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Comptes hypothécaires
La crise grecque et le plan de sauvetage des pays de la zone euro destiné à aider la Grèce à éponger ses trous budgétaires ont révélé la faillite d’un système. Le secteur de la santé est lu i aussi contaminé. Quel est le risque de contagion ?
Début mai, les pays de la zone euro et le Fonds monétaire international (FMI) venaient à la rescousse de la Grèce en adoptant un plan d’aide de 146 milliards de dollars. « Notre pays est comme un bateau qui coule », s’alarmait Geórgios Papandréou, Premier ministre grec. De fait, la Grèce a évité de peu la tragédie : alors que son déficit budgétaire atteignait près de 13 % de son produit intérieur brut (PIB) et sa dette près de 300 milliards de dollars, elle était rétrogradée par les agences de notation et ne pouvait plus emprunter sur les marchés financiers qui lui demandaient des taux d’intérêts trop élevés.
En contrepartie de son geste, le FMI a demandé aux Grecs de lourds sacrifices : relever leur taux de TVA, supprimer les primes équivalant à deux mois de salaire dans les services public et geler les salaires sur trois ans. L’âge de la retraite devrait par ailleurs passer de 53 à 67 ans. Si l’Union européenne s’est attelée au sauvetage de l’économie grecque, c’est aussi parce que la crise comportait un risque de contagion, notamment pour le Portugal, l’Italie, l’Irlande et l’Espagne, pays les plus fragilisés par la crise financière. Pourtant, comme l’a remarqué, Herman Van Rompuy, président permanent du Conseil européen, « on ne peut comparer la situation grecque à celle des autres pays, chacun représentant un cas différent ». De fait, la crise grecque a ceci de bien particulier qu’elle émane d’un déficit structurel chronique dû à un fort endettement et à une mauvaise santé des finances publiques, lesquels puisent leurs racines dans des recettes fiscales insuffisantes. Et d’un laxisme à tout va. Des pans entiers d’activité échappent à l’impôt quand ce ne sont pas des pratiques parallèles qui reposent sur la fraude fiscale. Le Premier ministre l’a lui même admis, la corruption est l’autre mal rampant du pays. Il estime que seule une lutte acharnée contre celle-ci permettra de faire d’importantes économies et de réduire le déficit public du pays. « En luttant contre la corruption, nous pouvons réaliser des économies de l’ordre de 8 % de notre PIB, selon une étude de l’Institut Brookings de Washington, ce qui représente quand même 20 milliards d’euros », a déclaré récemment Geórgios Papandréou.
La médecine générale et les soins hospitaliers pris en charge à 100 %
Le système de santé grec est certes centralisé par l’Etat, mais il n’en demeure pas moins morcelé. Aux côtés de l’IKA, la sécurité sociale à laquelle adhèrent 50 % des Grecs, une centaine de caisses offrent une couverture maladie et relèvent, selon la nature de leurs assurés, de six ministères différents. Le ministère de l’Emploi et des Affaires sociales chapeaute l’organisation et l’administration des services de sécurité sociale. Au ministère de la Santé et de l’Aide sociale revient la gestion des centres de premiers soins, des hôpitaux, des centres sociaux pour enfants et personnes âgées ainsi que de la répartition territoriale des services de santé et d’aide sociale. Tandis que le ministère de la Défense a la maîtrise des services de santé de l’armée, le ministère de l’Agriculture et sa caisse OGA celui de la protection santé de la population rurale, soit 25 % des Grecs, et que le ministère de la Marine marchande prend en charge les marins et leurs familles. Enfin, le ministère des Finances s’occupe du financement de l’ensemble des services.
La chute du « régime des colonels » en 1974, qui signa le retour de la démocratie, n’a paradoxalement fait qu’accentuer les inégalités entre les assurés des différentes caisses en même temps qu’elle entretenait l’opacité du système. Certes, le PASOK, le Parti socialiste, venu au pouvoir en 1981, a décidé de mettre en place un service national de santé en s’appuyant sur les bases déjà énoncées dans un article de la loi de 1937 selon lequel l’Etat est chargé de garantir des services de santé à l’ensemble des citoyens. La nouvelle législation a ainsi garanti une couverture à 100 % des soins à l’ensemble de la population grecque pour les services des médecins généralistes et les soins hospitaliers.
L’assurance privée peut-elle sauver le système ?
Aujourd’hui, il en résulte en quelque sorte un mélange du système de santé allemand à la Bismarck, qui respecte les corporatismes, et du système britannique du National Health Service. Un système fait de distorsions dont les cinq réformes successives ne sont cependant pas venues à bout. En 1993, un rapport du PASOK, revenu au pouvoir après une période de transition conservatrice, a révélé que « le service national de santé traverse une période de crise. Il est doté d’une gestion inadéquate et ne dispose pas des ressources suffisantes. En Grèce, l’insatisfaction générale des citoyens quant au service national de santé est plus grande que dans n’importe quel autre pays membre de l’Union européenne ».
La crise actuelle du système de soins et sa faillite latente ne seraient donc pas que conjoncturelles. « En dépit des différentes réformes, rien n’a changé », déclare Jean de Kervasdoué, professeur d’économie (voir ci-contre), qui croit la crise actuelle salvatrice. Il fonde ses espoirs dans la montée en puissance des assurances privées – selon lui plus vertueuses –, dont les assurés, au nombre de 150 000 il y a dix ans, sont passés aujourd’hui à 1,5 million. Mais qu’en sera-t-il pour les classes moyennes et les plus démunis ?
Un pays surmédicalisé
La Grèce est le paradis de la pharmacie : elle compte 9 700 pharmacies, soit une officine pour 1 280 habitants, alors que la moyenne européenne est de une pharmacie pour 3 360 habitants. Elle compte par ailleurs 4,5 médecins pour 1 000 habitants. Le prix du médicament fixé par l’Etat est le plus bas d’Europe. 9,5 % du PIB sont consacrés à la santé et le médicament représente 18 % des dépenses de santé.
« Tout le monde « touche » »
Le secteur de la santé reflète à lui seul l’état d’incurie actuel du pays : sécurité sociale des fonctionnaires devant aujourd’hui sept mois de remboursements aux pharmaciens, hôpitaux laissant des ardoises estimées à près de 4 milliards auprès de leurs fournisseurs, laboratoires pharmaceutiques ou fabricants de matériel médical, médecins hospitaliers qui, le matin, convoquent leurs patients à venir les consulter l’après-midi dans leurs cabinets de ville… « Tous les trafics sont possibles, même ceux de vignettes de sécurité sociale ! », relève Jean de Kervasdoué, professeur d’économie et de gestion des services de santé et auteur d’un rapport sur l’évaluation du système de santé grec pour l’OCDE. Il fait par ailleurs état d’une dichotomie très fréquente entre le système officiel et le système officieux. « Les tarifs peuvent être multipliés par 6 ou 10 selon que l’on fait appel au médecin dans le circuit hospitalier ou dans le privé. En général, le médecin perçoit 30 % de bakchich, condition sine qua non à une prise en charge rapide et efficace du patient ! », relate Jean de Kervasdoué. Il voit l’origine de la gangrène du système de soins dans la réforme de santé de 1983, laquelle a établi une organisation très centralisée où, comme il l’affirme, « tout le monde « touche » ».
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