- Accueil ›
- Business ›
- Transactions ›
- Acquisition ›
- Acheter une pharmacie en liquidation judiciaire
Acheter une pharmacie en liquidation judiciaire
Etranglés par les charges et dépourvus de recettes suffisantes, de plus en plus de titulaires, la mort dans l’âme, doivent se résigner à se mettre en liquidation judiciaire. Si ces officines sont attractives pour les acquéreurs à la recherche d’une bonne affaire, il leur faut néanmoins se montrer vigilants. Conseils.
Racheter une entreprise à la barre d’un tribunal de commerce peut être une bonne affaire dans la mesure où le prix de cession est souvent au rabais. Les prix pratiqués dans les cas de liquidation judiciaire n’atteignent jamais, pour le secteur officinal, le pourcentage du chiffre d’affaires en vigueur. « C’est toute l’ambiguïté du système, mais c’est aussi la loi de l’offre et de la demande », résume Christine Daguet, pharmacienne et présidente du tribunal de commerce de Châteauroux, dans l’Indre. Et, en toute logique, ce sont les affaires les plus urgentes qui sont vendues au rabais. Ainsi, récemment, une pharmacie parisienne a été cédée à 185 000 euros alors qu’elle en valait six fois plus… Une autre, toujours à Paris, affichée à un prix de vente de 1,4 million d’euros, s’apprête à recevoir une première offre à un million d’euros, soit une ristourne de 30 %.
Etudier, analyser et anticiper avant de reprendre l’officine
Acquérir une pharmacie en liquidation n’est pas une opération à réaliser à la va-vite. Il faut bien étudier le dossier, analyser la situation et anticiper. Par exemple, un repreneur peut penser faire une bonne affaire en achetant à un prix très intéressant une pharmacie bien placée géographiquement. Or, celle-ci peut se retrouver sans réel passage parce que des travaux vont modifier le sens de circulation ou avec une fermeture de son centre commercial.
En outre, selon l’état financier de la pharmacie, l’acquéreur devra probablement gérer des licenciements. Dans ce cas, il devra en faire la demande au mandataire de justice et la faire signer au tribunal de commerce.
Enfin, il est fréquent qu’une pharmacie en liquidation ait perdu une grande partie de sa clientèle et de ses fournisseurs, notamment si elle a contracté de grosses dettes auprès de ces derniers. Il y a donc de fortes chances pour qu’elle ait du mal à se fournir et à refaire ses stocks dans des délais normaux. En reprenant l’entreprise, le nouveau titulaire devra donc, non seulement reconstituer une clientèle découragée par les dysfonctionnements antérieurs, mais aussi le réseau des fournisseurs. C’est un travail de longue haleine et la crédibilité du pharmacien risque d’être écornée par ce lourd passif.
Attention, car même si le tribunal a arrêté un plan de cession, l’ancien pharmacien continue d’exercer jusqu’à ce que le Conseil de l’Ordre statue sur la demande du cessionnaire. Le nouvel acquéreur ne pourra pas obtenir une autorisation préalable de reprise. Conséquence : la pharmacie en dépôt de bilan continue de perdre de l’argent durant au minimum quatre à cinq semaines entre la décision de plan de cession du tribunal de commerce et l’autorisation du Conseil de l’Ordre.
Tout faire pour préserver les emplois
En pratique, les ventes d’officines en liquidation judiciaire se font au tribunal de commerce. Les dépôts de bilan sont annoncés sur le site du Conseil national des administrateurs et des mandataires judiciaires (http://www.ajmj.fr) et par voie de presse dans les pages légales des quotidiens régionaux ou des périodiques locaux spécialisés ainsi que dans la presse nationale professionnelle.
Lorsque l’officine est liquidée (après échec d’un plan de redressement), un mandataire de justice est désigné par le greffe du tribunal de commerce pour traiter le dossier. Un juge-commissaire est chargé d’en signer toutes les étapes.
1 – Le pharmacien acquéreur doit saisir l’administrateur pour obtenir le dossier de présentation et le cahier des charges de l’entreprise en cession.
2 – Il doit faire sa proposition de rachat au tribunal de commerce ou auprès du mandataire de justice affecté au dossier. Le délai qui lui est accordé pour remettre son dossier peut aller de un à deux mois, mais ce délai peut être, suivant la situation de l’entreprise, prolongé ou accéléré. « En fonction de ce qui doit être remboursé aux créanciers, les délais peuvent en effet être plus longs pour permettre d’avoir un nombre plus important de propositions de reprise », explique Christine Daguet. Au moment de faire une proposition de reprise, le repreneur doit obtenir des garanties bancaires et fournir la preuve du mode de paiement de l’entreprise validé par la banque. Un chèque représentant 10% de la transaction est encaissé à la décision de la cession. Le montant restant est demandé au moment de l’acte de cession, généralement dans un délai de deux mois. La date de reprise de l’officine est aussi fixée dans le dossier. Si plusieurs pharmaciens ont présenté un dossier, le juge opte pour le mieux-disant afin de rembourser au maximum les créanciers. Le juge porte également une attention particulière au règlement de questions sociales afin de conserver les collaborateurs. « Nous sommes tentés de préférer un dossier dont la proposition de prix est moindre, mais qui assure une reprise des emplois », renchérit Christine Daguet.
3 – Lorsque l’offre est acceptée par le tribunal, l’acquéreur potentiel signe une promesse de vente avec l’administrateur judiciaire.
4 – Ce document est envoyé au Conseil de l’Ordre qui statue et donne, ou non, son autorisation.
Donner un nouveau souffle l’entreprise
Reprendre une pharmacie en liquidation, c’est un peu faire table rase du passé. Le nouveau dirigeant va réorganiser totalement l’entreprise en vue de la rendre économiquement viable. Ce sera donc l’occasion pour lui d’impulser des idées nouvelles. « Le repreneur va prendre l’officine à bras-le-corps pour la rendre attractive et rentable », explique Christine Daguet. Le changement de titulaire va aussi permettre de redynamiser, par de nouveaux projets et orientations, une équipe souvent essoufflée.
Le stock d’une pharmacie en liquidation étant généralement au plus bas, le changement de main sera également l’occasion de le reconstituer entièrement, voire de le diversifier, pour l’adapter à une nouvelle clientèle.
Difficultés financières en recrudescence
Dans le secteur officinal, les redressements et liquidations judiciaires sont en recrudescence. « Beaucoup de pharmacies ont des rentabilités minimes. Les déremboursements et les génériques, beaucoup moins chers, ont entraîné une baisse des chiffres d’affaires. Les pharmaciens sont donc obligés de vendre », note Christine Daguet, pharmacienne et présidente du tribunal de commerce de Châteauroux (Indre). Sur 23 000 officines, la proportion de pharmacies connaissant de graves difficultés est encore marginale. Mais c’est une tendance qui commence à s’installer. « Les pharmacies souffrent réellement, même les plus grosses. Les mutuelles et l’Assurance maladie sont très longues à rembourser. Actuellement, une ou deux pharmacies tombent tous les mois à Paris. C’est énorme ! », confie le juriste d’un cabinet d’avocats parisien. Selon le portail d’information économique Coface Rating, l’indice de risque des pharmacies, quoi qu’en légère baisse, était de 6,1 sur 10 mi-décembre 2009, alors que la moyenne des entreprises (tous secteurs confondus) est de 5,8.
- L’IA au service des pharmaciens : un levier contre la fraude aux ordonnances ?
- « Non, monsieur Leclerc, les pharmaciens ne sont pas des nuls ! »
- [VIDÉO] Médicaments : on vous livre cette idée…
- Sante.fr : l’outil de référence pour faire connaître ses services aux patients
- Campagnes publicitaires de médicaments OTC et des produits de parapharmacie
- Prophylaxie pré-exposition au VIH : dis, quand reviendra-t-elle ?
- Financement des officines : 4 solutions vertueuses… ou pas
- Prescriptions, consultations : les compétences des infirmiers sur le point de s’élargir
- Dispensation à l’unité : chassez-la par la porte, elle revient par la fenêtre
- Quelles populations sont actuellement à risque de développer un scorbut ?

