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Biosimilaires : des perspectives d’économies et… de rémunération

Publié le 25 septembre 2021
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Ce marché à fort potentiel mais encore émergent (918 M€ en 2020 sur les marchés de la ville et de l’hôpital) est étroitement dépendant des aléas de la réglementation.

Avec seulement 23 % de taux de pénétration en ville et un marché qui a progressé moins rapidement en 2020 (+ 8,7 % versus + 123 % en 2019), l’usage des médicaments biosimilaires sur leur marché de référence est encore très loin de l’objectif de 80 % de pénétration fixé dans la Stratégie nationale de santé 2018-2022. Pourtant, l’essor des biosimilaires permettrait d’engendrer des économies importantes. Rien que les trois molécules biologiques figurant dans le « top 5 » des médicaments de ville les plus coûteux pour l’Assurance maladie totalisent à elles seules plus de 1 Md€ de dépenses. De nombreux brevets arrivent à échéance d’ici 2030 et représentent aujourd’hui plus de 1,2 Md€ de dépenses par an pour l’Assurance maladie. La Cour des comptes estime qu’un recours plus large aux médicaments biosimilaires permettrait d’économiser plus de 600 M€ chaque année.

La concertation menée en 2021 sous la houlette du gouvernement avec l’ensemble des parties prenantes pour remettre à plat le cadre législatif et réglementaire autour des médicaments biologiques et de leurs biosimilaires a permis d’envisager plusieurs pistes de rémunération en cas de substitution biosimilaire : mise en place de mesures incitatives sous forme d’honoraires pour favoriser l’interchangeabilité (décision de faire évoluer la prescription initiale d’un médicament biologique pour un autre figurant sur la liste des médicaments biosimilaires), valoriser l’implication et le temps consacré par les médecins et pharmaciens pour l’accompagnement du patient, création d’une Rosp biosimilaires pour les professionnels de santé de ville (médecin, pharmacien d’officine et infirmier). Cet honoraire du suivi du patient ou ce projet de Rosp pourrait être autofinancé grâce aux économies générées par un plus grand recours aux médicaments biosimilaires.

Tarif forfaitaire de responsabilité

Les TFR sont un instrument de régulation du marché des médicaments génériques créé par la loi de financement de la Sécurité sociale pour l’année 2003. Ce dispositif consiste à fixer le tarif remboursé par l’Assurance maladie obligatoire et complémentaire en fonction du prix du générique le moins cher du groupe. Il s’agit d’un tarif unique de remboursement. Si le prix servant de base au remboursement d’une spécialité d’un groupe générique est plus élevé, la différence est à la charge du patient. Le passage au TFR s’apparente à une voiture-balai qui sanctionne le marché et les pharmaciens quand les taux de substitution ne sont pas au rendez-vous des objectifs. Les TFR permettent à l’Assurance maladie de faire des économies immédiates. Ils exacerbent la concurrence par les prix entre laboratoires de princeps et de génériques, les premiers étant incités à aligner leurs prix sur les TFR pour ne pas perdre encore plus de parts de marché et les seconds étant éventuellement tentés de descendre en dessous du TFR pour maintenir un avantage concurrentiel.

Principe et règles d’application du TFR

Le TFR est fixé par le CEPS et mis en place lorsque le générique n’atteint pas un taux de substitution seuil.

Ce taux seuil de substitution en volume doit être de :

60 % après 12 mois de commercialisation ;

65 % après 18 mois de commercialisation ;

70 % après 24 mois de commercialisation ;

80 % après 36 mois de commercialisation : ce dernier palier est supprimé dans le nouvel accord-cadre triennal 2021-2024 signé le 5 mars dernier entre les Entreprises du médicament (Leem) et le CEPS, chargé de fixer et de réguler les prix.

Conséquences des TFR

Lorsqu’un TFR est institué, le PFHT et le prix grossiste hors taxe (PGHT) restent inchangés sauf pour le princeps si celui-ci décide d’aligner son prix sur celui du générique. Le plafond de la remise commerciale est toujours de 40 % (depuis septembre 2014). En revanche, ce qui change, c’est le prix public TTC, car il n’y a plus d’équivalence de marge en valeur absolue pour le pharmacien entre générique et princeps : la marge du pharmacien n’est plus calculée en fonction du prix du médicament de référence, mais du tarif, selon le droit commun, c’est-à-dire à partir de son PFHT.

Malgré le TFR, la marge générique demeure supérieure à celle du princeps, même si le princeps au TFR s’est aligné et s’il continue d’appliquer une remise à 2,5 %. Mais une fois passé au TFR, un princeps est soumis aux mêmes règles sur les remises que les génériques et peut donc consentir jusqu’à 40 % de remise.

L’instauration d’un TFR entraîne une perte de marge importante, à la fois sur le générique et sur le princeps. Néanmoins, elle est moindre sur le générique (- 36 %) par rapport au princeps (- 65 %), grâce à la remise sur facture au mieux de 40 % sur le générique. Ainsi, l’écart de marge en valeur entre princeps et générique augmente après TFR.

Même si le gain « marge plus remises » du pharmacien sur le générique est plus faible après TFR, il est en proportion trois plus élevé que celui du princeps qui diminue aussi. Le pharmacien a donc un intérêt économique à continuer la substitution. Cependant, en s’alignant sur le TFR, le princeps rend de facto la substitution plus difficile.

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