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Alerte rouge pour les pharmacies rurales

Publié le 3 juin 2011
Par Francois Pouzaud
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Perte de chiffre d’affaires, régions désertées par les médecins, manque de vocation des repreneurs… L’enquête économique annuelle de l’APR dresse un état des lieux bien sombre pour les pharmacies installées loin des centres-villes.

Les temps sont durs pour les officines rurales et suburbaines. C’est ce que révèle l’étude Celtipharm, élaborée pour le compte de l’Association de pharmacie rurale (APR). Entre 2009 et 2011, la proportion des pharmacies qui ne disposent que d’un seul médecin dans leur zone de chalandise est, en effet, passée de 43 à 60 % (voir Le Moniteur n° 2884 du 28/05/2011).

Or, la baisse du nombre de médecins est une tendance de fond, quel que soit le nombre de pharmacies et de médecins dans la zone. En l’espace de deux ans, 36 % des officinaux interrogés dans cette étude (soit 3 724 pharmaciens) ont perdu, en moyenne, deux prescripteurs. Les régions les plus touchées par la paupérisation médicale ? Le Centre, la Bourgogne et le Nord-Pas-de-Calais, qui ont enregistré des pertes de plus de 40 % de prescripteurs. Pourtant, les difficultés économiques ne sont pas forcément corrélées à la désertification médicale. La moitié des pharmacies sondées qui peinent à joindre les deux bouts se concentrent dans d’autres régions, en particulier dans le Limousin, la Basse-Normandie et l’Ile-de-France. En outre, la taille s’affirme de plus en plus comme un facteur clé, conditionnant la pérennité de l’officine. Or, dans les zones où seules une officine et un médecin coexistent, les pharmacies de petite taille sont de plus en plus nombreuses. Ainsi, celles dont le chiffre d’affaires est compris entre 0,5 M€ et 1 M€ sont maintenant presque majoritaires (47 %), alors qu’elles n’étaient que 20 % en 2009.

La fermeture de 930 pharmacies d’ici 2015

La perte d’un prescripteur porte un grave préjudice à l’économie de l’officine. Celtipharm estime à plus de 17 % la baisse de chiffre d’affaires annuel entre 2008 et 2011 (pour une officine réalisant un CA de 1 M€ en 2008). Conséquence : les pharmaciens ont été contraints de licencier des salariés (83 %). Ce n’est pas près de s’arrêter : 76 % prévoient encore des restrictions de personnel, et 30 % des pharmacies isolées disposant d’un seul médecin dans leur zone de chalandise envisagent de céder leurs fonds (contre 26 % pour celles disposant de plus d’un médecin). Pour 11 % d’entre elles, la question ne se pose même plus : elles vont devoir mettre la clé sous la porte quand 17 % n’ont toujours pas trouvé de repreneur.

L’avenir semble bien noir pour les officines rurales. Si rien ne change, l’enquête prévoit la fermeture de 930 pharmacies entre 2011 et 2015.

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Des officinaux sur le fil du rasoir

Installé dans un village de la Creuse, à Faux-la-Montagne, Olivier Prioux a failli perdre l’unique médecin du bourg. Il a pu assurer sa pérennité économique grâce à la création d’une maison de santé. « La communauté de communes a racheté les locaux d’un ancien restaurant pour y installer une maison de santé pluridisciplinaire comprenant un cabinet médical », raconte-t-il. D’autres ont eu moins de chance. L’un de ses confrères, situé à 20 kilomètres, a déjà perdu deux des quatre médecins des environs. La solution ? « Elle réside dans la création de médecins mobiles qui se déplacent dans des points relais pouvant être situés dans des pharmacies ou à proximité », argue Olivier Prioux.