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A préparations sur mesure, formations sur mesure
Pour pallier les difficultés de recrutement, Fabien Bruno, pharmacien spécialisé dans les préparations magistrales, a décidé de créer lui-même des formations continues axées sur les techniques du préparatoire. Et le premier essai, réussi, pourrait lui donner raison.
J’ai décidé de créer mes propres formations continues car il n’en existe pas qui soient adaptées aux techniques du préparatoire », explique Fabien Bruno, titulaire parisien de la Pharmacie homéopathique Delpech, spécialisée dans la sous-traitance des préparations magistrales. Les 40 personnes (pharmaciens, préparateurs en pharmacie et préparateurs de commandes) y travaillant vérifient les commandes, réalisent, libèrent puis envoient environ 850 préparations magistrales chaque jour.
Des professionnels qualifiés mais en nombre insuffisant, selon Fabien Bruno, qui reconnaît éprouver des difficultés à recruter. « Les préparateurs ne sont pas opérationnels dès la sortie du centre de formation des apprentis. Ils sont formés pour le comptoir et n’ont pas la culture du préparatoire, remarque-t-il. Ils apprennent bien à réaliser quelques préparations mais ils ne savent rien des préparations magistrales telles qu’elles sont faites en officine (formules, tours de main, produits, matériels tels les géluliers automatiques ou les machines à pommade). Les préparateurs doivent donc être formés et il leur faut environ deux ou trois mois pour bien comprendre le fonctionnement de notre préparatoire. »
« Nous avions même pensé à créer une école »
Fabien Bruno est également vice-président de la Société des officinaux sous-traitants des préparations magistrales (SOTP), laquelle réunit une trentaine de membres. Et tous sont confrontés au même problème. « Nous avions même pensé à créer une école », assure Fabien Bruno. Sans en arriver là, mettre sur pied sa propre formation est apparu comme la solution la plus appropriée à la SOTP. « Elle devient même une nécessité quand un pharmacien inspecteur de santé publique me demande quelles formations continues suivent les préparateurs. » Seule limite au projet : un organisme de formation ne peut pas former son propre personnel. Fabien Bruno décide alors de tester sa faisabilité en créant lui-même une formation à destination des pharmacies clientes de son préparatoire. « Le processus est assez simple : il suffit de déposer une déclaration d’activité auprès du préfet de région dans les trois mois suivant la première prestation », explique le titulaire. Le dossier à remplir comprend, notamment, un formulaire de déclaration, une copie de la première convention de stage, la liste des stagiaires présents, le programme détaillé, la liste des formateurs, un extrait de K-bis (document attestant de l’existence juridique d’une entreprise commerciale et délivré par le registre du commerce et des sociétés) et un extrait de casier judiciaire. Aucun agrément n’est demandé.
« Pour dispenser les cours, si l’officine est trop petite il est possible de louer une salle dans un hôtel ou de se renseigner auprès de la mairie ou des syndicats de la profession, lesquels acceptent en général », conseille Fabien Bruno.
Une première journée consacrée aux bonnes pratiques
La première journée de formation, qui a eu pour thème les Bonnes pratiques de préparation (BPP), s’est déroulée le 17 juin dernier dans un local attenant à l’officine. « Pour informer les pharmacies clientes du préparatoire, nous avons tout simplement utilisé les bons de livraison », indique le titulaire. Neuf personnes se sont portées candidates (huit préparateurs et un pharmacien titulaire, venus de Paris et de sa région, de Touraine et du Nord), parfois dans le cadre du droit individuel à la formation. Il n’était pas question pour Fabien Bruno de s’improviser formateur. « Ce n’est pas mon métier. » Toutefois, il n’a pas manqué de faire le point sur la question – d’actualité – des préparations dangereuses, rappelant que la dangerosité ne s’applique pas aux patients mais aux personnes qui manipulent les produits, et qu’il faut réfléchir sur les protections à mettre en œuvre. « Les stagiaires sont venus prendre connaissance des BPP, chercher des informations précises sur la mise en place de la traçabilité et des procédures ou s’assurer que la mise en place des BPP dans leur officine est correcte ou suffisante, témoigne Christel Leclercq, la formatrice du centre de formation des apprentis de Douai qui dispensait le cours. Ils souhaitaient aussi pouvoir rencontrer et échanger avec d’autres professionnels, se mettre en conformité avec la législation en suivant une formation continue et sortir de leur cadre habituel de travail. » Tous sont repartis avec des documents spécimens dont ils vont pouvoir s’inspirer au sein de leur propre officine : registre des matières premières et de l’échantillothèque, procédure de libération des préparations, étiquetage, contrat de sous-traitance…
Bientôt une prise en charge financière ?
Reste à s’assurer que la formation sera bien prise en charge par l’OPCA-PL(1) et le FIF-PL(2) – démarche faisant nécessairement suite à la déclaration d’activité – et à transformer l’essai en proposant d’autres thèmes de formation. « Il n’est pas question que nous fassions des formations qui existent déjà. Notre projet est de proposer des formations axées sur le préparatoire pour les officinaux qui réalisent encore des préparations », indique Fabien Bruno, qui ne manque d’ailleurs pas d’idées. Il envisage de créer une formation sur l’aromathérapie qui portera sur les techniques de fabrication des gélules et des suppositoires aux huiles essentielles. La partie théorique pourrait être réalisée par un professeur de faculté et la partie pratique par un membre du préparatoire. Une autre formation sur l’homéopathie traiterait des modes d’imprégnation des granules et des temps d’agitation. « Il y a une soixantaine de pharmaciens qui réalisent des préparations homéopathiques et chacun d’entre eux a son propre mode opératoire. Nous voulons essayer d’harmoniser ces pratiques en décrivant précisément leurs modes de réalisation. », livre le titulaire. Il faut dire que Fabien Bruno connaît le sujet sur le bout des doigts car il est aussi membre de la commission du Formulaire national à l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé.
Autre idée imaginée par le SOTP : monter une formation sur les excipients. « Donner les tours de main les plus appropriés en fonction des gammes proposées par les fournisseurs. Certaines formules ne sont pas très faciles à réaliser, c’est pourquoi nous voulons les expliquer, voire fournir des modes opératoires particuliers », annonce Fabien Bruno. Pas question en revanche de sortir de la thématique du préparatoire car, remarque le titulaire, « il y a déjà pléthore de formations pour les pharmacies classiques ».
Quant aux préparateurs de la Pharmacie homéopathique Delpech, ils vont être formés par la SOTP, laquelle devrait bientôt, elle aussi, se lancer dans l’aventure et devenir un organisme dispensant des formations sur mesure pour le personnel des officines sous-traitantes de préparations magistrales. L’objectif sera toujours le même : participer au développement des préparations. « Et, pour cela, il vaut mieux ne compter que sur soi-même », conclut Fabien Bruno, dont les premiers stagiaires ont livré une appréciation positive dans l’enquête de satisfaction à laquelle ils ont répondu en fin de journée.
(1) Organisme paritaire collecteur agréé des professions libérales (salariés).
(2) Fonds interprofessionnel de formation des professionnels libéraux (titulaires).
Envie d’essayer ?
LES AVANTAGES
• Pallier les difficultés de recrutement.
• Les membres de l’équipe officinale les plus compétents peuvent être mis à contribution comme formateurs. Ils peuvent alors transmettre leur savoir-faire et leurs tours de main.
• Aider au développement des préparations magistrales et officinales.
LES DIFFICULTÉS
• Préparer les dossiers pour la préfecture prend du temps.
• Relancer les clients qui ont donné leur accord de principe mais qui n’ont pas redonné de leurs nouvelles nécessite de passer une dizaine de coups de fil.
• Se lancer sans avoir la certitude que la formation sera prise en charge par l’OPCA-PL et le FIF-PL.
LES CONSEILS DE FABIEN BRUNO
• « Ce type de formation est réservé aux métiers de niche développés par des pharmacies un peu atypiques et qui ne trouvent pas de prestations adaptées à leur problématique. »
• « Créer sa propre formation peut être intéressant pour des pharmaciens spécialisés dans un domaine très précis comme la pharmacie vétérinaire ou l’oncologie dans le cadre du maintien à domicile. »
• « Il est nécessaire de se regrouper à plusieurs pharmacies offrant des activités communes afin de pouvoir réaliser des formations “croisées”, chaque pharmacien formant le personnel du confrère. »
• « Il est possible de s’associer avec une faculté. »
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