ressort, de solliciter un étalement des paiements des cotisations sociales.
Une trésorerie négative peut se révéler très coûteuse en frais financiers. C’est pourquoi il faut utiliser à bon escient les services de la banque. Il est impératif de mesurer le décalage des encaissements attendus et de décider des mesures exceptionnelles nécessitées pour couvrir les besoins de trésorerie :
– soit par conjugaison de crédits fournisseurs obtenus exceptionnellement et d’acomptes clients (en cas de contrats de fournitures avec des collectivités) appelés et négociés ponctuellement ;
– soit par recours à une ligne de crédit ou un découvert ;
– soit encore par un crédit-revolving (crédit permanent ou renouvelable que l’on peut utiliser et rembourser à sa guise).
Pour Christian Denoyel, directeur de Solyphar, une filiale de la Lyonnaise de banque, le découvert est la solution la plus adaptée à un besoin conjoncturel, estimant que la ligne de crédit sert à financer sur une période moyenne ou longue et que le crédit-revolving est « une facilité qui coûte cher ». A l’égard des pharmacies saisonnières en particulier, il invite les titulaires à prévoir leurs besoins de financement en fonction des fluctuations du cycle d’activité. Dans la mesure où la gestion de la saisonnalité des ventes est étayée par un plan de trésorerie probant, la banque sera davantage intéressée par la mise en place d’une ligne de crédit nettement identifiable, plutôt que par un découvert aux mouvements aléatoires et de coût plus élevé.
Bien sûr, il convient de négocier le mieux possible les taux et conditions générales de ces différents services financiers. Et surtout de contrôler l’application des tarifs de ces services sur les opérations courantes. Il est important de connaître ce que facture (en francs) la banque à son client pour apprécier le taux du découvert à sa juste valeur. Cette démarche peut parfois révéler des surprises désagréables.
La prévention en 7 actions
Anticiper les difficultés, c’est commencer à les résoudre. « Le pharmacien peut mettre en place un certain nombre d’actions préventives », suggère Olivier Delétoille. Et cet expert-comptable d’en citer au moins sept :
1. Anticipation des phénomènes de saisonnalité (en termes d’activité et de besoins du titulaire).
2. Toujours prévoir un « matelas » pour faire face au cas où.
3. Communiquer régulièrement avec le partenaire financier.
4. Négocier à l’avance – afin de maîtriser les coûts – des facilités de caisse ou de découvert avec son partenaire financier.
5. En cas de baisse de revenu, prévenir les administrations compétentes pour anticiper la baisse de l’impôt et des cotisations sociales correspondantes.
6. Prévoir à l’avance un échéancier des dépenses connues avec suffisamment de précision (impôt sur le revenu, cotisations sociales, à savoir : les appels de cotisations semestrielles de retraite peuvent être payés en deux fois).
7. Pour ceux qui ont des difficultés à gérer les flux de trésorerie, mensualiser le plus possible ses charges (cotisations sociales personnelles et salariales notamment) et l’impôt sur le revenu.
Les fausses solutions
– Payer, sans prévenir, ses cotisations sociales ou impôts et taxes avec retard… le coût étant exorbitant : 10 % de pénalités plus intérêts de retard, et, pour la majorité, non déductibles. Plus grave, à éviter absolument : minorer délibérément le montant de la TVA à payer (c’est un délit pénal).
– Autofinancer ses investissements sans en avoir les moyens.
– « Casser » des placements (PEA) au risque d’en perdre les avantages ou en dégageant une plus-value imposable.
– Solliciter dans l’urgence un emprunt.
– Croire que les difficultés viennent des impôts et défiscaliser.
– Laisser filer le crédit répartiteur qui risque d’emprisonner le titulaire.
– Faire la chasse aux charges de manière inconsidérée (frais de personnel notamment).
– « Fermer les yeux ».
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