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C’est l’europhorie !

Publié le 5 janvier 2002
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Comment s’est passé le passage à l’euro pour les officines françaises ? Presque de manière idyllique, à en croire les réactions recueillies les 2 et 3 janvier par « Le Moniteur », comme dans la plupart des secteurs commerçants d’ailleurs.

Certains disent qu’ils jouent à la marchande ou au Monopoly ! L’euro fait maintenant partie du jeu au comptoir. Un jeu de plus ! » En cette fin de journée du 2 janvier, l’ironie le dispute à la bonne humeur chez Anne-Marie Blanchet (Givry). « Des gens réticents, on en a beaucoup entendu parler mais on n’en a pas eu », ajoute-t-elle. Le sentiment est général : calme et basculement en douceur. Merci aux clients et surtout à l’informatique !

« Le passage à l’euro a été plus facile que prévu, confirme Patrick Jehl (Asnières-sur-Seine), la transition s’est faite en deux heures. Grâce à l’ordinateur, c’est simple, on encaisse comme on veut. Le rendu de monnaie est calculé directement. » La méthode de la double caisse est généralisée mais la règle respectée : le rendu s’effectue en euro. « Sinon on va voir revenir du franc ! », s’inquiète Luc Salama (Bondy). « Moi je rends dans la monnaie dans laquelle on me paie, avoue pourtant Joël Bayou (Pont-Aven). Il y a des problèmes de lisibilité des pièces. Il faut s’y reprendre à plusieurs fois. »

Une troisième caisse en marks !

« Si les clients ont tendance à liquider leurs francs, ils n’ont aucune exigence concernant le rendu, dit Viviane Di Amore (Hendaye), qui craint en revanche la réaction des clients espagnols. Ils représentent environ 15 % de notre clientèle et les calculs risquent de se corser lorsqu’il faudra rendre des euros sur les pesetas… Mais à terme, l’euro nous simplifiera la tâche. » Micheline Gulner (Stiring-Wendel), près de la frontalière allemande, a résolu le problème en créant une troisième caisse en… marks.

Aucun titulaire ne semble inciter à l’utilisation de la carte de crédit, malgré les facilités accordées par les banques au premier trimestre, puisque chaque professionnel paiera le même forfait que l’an dernier, quel que soit le nombre de transactions réalisées. « Même si le rendu nous fait perdre un peu de temps lors du règlement, nous n’incitons pas à l’usage de la carte de crédit », confirme Cécile Dorbes (Toulouse). Quant aux personnes âgées, « elles sont toutes équipées en chéquiers », constate Luc Salama.

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Les fonds de caisse suffiront-ils ?

Nul vent de panique, donc, d’autant que la plupart des équipes semblent avoir été formées, via un groupement souvent, sur le tas parfois : « Nous n’avons suivi aucune formation particulière, déclare Joël Bayou, il faut savoir s’adapter. On a l’habitude avec les clients… » Reste une inquiétude : les fonds de caisse suffiront-ils ? Car en ce début d’année, les clients écoulent frénétiquement leurs francs (60 à 80 %). « Les banques comme La Poste sont prises d’assaut, prévient Annette Moussus, installé à Plaisir. Les quantités d’euros disponibles sont moindres et je crains que les réapprovisionnements soient insuffisants. Si la situation perdure nous serons à court de monnaie avant la fin de la semaine. » « Nous avons déjà dû retirer nous-mêmes des euros car les banques n’avaient que quelques malheureux kits la semaine dernière », confirme Luc Salama.

Cap suivant, celui des premières télétransmissions de lots en euros vers les caisses, que peu ont testé en décembre. Mais les pionniers semblent ne pas avoir rencontré de problème, tel Philippe Lévy à Marseille (voir Le Moniteur 2424). Ce qui n’empêche pas l’inquiétude de Liane Rocchi (Nice) : « Nous n’avons pas eu le bug de l’an 2000, nous aurons peut-être le bug de l’euro ! » « Mais la prochaine étape sera surtout de refaire toute la politique de prix pour la para, estime Cécile Dorbes. Quand l’euro sera bien entré dans les habitudes… »

Une éducation à l’euro qui tient à coeur : « Les réticents, nous allons nous armer pour les convaincre !, conclut Anne-Marie Blanchet. Il faut rassurer, c’est tellement compliqué. Et puis l’essentiel c’est déjà qu’ils soient convaincus qu’on ne les vole pas… »