L’éradication du VIH en 2030, un objectif réaliste ?

En 2030, la lutte contre le sida pourrait-elle être reléguée au passé, comme l’espère l’association Aides ? À l’origine de cette échéance, les 17 Objectifs du développement durable (ODD) édictés en 2015 par l’Organisation des nations unies (ONU). Troisième de ces objectifs, celui sur la santé et le bien-être se décline en plusieurs cibles, dont celle visant, « d’ici à 2030, à mettre fin à l’épidémie de sida, à la tuberculose, au paludisme et aux maladies tropicales négligées ».

Arrêt des contaminations par le VIH

Plutôt que l’éradication du VIH, impliquant une disparition du virus, c’est plutôt un arrêt des contaminations que vise l’ONU. D’autant que, faute de traitement curatif − sur lequel les recherches se poursuivent − 39,9 millions de personnes vivent avec le VIH à travers le monde, sans autre recours qu’une trithérapie qui rend le virus indétectable, mais ne l’élimine pas.

Faisant écho aux ODD, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et l’Onusida ont mis au point leurs propres objectifs, que tout pays doit s’efforcer d’atteindre pour mettre fin à l’épidémie : les « 3 x 95 ». À savoir : 95 % des personnes vivant avec le VIH doivent être dépistées, 95 % d’entre elles doivent être sous trithérapie, 95 % des personnes traitées doivent avoir une charge virale indétectable, gage de santé individuelle, mais aussi de non-transmissibilité du virus.

Un objectif difficile à atteindre en France

Si plusieurs pays africains, épaulés par les bailleurs internationaux, ont déjà atteint les 3 x 95, les pays occidentaux n’y sont pas encore. « Pour la France, la fin de l’épidémie en 2030 demeure un objectif, mais il sera probablement difficile à tenir », reconnaît le D^r Hugues Cordel, médecin infectiologue à l’hôpital Avicenne (Bobigny – Seine-Saint-Denis) et président de la Société française de lutte contre le sida (SFLS). Malgré les progrès, le VIH continue à circuler activement dans certains groupes (homosexuels, migrants), tandis que 43 % des dépistages demeurent tardifs (stade sida, moins de 350 CD₄/mm³) selon les données de 2022 de Santé publique France.

D’où l’importance d’un renforcement du dépistage et de la prévention. Celle-ci repose sur plusieurs piliers : « mise sous traitement de toute personne infectée, utilisation du préservatif, recours à la PrEP (prophylaxie préexposition), bonne information sur le traitement post-exposition (TPE) », explique Hugues Cordel. « Pour cela, il faut une politique de santé efficace, permettant de traiter tout le monde. Même les plus précaires », dont les migrants, souvent peu au fait des dispositifs de dépistage et de prévention.