Tombée aux oubliettes
La baisse des ressources de la répartition s’est poursuivie en 2015. Même si elle se régule, les pertes s’accumulent d’année en année. La profession réclame des mesures concrètes et rapides concernant sa rémunération. Mais le gouvernement reste toujours sourd à son cri d’alarme.
Sans surprise, les baisses de prix sur le médicament remboursable poursuivent le travail de sape sur le chiffre d’affaires et les marges des grossistes même si, depuis deux ans, la cadence de la baisse s’est ralentie. Le direct a moins la cote auprès des pharmaciens. Soucieux de préserver leur trésorerie, ils privilégient de plus en plus les commandes au « fil de l’eau ».
Plus de volumes vendus, plus de références, le grossiste s’affirme comme le circuit naturel d’approvisionnement en génériques des officinaux. En 2015, sur les 843 millions d’unités vendues en génériques, la répartition a en livré 585 millions, soit 70 % du marché en volume contre 65 % en 2014. En gagnant des parts de marché sur le direct et la vente des génériques, les répartiteurs parviennent ainsi à mieux limiter la casse. « Les répartiteurs gagnent des parts de marché sur le générique, mais à quel prix ! », s’exclame Emmanuel Déchin, délégué général de la Chambre syndicale de la répartition pharmaceutique (CSRP). « Leurs marges qui sont négociées de gré à gré avec chaque laboratoire sont inférieures à la marge réglementaire et ne permettent pas de couvrir leurs frais de distribution », rappelle-t-il.
Pour une rémunération propre à la répartition
Huit ans de baisse ininterrompue de la marge pèsent lourd dans les comptes d’exploitation des répartiteurs. D’autant que « la répartition est arrivée au maximum de ses capacités à réaliser des gains de productivité, sauf à ce que le réseau officinal se contracte », alerte Emmanuel Déchin. La seule issue pour les entreprises est alors de gagner de la part de marché sur leurs concurrents. « Nous sommes les acteurs les plus touchés et il n’y a aucun élément à ce jour qui laisse espérer une inversion de cette tendance », ajoute-t-il.
Comme les officinaux, les répartiteurs souffrent de l’indifférence du ministère de la Santé qui devient de plus en plus insoutenable face à la dégradation économique de ces entreprises. « En janvier 2016, le directeur de cabinet de Marisol Touraine nous avait promis la création d’un groupe de travail », pointe Emmanuel Déchin. Ce groupe de travail est finalement constitué fin 2016. Deux gros dossiers sont toujours en souffrance: la refonte du système de rémunération des répartiteurs et la distorsion de concurrence entre le circuit de la répartition soumis à des obligations de service public et celui des ventes directes exempté de ces contraintes, alors que les deux circuits perçoivent la même rémunération. « Il serait légitime que nos obligations de service public soient rémunérées spécifiquement. Pour cela, il faudrait un dispositif juridiquement solide et économiquement efficace qui permette de singulariser la rémunération des répartiteurs par rapport à celle du circuit des ventes directes », assène-t-il.
Les sorts de la répartition et de l’officine sont toujours et encore liés. A la différence que les grossistes peuvent plus difficilement organiser un rapport de force avec le gouvernement pour tenter d’obtenir quelque chose.
CONTRIBUTEURS
Emmanuel Déchin (CSRP)
L’ANALYSE
Comme en 2014, c’est sur la répartition que l’impact des baisses de prix sur le médicament remboursable en ville a été le moins douloureux : – 0,05 % en CA et – 0,64 % en marge avant contribution et taxe.
Les grandes perdantes sont les ventes directes qui subissent une double peine (baisse des prix et des volumes).
Même si la mise en place du nouveau mode de rémunération de la répartition en 2012 s’est traduite par une perte de marge importante, le retour à une marge linéaire (6,68 % sur le PFHT avec un montant plancher de 30 centimes et un plafond de 30 €) semble plus efficace que la nouvelle rémunération des pharmaciens pour atténuer les effets des baisses de prix.
L’ANALYSE
La tendance 2016 est globalement identique à celle de 2015, avec une situation nettement moins critique pour les ventes directes (- 2,07 %) et une dégradation d’activité légèrement accrue pour la répartition (- 0,68 %) qui reste néanmoins le maillon le moins exposé. Le deuxième acte de la réforme de la rémunération des pharmaciens (honoraire de dispensation à 1 €) semble jusqu’ici faire perdre un peu moins de CA au réseau (- 1,30 %) qu’en 2015 (- 1,74 %).
L’ANALYSE
Le modèle et la stratégie des CERP (proximité géographique et relationnelle, indépendance, actionnariat des pharmaciens, distributions de dividendes coopératifs…) a le vent en poupe. Ce sont les trois seuls grands répartiteurs nationaux à gagner des parts de marché en 2015 (CERP Rouen : + 0,53 point, CERP Rhin-Rhône-Méditerranée : + 0,27 point, CERP Bretagne : + 0,10 point). Les « autres » (Sogiphar, short-liners) tirent aussi leur épingle du jeu (+ 0,63 point). OCP, le leader, a perdu en 2015 ce qu’il avait gagné en 2014, retrouvant ainsi sa part de marché de 2013. Alliance Healthcare perd de la part de marché pour la cinquième année consécutive (- 5,64 points depuis 2011).
L’ANALYSE
En 8 ans, la perte de marge cumulée atteint 237 M€. L’année la plus noire est 2012 (- 83 M€), année du changement de marge des grossistes et d’aubaine pour le direct dont les ventes de génériques ont été boostées par le dispositif « tiers payant contre génériques ». En 2008, la perte était également importante (- 66 M€) et correspondait à une baisse de marge des répartiteurs (passage de 10,30 % à 9,93 % sur la première tranche).
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