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Pas de revalorisation, les pharmaciens ripostent
Grève des gardes, « journée morte », manifestation à Paris… Les syndicats multiplient les actions. En ordre dispersé, mais avec un seul objectif : obtenir enfin des propositions concrètes sur la marge.
Depuis le 16 septembre, c’est-à-dire le lendemain de la réunion sur la marge au ministère de la Santé, les communiqués des syndicats professionnels se succèdent au gré des conseils d’administration. La profession est en émoi. Il n’y a eu, en effet, aucune proposition sérieuse des pouvoirs publics pour redynamiser l’économie de l’officine. Les syndicats appellent donc les pharmaciens à se mobiliser. La Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF) poursuit la grève des gardes et des urgences. L’Union nationale des pharmacies de France (UNPF) continue le mouvement de concert avec la FSPF, mais assorti d’une « journée morte » le 28 septembre, qui consiste à éteindre les croix, les enseignes et les vitrines des officines. Enfin, l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO) organise une manifestation le 11 octobre, devant le ministère de la Santé.
Il faut dire que la réunion du 15 septembre dernier ne s’est pas déroulée de manière habituelle. « Je n’ai jamais vu ça », déclare d’emblée Claude Japhet, président de l’UNPF. Déjà, première surprise, la présence de Frédéric Van Roekeghem, directeur général de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie (UNCAM). Gage de la volonté du gouvernement de trouver rapidement des solutions ? Pour Philippe Gaertner, président de la FSPF, « c’est un signal fort de la prise en compte de la problématique de la profession ». Gilles Bonnefond, président délégué de l’USPO est loin de partager cet avis. En fait, il est tout simplement furieux : « Frédéric Van Roekeghem a présenté des tableaux clairement biaisés, puisqu’ils présentaient une progression sur 2009, alors que tout le monde sait qu’il y a eu une récession cette année-là ! Cette présentation était faite pour destabiliser la réunion. » Claude Japhet observe également que « l’on peut faire tout dire aux chiffres » et que le directeur général de l’UNCAM n’a pris comme référence que les années 2006 et 2009, sans tenir compte des évolutions de 2007 et 2008. « Or, l’année 2006 est l’année la plus basse pour la pharmacie. La marge ne pouvait que progresser après ! », commente le président de l’UNPF. Une telle présentation n’est pas anodine, puisqu’elle permet aux pouvoirs publics de nuancer les difficultés économiques des officines.
Pas de proposition du ministère
Mais au-delà de cette bataille de chiffres, les négociations n’ont abouti à aucune avancée sur la revalorisation de la marge. Les syndicats ont pourtant exposé leurs propositions. La FSPF souhaite une augmentation de la 1re tranche de la marge à 75 €, ce qui permettrait d’englober 97 % des volumes des médicaments dispensés. L’UNPF se positionne également sur une revalorisation de la 1re tranche mais à 70 €. Quant à l’USPO, elle prône l’augmentation de 10 centimes du forfait par boîte. Les trois syndicats ont également demandé une rémunération des actes et services rendus par les pharmaciens dans le cadre de la loi Hôpital, patients, santé et territoire (HPST). Et pour financer ses propositions, la Fédération prévoit un tarif forfaitaire de responsabilité (TFR) sur les groupes génériques inscrits au répertoire avant le 31 décembre 2006. Un coup de massue pour Gilles Bonnefond qui a protesté contre ce « TFR généralisé ». Bien entendu, Philippe Gaertner se défend : « Il n’est pas question d’un TFR généralisé, puisqu’il concernerait uniquement les molécules anciennes comme l’oméprazole. » Il n’en demeure pas moins que cette nouvelle dissension entre les syndicats n’aide pas la cause de la profession. Claude Japhet estime même que la situation est bien pire encore : « Les négociateurs ont dévoilé leur stratégie en indiquant des pistes pour compenser une revalorisation de la marge, alors que le ministère n’a pas dit “j’y vais ou pas”. C’est pour cette raison que l’UNPF n’a fait aucune proposition de ce genre. « Ce n’est pas à nous de dire : “j’aimerais bien qu’on nous taxe sur tel ou tel point.” C’est aussi improductif de proposer de faire payer les complémentaires santé, les assurés ou les médecins. C’est une faillite de la négociation professionnelle. » Et de tempêter aussi contre la multitude des sujets abordés (expérimentation en établissement d’hébergement des personnes âgées dépendantes, pharmacies minières, médicaments dispensés par les vétérinaires…) lors de cette rencontre qui, a priori, ne devait traiter que de la revalorisation de la marge. « Le débat a été dilué », insiste Claude Japhet. Une pierre dans le jardin de l’USPO qui a, effectivement, mis sur le tapis de nombreux dossiers (voir en bas de page).
Agir avant le PLFSS 2011
Quoi qu’il en soit, l’UNPF et l’USPO se rejoignent sur un seul point : les pharmaciens doivent agir et riposter. « La prochaine réunion est fixée au 25 octobre. Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) 2011 aura été présenté. Un remaniement ministériel est imminent. Cette date ne nous convient pas. D’où notre manifestation le 11 octobre pour convaincre les pouvoirs publics d’arrêter les grands conditionnements et de revaloriser la marge », explique Gilles Bonnefond. Dans son communiqué de presse du 20 septembre, le syndicat précise que la manifestation doit aussi permettre de s’opposer au TFR. Même discours à l’UNPF qui propose donc une « journée morte » le 28 septembre. Une date qui n’a pas été choisie au hasard, puisque la Commission des comptes de la Sécurité sociale présentera ce jour-là le PLFSS 2011. « Nous ne pouvons pas attendre le 25 octobre. Le PLFSS sera lancé. De plus, la réunion est prévue de 11 h à 12 h. En une heure, nous allons parler de quoi ? Il faut une autre réunion bien avant », commente Claude Japhet. Dans cette tourmente, la FSPF paraît bien calme, même si elle donne pour consigne de poursuivre la grève des gardes. « Je considère que la réunion a été très constructive. Il n’y a pas lieu de lever l’action ni de durcir le mouvement », observe Philippe Gaertner. Qui pense par ailleurs qu’il reste une marge de manœuvre à la profession bien que la réunion ait lieu la veille de l’examen du PLFSS 2011 à l’Assemblée nationale. D’ici le 25 octobre, les syndicats doivent affiner leurs propositions… entre deux actions et dans un contexte de division syndicale.
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