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COMMENT NE PAS SE LAISSER PIÉGER

Publié le 12 mai 2012
Par Chloé Devis
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Méfiance, oui, parano, non. Si à l’officine on peut un jour avoir affaire à des coupures contrefaites, les statistiques sont plutôt rassurantes et une méthode simple et rapide mise au point par la Banque de France permet de vérifier l’authenticité des billets. Quelques conseils pour acquérir les bons réflexes au comptoir sans nuire à la qualité du service.

Vigilance pour les petites coupures

La lutte contre le faux monnayage n’est pas un vain mot en Europe : d’après les chiffres de la Banque centrale européenne (BCE), le nombre total de billets contrefaits saisis en 2011 a été inférieur de 19,3 % à celui qui a été enregistré en 2010. Et les 310 000 faux billets retirés au second semestre 2011 ne représentent qu’une goutte d’eau dans l’océan des 14 milliards de coupures en circulation dans la zone euro…

Néanmoins, l’Eurosystème – c’est-à-dire la Banque centrale européenne (BCE) et les dix-sept banques centrales nationales (BCN) de la zone euro – continue de recommander au public la vigilance lorsqu’il reçoit des billets à l’occasion de transactions en espèces. Vigilance qui doit bien entendu redoubler dans le cas du commerçant au vu des flux qui transitent quotidiennement par son tiroircaisse. Rappelons que, le cas échéant, la remise en circulation de billets falsifiés est passible d’une amende de 7 500 euros (article 442-7 du Code pénal). Or, ce ne sont pas les grosses coupures qui doivent nécessairement éveiller les soupçons les plus vifs, puisque ce sont les coupures de 20 et de 50 euros qui sont les plus concernées. Reste qu’il est devenu ardu pour les faux-monnayeurs de se mesurer à la conception des billets actuels, dotés de huit signes de sécurité. Encore fautil les connaître pour ne pas se laisser abuser, y compris, parfois, par des imitations grossières…

Une méthode éprouvée

La Banque de France a mis au point une méthode permettant de vérifier manuellement l’authenticité des billets en euros. C’est la méthode TRI : « toucher-regarder-incliner ».

• Toucher : le papier fiduciaire, composé à 100 % de coton, possède une texture ferme et une sonorité craquante. En outre, l’encre déposée par l’impression, en relief, au recto du billet est perceptible à différents endroits en passant l’ongle ou le bout d’un doigt. Cette technique est particulièrement visible sur les lettres qui identifient la BCE sur le billet.

• Regarder : il faut commencer par regarder attentivement le filigrane – image dessinée qui apparaît dans l’épaisseur du papier. Il doit reprendre le motif architectural et la valeur du billet. Face à la lumière, la transition entre les parties claires et sombres de l’image est progressive. Sur une surface sombre, les parties claires deviennent sombres, un effet particulièrement remarquable dans la partie du filigrane reproduisant la valeur faciale. Le fil de sécurité (une ligne métallique verticale insérée dans l’épaisseur du papier) s’observe par transparence. La valeur faciale suivie du mot « euro » apparaît en clair dans le fil.

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Par ailleurs, des marques incomplètes, imprimées dans un des coins supérieurs de chaque face, s’ajustent parfaitement en examinant le billet par transparence. Selon la même méthode, le symbole « € » est visible plusieurs fois dans la bande holographique des coupures de 5 à 20 euros et une fois dans la pastille holographique des coupures de 50 à 500 euros.

• Incliner : au recto des billets, l’élément holographique se présente sous la forme d’une bande pour les coupures de 5, 10 et 20 euros et d’une pastille pour celles de 50, 100, 200 et 500 euros. Quand on incline le billet, la valeur faciale, le symbole de l’euro « € » ou la couronne d’étoiles européenne alternent dans l’hologramme sur un fond arc-en-ciel. Pour la pastille holographique, quand on incline le billet, la valeur faciale et une fenêtre ou un portail alternent dans l’hologramme. En arrière-plan se distinguent des cercles concentriques aux couleurs de l’arc-enciel, constitués de lettres minuscules se déplaçant du centre vers la bordure de la pastille. Près des bordures, des lettres minuscules indiquent la valeur du billet tant sur la bande holographique que sur la pastille. Pour les coupures de 5, 10 et 20 euros, une bande reproduisant au moyen d’une encre à effet optique la valeur faciale et le symbole « € » passe alternativement du doré au nacré lorsqu’on incline le billet au verso. Pour les coupures de 50, 100, 200 et 500 euros, au verso, le chiffre à droite indiquant la valeur du billet passe du violet au vert olive, voire au marron.

Pas de comportements suspicieux

Vous avez le vertige ? Un peu d’entraînement et ces gestes deviendront automatiques… Vous pouvez aussi vous contenter des deux ou trois gestes, parmi toutes ces techniques, qui vous sont le plus naturels, en n’y ajoutant les autres qu’en cas de doute. Celui-ci doit également vous conduire à comparer la coupure suspecte à un billet dont vous avez la certitude qu’il est authentique. Mais ces différentes manipulations ne doivent pas se retourner contre vous ou enrayer le bon fonctionnement de l’activité officinale.

C’est pourquoi vous devez « toujours examiner un billet en présence de la personne qui vous l’a remis, sans quoi celle-ci peut vous accuser de l’avoir échangé contre un autre », préconise Arnaud Noulin, conseiller chargé de la sécurité des entreprises à la chambre de commerce et d’industrie de l’Essonne. Ne soyez pas non plus trop insistant et demandez éventuellement un autre moyen de paiement. Un comportement trop suspicieux de votre part peut vous faire perdre inutilement du temps et nuire à la qualité du service, surtout si le client est de bonne foi », ajoute l’expert.

De même, le recours à un détecteur de faux billets peut s’avérer… une fausse bonne idée : les stylos et autres lampes LED, qui doivent être visibles des clients lorsque vous les utilisez pour, là aussi, ne pas retourner les soupçons contre vous, peuvent s’avérer dommageables sur le plan commercial et d’une efficacité aléatoire. Les autorités recommandent ainsi de privilégier la méthode manuelle. En revanche, si vous souhaitez maîtriser celle-ci, en vous exerçant avec de « vrais » faux billets, il existe des sessions de formation (désormais payantes) organisées par les chambres de commerces et d’industrie en partenariat avec la Banque de France (via les sites de ces dernières).

Et si vos soupçons se confirment ? Pas d’hésitation, « il faut alerter les forces de l’ordre », rappelle Arnaud Noulin. Dans le cas où vous découvrez des fausses coupures au moment de faire votre caisse, retirez-les aussitôt afin de les déposer à la Banque de France ou à votre propre banque, conformément à l’article L 162-2 du Code monétaire et financier. Il vous sera remis un reçu qui vous servira de justificatif fiscal, la perte financière pouvant être déduite de votre résultat comptable.

Les 7 points à vérifier

1 – Le papier craquant.

2 – L’impression en relief.

3 – Le filigrane.

4 – Le fil de sécurité.

5 – Les marques incomplètes.

6 – L’hologramme et les perforations.

7 – La pastille avec une alternance de visuels.

Droits et devoirs en matière fiduciaire

Les commerçants ont pour obligation d’accepter un paiement en billets quelle que soit sa valeur car c’est un moyen de paiement qui a cours légal, au contraire d’un chèque par exemple (article R. 642-3 du Code pénal). ils ont toutefois la possibilité de refuser un paiement effectué avec des pièces et des billets qui leur semblent faux, ou encore dont l’état ne permet pas d’effectuer les contrôles d’authenticité. Dans le doute, le vendeur peut exiger du payeur une pièce d’identité.

Par ailleurs, un billet maculé ne sera pas forcément falsifié, mais peut être volé. Cela dit, le commerçant peut tout à fait accepter des billets légèrement déchirés.

Enfin, vous pouvez apporter à la Banque de France vos coupures abîmées ou douteuses. Si elles sont authentiques, elles vous seront échangées gratuitement contre des billets neufs.