Attractivité du métier de pharmacien : le frein des salaires et de la formation initiale

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Attractivité du métier de pharmacien : le frein des salaires et de la formation initiale

Publié le 30 septembre 2024
Par Sana Guessous
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Alors que la profession multiplie les campagnes pour faire connaître les métiers de l’officine, l’attractivité marque le pas. La politique salariale en pharmacie n’y est pas étrangère. Le coût élevé des études et les difficultés d’accès à la filière non plus. 

Malgré les campagnes pour doper l’attractivité, les effectifs de pharmaciens n’augmentent pas de manière significative. En témoignent les chiffres récents de l’Ordre national des pharmaciens : le nombre d’officinaux a en effet progressé d’à peine 0,6 % en 2023. Une « tendance à la stabilité » qui se manifeste par des tensions de recrutement en officine… et ailleurs.

Combattre cette désaffection est donc une préoccupation de chaque instant pour la profession. Outre la campagne de l’Ordre national des pharmaciens et le défi « Bouge ta pharma » lancé par les étudiants, une initiative intitulée « Et si toi aussi, tu devenais pharmacien ? » mobilise cette fois-ci les membres de l’Académie nationale de pharmacie : à travers sept vidéos diffusées sur Youtube entre le 25 septembre et le 4 octobre, des pharmaciens vantent les atouts de leurs branches respectives – pharmacien industriel, hospitalier, d’officine, biologiste, mycologue, distributeur ou encore enseignant-chercheur. – « Le format vidéo nous permet de toucher des publics peu familiers du monde de la pharmacie et de les sensibiliser à l’intérêt de la profession », explique Jean-Louis Beaudeux, doyen de la faculté de pharmacie de Paris et président honoraire de l’Académie nationale de pharmacie.

Des salaires qui n’évoluent pas

Donner davantage de visibilité aux métiers de la pharmacie ne suffit cependant pas. Le déficit d’appétence pour la branche s’explique aussi par des négociations salariales piétinent depuis plusieurs mois et qu’un nouveau round est prévu pour le 16 octobre. « Ces blocages n’amélioreront pas la situation. Les enjeux salariaux sont au cœur de la problématique de recrutement et de fidélisation des employés », assure David Brousseau, secrétaire fédéral de Force ouvrière pour la pharmacie d’officine. Un argument dont se défendent les syndicats de pharmaciens, arguant de l’équilibre économique fragile de l’officine. « Le problème de l’attractivité de la branche ne résulte pas de la seule problématique de la rémunération », conclut une enquête de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF) sur les tensions de recrutement dans le secteur, réalisée en 2023.

Pour Jean-Louis Beaudeux, « les rémunérations dans les professions de santé en général ne sont plus à la hauteur de l’investissement et de la prise de responsabilité assumés par les professionnels. Dans le cas de la pharmacie, c’est une réalité qui concerne les adjoints mais aussi les titulaires. »

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Les étudiants pointent des problèmes d’orientation…

Pour Valentin Masseron, porte-parole de l’association nationale des étudiants en pharmacie de France (Anepf), la baisse d’attractivité de la pharmacie est à imputer avant tout à un manque de lisibilité de l’offre d’études pharmaceutiques. « L’organisation des études de pharmacie et l’existence de deux parcours différents – Pass et la LAS, NdlR – désorientent de nombreux étudiants. Parcours Sup ne met pas non plus en valeur toutes les filières de la pharmacie. »

« Quand un lycéen s’engage dans des études de santé par le biais du Pass ou de la L.AS, il est conditionné pour s’orienter vers les études de médecine, ce qui nous pose un très gros problème. On récupère une minorité d’étudiants, dont certains choisissent la pharmacie par dépit, faute de pouvoir accéder aux études médicales », déplore Jean-Louis Beaudeux.

… et la cherté des études

Autre frein majeur à l’accès aux études de pharmacie : le coût de la rentrée, estimé par l’Anepf à 3 095,28 euros, en hausse de 2,72 % par rapport à 2023. « Nous déplorons le peu d’aides financières proposées aux étudiants pharmaciens », poursuit Valentin Masseron, qui souhaite également voir revalorisée la rémunération des stagiaires de sixième année. « 550 euros, c’est très peu pour un étudiant qui est à un an de devenir docteur en pharmacie. Nous restons mobilisés pour que la réforme du troisième cycle soit menée à bien, et que les étudiants de sixième année puissent être rémunérés 1250 euros. »